Beauvais jour. La nomination, lundi 29 avril, de Bouygues-Egis comme nouveau gestionnaire du site a ravivé les tensions autour du projet d’agrandissement de l’aéroport de Beauvais, annoncé en février 2023. Caroline Cayeux, présidente d’agglomération du Beauvaisis, a tenté de rassurer en promettant un «aéroport vert».
Choisie par le Syndicat mixte de l’aéroport de Beauvais-Tillé (SMABT) ce lundi, l’entreprise Bouygues-Egis devient gestionnaire de l’aéroport nord-parisien pour les 30 prochaines années. Après cette annonce, plus de 200 personnes se sont rendues le même jour devant le siège de l’Agglomération du Beauvaisis pour protester contre l’agrandissement de l’aéroport et les nuisances associées (pollution de l’air, sonore et visuelle).
«On a l’ambition d’un aéroport vert avec des parkings respectueux de l’environnement, avec un certain nombre d’objectifs que nous avons fixés dans le cahier des charges pour justement améliorer la qualité de l’environnement», s’est défendue Caroline Cayeux auprès de France 3 le lendemain. L’ex-ministre des collectivités territoriales et actuelle présidente d’agglomération du Beauvaisis a par ailleurs précisé que le nombre de mouvements (atterrissages et décollages) «serait fixé à 45 000 par jour d’ici à dix ans», contre 32 000 à l’heure actuelle.
«Si la technologie peut permettre une diminution des émissions de gaz à effet de serre aériens, ces progrès sont réduits à néant si on augmente le nombre d’avions», déplore auprès de Vert Dominique Lazarski, présidente de l’Association de défense des riverains de l’aéroport (Adera). Elle ajoute : «On crée un beau garage pour faire voler plus d’avions».
«Ils oublient la totalité des vols dans leur bilan carbone, alors que l’aéroport en lui-même représente moins de 1% des émissions. C’est tout simplement du greenwashing», réagit Charlène Fleury, coordinatrice de Rester sur Terre, un réseau qui regroupe des collectifs anti-aérien.
Un cas représentatif
«L’aéroport de Beauvais n’est pas un cas particulier», analyse Charlène Fleury. Ce projet s’inscrit dans le développement de l’aérien en France et en Europe. La majorité des aéroports de l’Hexagone prévoient une augmentation du nombre de déplacements, comme ceux de Lille ou de Nantes. Pour rappel, l’aérien représente 2,9% des émissions mondiales de gaz à effet de serre et le secteur prévoit environ 4% de croissance par an (notre article).
Ces évolutions vont à contre-courant des objectifs climatiques de l’Accord de Paris signé en 2015 par la quasi-totalité des pays du globe. Pour espérer contenir le réchauffement sous les 2°C, le trafic aérien devra forcément décroître, selon une étude du Shift project et de Supaéro Décarbo de 2021 (notre article). «Avec notre réseau Rester sur terre, nous nous battons contre ces projets et revendiquons un plafonnement du nombre de vols par an, pour revenir au volume d’avant la pandémie de Covid, détaille Charlène Fleury».
Penser climat et santé
«L’avion émet énormément de CO2 et d’autres gaz à effet de serre, mais il ne faut pas oublier qu’il est également source de pollution sonore et de pollution de l’air», insiste de son côté Dominique Lazarski.
La surexposition au bruit aérien fait exploser les maladies cardio-vasculaires. Pour chaque augmentation de 10 décibels, le surcroît de mortalité est évalué à 18%, selon l’étude Discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé. Les conséquences de la pollution sonore du trafic aérien couteraient six milliards d’euros par an à la société, selon l’Ademe.
De plus, l’organisme Airparif a estimé que la concentration en particules ultrafines – qui pénètrent le système sanguin et traversent le placenta – aux abords de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle était tout aussi élevée que le long du périphérique parisien.
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