La quotidienne

Terre rouge

Chères toutes et chers tous,

Pendant les deux prochaines semaines, Vert passe à l'heure d'Égypte pour vous faire vivre la COP27 comme si vous y étiez. Parce que l'événement le réclame, les éditions quotidiennes seront un peu plus riches qu'à l'accoutumée - le climat le vaut bien!


Les grands de ce monde se retrouvent sur les bords de la mer rouge ; se pourrait-il que cette fois ils se bougent ?


Les huit dernières années en passe d’être les plus chaudes jamais vécues par l’humanité

Chaleur est grave. Dans l'attente du chiffre définitif pour 2022, les huit dernières années risquent d’être les plus chaudes jamais mesurées, alerte l’Organisation météorologique mondiale (OMM) ce dimanche, alors que s’ouvre la 27ème conférence des Nations unies (COP27) sur le climat.

Une « chronique du chaos climatique ». C’est par ces mots que le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a décrit le rapport sur l’état du climat mondial publié par l’OMM à l’occasion de l’ouverture de la COP27 en Égypte.

Chaque année, ce document est actualisé avec les dernières données sur les indicateurs climatiques clés (températures, niveau de la mer, état des glaciers) et l’impact des phénomènes extrêmes. La version provisoire du cru 2022, présentée ce dimanche, fait notamment état d’une accélération sans précédent du rythme d’élévation du niveau de l’océan, qui a doublé depuis 1993. Depuis janvier 2020, la mer a monté d’un centimètre.

Le mois d’octobre 2022 a été particulièrement marqué par des anomalies de températures. En dégradé de rouge, les zones où il a fait plus chaud que les normales météorologiques. En bleu, celles où il a fait plus froid. ©  Copernicus

2022 a vu se succéder de nombreux évènements climatiques extrêmes sur l’ensemble du globe, entre les inondations historiques au Pakistan, une sécheresse persistante qui aggrave l’insécurité alimentaire en Afrique de l’Est, et des vagues de chaleur intenses et répétées en Inde, en Chine et en Europe.

Dans les Alpes, les glaciers ont perdu entre trois et quatre mètres d’épaisseur en moyenne, soit « nettement plus que lors de l’année record précédente, en 2003 ». L’étendue de la banquise de l’Antarctique a chuté à 1,92 million de kilomètres carrés le 25 février - le niveau le plus bas jamais enregistré, à près d’un million de km2 de moins que la moyenne, précise l’OMM.

« Plus le réchauffement est important, plus les impacts sont graves. Les concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone sont si élevées que le seuil de 1,5 °C fixé dans l’Accord de Paris est à peine à notre portée », s’est alarmé le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas. En moyenne, les dix dernières années ont été plus chaudes de 1,14°C que la température moyenne de l’ère préindustrielle (milieu du 19ème siècle). 

2022 ne devrait se classer « que » au cinquième ou sixième rang des années les plus chaudes, en raison de l’influence refroidissante du phénomène océanique La Niña. Globalement, les années 2015-2022 risquent fort bien d’être les plus chaudes jamais enregistrées.

· Dans la nuit de vendredi à samedi, le Sénat a adopté le projet de loi sur les énergies renouvelables à la quasi-unanimité. Les sénateur·ices ont finalement écarté deux dispositions auxquelles le gouvernement n’était pas favorable : l’instauration d’une distance minimale de 40 kilomètres pour l’implantation d’éoliennes en mer, et le droit de veto des maires sur les projets d’énergies renouvelables sur leur territoire. Le texte sera examiné par l’Assemblée nationale début décembre. - Le Monde (abonné·es)
 

· Mené auprès de 25 000 personnes issues de 25 pays, un vaste sondage d’Elabe pour Veolia révèle que 71% des sondé·es se sentent vulnérables face aux conséquences du changement climatique et 60 % se disent prêt·es à mettre en place des changements d’ampleur. En France, 68 % des personnes interrogées sont d’accord pour réduire la vitesse à 110 km/h sur l’autoroute, une mesure efficace pour le climat comme pour le porte-monnaie (notre article). - Le Parisien (abonné·es)

© Marten van Dijl / Greenpeace

Ça en jet ! Samedi, à la veille de l’ouverture de la COP27, une centaine de militant·es a bloqué le départ d’onze jets privés à l’aéroport Schiphol d’Amsterdam (Pays-Bas). « Nous voulons moins de vols, plus de trains et une interdiction des vols court-courriers inutiles et des jets privés », a expliqué Dewi Zloch, responsable de la campagne néerlandaise de Greenpeace, au Guardian. Les jets privés polluent 5 à 14 fois plus qu’un vol réalisé sur une ligne commerciale et 50 fois plus qu’un trajet en train (notre décryptage). L’an passé, pas moins de 400 jets avaient été utilisés par des dirigeant·es et personnalités pour se rendre à la COP26. - The Guardian (en anglais).

Retard à l’allumage. Dimanche, la COP27 a débuté avec plusieurs heures de retard. En cause : des désaccords houleux sur l’agenda de ces deux semaines, qui fait l’objet de négociations et d’une adoption avant l’ouverture officielle. L’épineuse question des pertes et dommages liés au changement climatique (Vert) a notamment tenu les négociateur·ices éveillé·es tard dans la nuit. Ces mécanismes de compensations financières réclamés par les pays les plus vulnérables au changement climatique ont finalement été intégrés à l’agenda.
 

Payer sa part. Entre 110 et 120 chef·fes d’État et de gouvernement sont attendu·es, lundi et mardi, à Charm el-Cheikh pour le sommet politique, qui doit donner le ton de la COP27. Parmi les absents : le président chinois Xi Jinping et celui de l’Inde, Narendra Modi. Arrivé ce matin en Égypte, le président français Emmanuel Macron a déclaré vouloir « mettre la pression sur les pays riches non-européens [comprendre les États-Unis et la Chine] pour leur dire de payer leur part ».
 

Data for climat. La COP26, qui s’est déroulée à Glasgow (Royaume-Uni) l’an passé, a occupé 2,7 % de l’espace audiovisuel français, selon les associations Quota climat et Data for good, qui ont scruté 700 sources de radio et de télévision au moyen de l’outil Mediatree. Cette année, les deux associations publieront chaque jour un baromètre de la couverture médiatique accordée à la COP27. Dimanche, la couverture de l’ouverture de la COP n’a atteint que 2,3 % du volume médiatique contre 4,6 % l’an passé.

C comme COP

En 1992, le sommet de la Terre, organisé à Rio de Janeiro (Brésil), a accouché de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), un texte fondateur des négociations internationales sur le climat. C’est cette dernière qui organise les COP, pour conférences des parties (Conferences of the parties) sur les changements climatiques, qui se sont tenues presque tous les ans depuis 1995. Ces sommets constituent les seuls espaces mondiaux de négociation sur tous les sujets liés au climat : adaptation, transition énergétique, baisse des émissions, etc. La COP21, qui s’est tenue à Paris en 2015, a abouti à un objectif commun pour les 196 parties de la CCNUCC, résumé dans l’Accord de Paris : contenir le réchauffement planétaire « bien en dessous » de 1,5°C par rapport à la température moyenne de l’ère préindustrielle (milieu du 19ème) siècle, et si possible à 1,5°C.

Aux États-Unis, des citoyens s’activent pour faire exister l’écologie dans la campagne des midterms

Greens toniques. À la veille des élections de mi-mandat aux États-Unis, et alors que les sondages montrent un intérêt du public pour l’écologie, celle-ci peine à se faire une place dans les débats. Une armée d’activistes écolos se démène pour que le climat compte dans ce scrutin.

« Brianna, merci d’avoir été une bonne électrice en 2020. Maintiens ton super score de vote [« voting record »] en votant à l’élection générale du 8 novembre ! » signé Judy, « volontaire de l’Environmental voter project ». Comme Brianna, des milliers de personnes ont reçu ce sobre et intrigant message rédigé à la main au dos d’une carte postale marquée « merci de voter ». À quelques jours de l’élection de mi-mandat qui doit renouveler tous les sièges de la Chambre des représentants, un tiers de ceux du Sénat, les gouverneurs de 36 États sur 50 et pratiquement toutes les assemblées locales, les préconisations de vote se font plus nombreuses.

Aucune mention d’un candidat, ni de programme : Judy voudrait simplement que les citoyens votent. Mais seule une poignée de personnes est ciblée par ces messages, et c’est là toute la nuance. D'ici au 8 novembre, les 6 000 volontaires de l’Environmental voter project (EVP) auront appelé, sollicité par mail et criblé de publicités plus de cinq millions de personnes identifiées comme des « environnementalistes » qui ne mettaient pas ou plus les pieds dans un bureau de vote.

« La banque mondiale finance le chaos climatique ». Le 12 octobre, des militant·es de Shut Down DC protestent devant le siège de la Banque centrale à Washington D.C. pour réclamer davantage de justice climatique. © Claire Rossignol

« Les politiciens tiennent avant tout à gagner des élections, et vont là où vont les votes, résume Nathaniel Stinnett, fondateur de cette organisation à but non lucratif créée en 2015. Notre but ultime est de créer un raz de marée électoral “vert’” si important que les politiciens de tous les partis n’auront plus d’autre choix que de s’assurer que leurs actions reflètent les priorités des électeurs “verts” ».

Retrouvez la suite de notre reportage en pleine campagne des midterms sur vert.eco

+ Loup Espargilière, Juliette Quef et Clara Robert Motta ont contribué à ce numéro