La quotidienne

Les avions décollent, l’Etat atterre

La société crie l'urgence climatique jusque sur les tarmacs, mais le gouvernement refuse toujours de quitter son hamac.


Au tribunal, des militants font le procès de l'aviation

Classe affaire. Jeudi, sept militant·e·s comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour avoir envahi les pistes de l'aéroport de Roissy en octobre dernier.

« Je ne devrais pas être ici, mais en famille », glisse aux juges Audrey Boehly. Elle raconte ce qui l’a poussée à s’engager au sein du collectif Non au T4 et à enfreindre la loi. Au petit matin du 3 octobre, à l’appel des mouvements Alternatiba, ANV-COP21 et d’autres, 350 activistes investissent l’aéroport de Roissy pour dénoncer le projet de création d’un nouveau terminal, et le fort accroissement du trafic attendu. Plus de 80 d’entre elles et eux envahissent le tarmac et se prennent en photo devant un avion avec des banderoles pour demander à l’Etat d’amorcer la décrue du secteur aérien. Une centaine de personnes sont emmenées en garde à vue par la gendarmerie. Sept d’entre elles comparaissaient ce jeudi, accusé·e·s de « tentatives de troubles au fonctionnement d’installations aéroportuaires » et dégradations.

A la barre du tribunal de Bobigny, les sept activistes narrent leur prise de conscience, leurs tentatives répétées et vaines d’alerter le gouvernement – condamné pour son inaction et dont la loi « climat et résilience » n’aura qu’un effet minime sur le climat (Vert) – et la nécessité, en dernier ressort, de désobéir.

« Aller occuper un tarmac c’est un acte de vérité face à un tissu de mensonges » sur l’aviation et le climat, expliquait à l’aube le philosophe suisse Dominique Bourg, invité à témoigner pendant l’audience. © LE / Vert

Pour tenter d'obtenir la relaxe, les avocat·e·s de la défense plaident la liberté d’expression, ainsi que l’« état de nécessité » : selon cette notion, une action illégale (comme l'envahissement d'un aéroport à des fins d'alerte) pourrait être justifiée si elle a été commise afin d’empêcher la réalisation d’un dommage plus grave (le péril de la crise climatique).

En février dernier, l’exécutif a finalement abandonné le terminal 4 (Vert), mais pas les poursuites. Le procureur requiert des peines de 400 à 600€ d’amende et un à deux mois de prison avec sursis pour chaque prévenu·e pour l’entrave à la circulation et les dégradations en réunion. Ainsi qu’un mois avec sursis pour les deux militant·e·s qui ont refusé un prélèvement biologique. Le jugement est mis en délibéré et sera annoncé le 12 novembre.

En parallèle du volet pénal de cette affaire, une centaine de militant·e·s risquent des amendes individuelles de 750€, pour un rassemblement de plus de six personnes dans l’aéroport en temps de Covid-19. Une procédure administrative plus discrète qu’un procès, qui pourrait coûter un total 88 500 euros, selon l’estimation d’Alternatiba. Ainsi qu'« une autre façon de museler les militant·e·s », juge Elodie Nace, porte-parole du mouvement.

Pour revivre l'audience comme si vous étiez, retrouvez notre live tweet réalisé en direct de Bobigny. Une version enrichie de cet article est également à lire sur vert.eco. 

· Mercredi soir, le parlement de Turquie a enfin ratifié l'accord de Paris, signé par quelque 190 pays il y a cinq ans, en 2016. Ankara fait ainsi montre de bonne volonté à trois semaines de l'ouverture de la 26ème conférence de l'ONU (COP26) sur le climat. Invoquant une répartition injuste, selon elle, des efforts climatiques entre Etats, la Turquie était l'un des derniers grands émetteurs de CO2 à n'avoir pas ratifié cet accord, qui prévoit de contenir le réchauffement à moins de 1,5°C par rapport à l'ère préindustrielle. - 20 Minutes (AFP)

Des mérions superbes mâle (à gauche) et femelle © benjamint444

Il n'en pouvait piou d'attendre. Le mérion superbe remporte de justesse l'édition 2021 du concours de l'oiseau australien de l'année organisé par le Guardian. Avec 13 998 votes, cet élégant passereau dépasse d'une courte tête le podarge gris. Une drôle de compétition mise sur pattes par le journal anglophone pour mettre en valeur la foisonnante avifaune qui peuple l'Australie. Retrouvez la liste des prétendants sur le site du Guardian.

Les besoins qui libèrent

Besoin de soins, envie de toit. Dans leur essai De quoi avons-nous vraiment besoin ?, le collectif des Economistes atterrés élabore une nouvelle carte des besoins mis en lumière par la crise sanitaire, afin de faire société dans un contexte d’urgence écologique et sociale.

Comme d’autres crises avant elle, la pandémie de Covid-19 a permis de mettre le doigt sur les défaillances de notre système thermo-industriel. Bouffi d’inégalités, celui-ci transgresse les limites planétaires et rogne parfois sur l’essentiel – l’hôpital public en premier chef. En partant des besoins sociaux et individuels de l’humain moderne, le collectif d’économistes citoyen·ne·s apporte une parole forte, limpide et précise aux réflexions sur le « monde d’après ».

Se nourrir, se soigner, s’éduquer, faire culture, se loger et se déplacer, produire, travailler et vivre ensemble. Pour chacun des huit pôles de cette nouvelle boussole, les auteur·rice·s déploient des analyses et des propositions concrètes, démocratiques et radicales – qui induisent de vrais choix de société. Exemple dans le domaine de l’éducation, où un fossé se creuse : d’un côté, les partisan·e·s de l’accumulation de capital humain voient l’université comme la porte d’entrée du monde professionnel, où prime une logique d’investissement et de rentabilité ; de l’autre, les promoteur·rice·s d’un droit à l’émancipation y préfèrent l’acquisition de connaissances et le développement d’un esprit critique.

Les lecteur·rice·s apprécieront la logique renversante de cet ouvrage, qui ne s’arrête pas aux critiques du néolibéralisme mais dessine une utopie profondément réaliste. Un livre-programme accessible et percutant pour nourrir les consciences citoyennes de celles et ceux qui pressent le changement, et alimenter le débat public en ce début de campagne présidentielle.

De quoi avons-nous vraiment besoin ?, Les économistes atterrés, éditions Les liens qui libèrent, 256p., 20€. A paraître le 13 octobre.

Le brame du cerf

Et là, c'est le brame. A l'automne, en forêt, le promeneur discret peut surprendre un spectacle à nulle autre pareille. Pour trouver une partenaire comme pour provoquer ses adversaires, le cerf entonne une véritable symphonie : le brame. France 2 s'est promenée dans le Mercantour sur la piste du cervidé.

© France 2

+ Juliette Quef a contribué à ce numéro