La quotidienne

Le jugement premier

Chères toutes et chers tous,

🍁 Jusqu’à vendredi prochain, Vert passe à l’heure canadienne pour vous faire vivre la 15ème Conférence des Nations unies (COP15) sur la biodiversité comme si vous y étiez. Les éditions quotidiennes seront un peu plus riches qu'à l'accoutumée - le vivant le vaut bien !


Épinglé pour manquements à son devoir de vigilance, Total est au tribunal pour une affaire qui fera jurisprudence.


TotalEnergies au tribunal pour son méga-projet Eacop

Le jugement premier. Cinq ans après la promulgation de la loi sur le devoir de vigilance des multinationales, TotalEnergies est la première entreprise à devoir rendre des comptes à ce titre devant la justice. Une audience inédite s’est tenue le 7 décembre au tribunal judiciaire de Paris, portant sur la conduite de son projet pétrolier en Tanzanie et en Ouganda baptisé Eacop.

9h30, salle 2.02 du tribunal judiciaire de Paris. L’audience est à peine entamée que le juge Fabrice Vert soupire déjà. L’affaire qu’il doit juger ce matin est la première du genre. Ce qui semble le soucier. Et pour cause : la loi sur le devoir de vigilance votée en 2017, si pionnière et si emblématique soit-elle, tient « sur une feuille A4 ».

Son principe paraît pourtant clair : les multinationales doivent mettre en œuvre « de façon effective » un plan de vigilance permettant d’éviter que leurs filiales ou leurs sous-traitants ne commettent des atteintes aux droits ou à l’environnement à travers la planète. Mais une partie du texte a été censurée par le Conseil constitutionnel et, pour le reste, « le législateur a fait exprès que ces notions ne soient pas très déterminées », regrette le juge. C’est sur lui que retombe la lourde tâche d’interpréter la loi. Et son jugement, crucial, posera les bases de la jurisprudence future.

Dans sa plaidoirie, l'avocat des Amis de la Terre, maître Louis Cofflard, rappelle que le projet Eacop de Total en Ouganda et en Tanzanie « est l’un des plus attentatoires au climat ». Selon les deux avocats, le plan de vigilance élaboré par TotalEnergies souffre de nombreuses lacunes. « La cartographie des risques n’évoque pas de dangers environnementaux et il n’y a même pas d’appréciation sur les incidences climatiques », pointe Louis Cofflard.

Une carte représentant les différents risques environnementaux à proximité du projet d'oléoduc, réalisée par deux instituts de recherche. ©  SEI/IGSD

TotalEnergies y promet en revanche « une indemnisation juste et préalable » des personnes expropriées ainsi que « l’absence de restriction à l’accès aux terres », ce que Céline Gagey conteste catégoriquement : « 28 000 personnes n’ont pas reçu de compensation, quatre ans après le début des expropriations. En revanche, les terres ne peuvent déjà plus être utilisées. » Les ONG réclament le versement des compensations promises et la suspension des travaux le temps que le plan de TotalEnergies soit correctement rédigé et mis en œuvre.

La suite de notre reportage est à lire sur vert.eco

· Dans un jugement inédit rendu vendredi dernier, la justice australienne a invalidé un projet gazier en mer de Timor mené par le groupe Santos, en estimant que les communautés aborigènes n’avaient pas été correctement consultées. Pour le clan Munupi, qui vit sur les îles Tiwi, ce forage risquait de nuire à leurs ressources alimentaires maritimes, mais aussi au lien spirituel qu’il entretient avec la région. Cette décision pourrait faire jurisprudence et inquiéter d’autres compagnies énergétiques. - France info

· Mercredi, l’Union européenne et plusieurs pays du Nord, dont les États-Unis, le Canada ou le Japon, ont dénoncé la dégradation de l’environnement provoquée par l'invasion russe en Ukraine, lors de l’ouverture de la quinzième conférence des Nations unies (COP15) sur la biodiversité. Plus tôt dans la journée, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait accusé la Russie d'« écocide », sur les réseaux sociaux. Selon les autorités ukrainiennes, 50 000 dauphins sont morts à cause de la guerre en mer Noire, soit 20% d’une population déjà soumise aux pressions de la pêche et de la pollution. - France 24 (en anglais)

· Le tribunal judiciaire de Lyon (Rhône-Alpes) a condamné le fabricant de pesticides Bayer-Monsanto à verser 11 135 euros à l’agriculteur Paul François pour son intoxication à l’herbicide Lasso. Une victoire en demi-teinte pour l’exploitant charentais, qui réclamait près d’un million d’euros de réparation. La justice a écarté les pertes professionnelles et les dommages chroniques, pour ne retenir que les effets directs causés par l’inhalation accidentelle du pesticide. - Le Monde

Biodiversité

C’est le concept-clef de la 15ème Conférence des Nations unies (COP15) sur la diversité biologique, et pourtant, il n’est pas si simple à appréhender. Le terme « biodiversité » est apparu dans les négociations internationales en 1992, à l’occasion du Sommet de la Terre de Rio, qui a vu naître la Convention sur la diversité biologique (CDB), l’organisatrice des COP sur la biodiversité. Cette dernière regroupe toutes les formes de vie qui existent, ainsi que leurs interactions entre elles. C’est à la fois la diversité génétique au sein d’une même espèce – entre deux abeilles, par exemple ; celle entre les espèces, comme les érables, les chênes ou bien les pins. Et enfin, la diversité des écosystèmes - soit un milieu où évoluent des êtres vivants -, qu’il s’agisse des forêts, des prairies, des savanes ou des récifs coralliens. Sans oublier la diversité des relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres.

L’article complet est à lire en intégralité sur vert.eco

Faut-il tuer tous les moustiques ?

Ça pique. Ils grattent, tuent et prolifèrent avec le réchauffement climatique ; les moustiques hantent les nuits d’été et l’imaginaire des humains. Plus anciens qu’Homo sapiens, ils rendent pourtant de nombreux services à nos écosystèmes.

Avec près de 780 000 victimes par an, le moustique est de loin l’animal le plus meurtrier pour les humains (devant avant les humains eux-mêmes). De quoi lui donner une mauvaise réputation, pas toujours justifiée. Sur les 3 600 espèces de moustiques répertoriées, seule une centaine – dont les femelles exclusivement – piquent les humains pour pomper leur sang ; seules trois ou quatre ont un réel impact sur la santé publique par la transmission de virus et maladies.

Un risque cependant de plus en plus préoccupant en raison de l’adaptation de ces espèces aux insecticides, de la réduction de l’efficacité des antibiotiques sur les maladies véhiculées, ainsi que du réchauffement climatique. Les moustiques tigres, par exemple, se trouvent désormais à leur aise dans de nombreuses régions françaises, faisant craindre une épidémie de dengue. Même si la tentation de les voir disparaître est grande, il faut d’abord « apprendre à connaître les moustiques avant de vouloir les tuer », prévient Michel Collin, directeur d’un bureau d'études spécialisé dans la science de l’insecte en Bretagne.
 

Les moustiques font partie de l’équilibre du vivant

Outre le fait de nous piquer, les moustiques ont un rôle majeur dans la chaîne alimentaire. À l’état de larves, en tant qu’insectes ou après leur mort, les culicidés servent d’abord de repas aux oiseaux, chauve-souris, grenouilles ou libellules. Une étude publiée dans la revue Science of the total environment en 2020 a confirmé que la démoustication à l’aide du biocide Bti - notamment utilisé en Camargue - pouvait entraîner un déclin de la population d’oiseaux en supprimant une source importante de nourriture. 

L’impact de la démoustication sur la biodiversité en Camargue, Court métrage réalisé par les élèves de l'école MoPA en partenariat pédagogique avec la Tour du Valat.

La biodiversité au service de la régulation des moustiques

La préservation des écosystèmes, pour que les prédateurs naturels régulent les moustiques, reste la meilleure solution pour combattre leurs nuisances. Mieux vaut donc déjà protéger les espèces présentes, en équipant par exemple les villes d’hôtels à hirondelles, qui en font un festin (notre article). En misant également sur la stérilisation des mâles, ou la mise en place de pièges qui imitent la respiration et l’odeur humaines, les spécialistes s’accordent à dire que la réponse aux agressions des moustiques ne passera pas par l’éradication, mais par l’usage d’un panel varié de solutions.

Pour explorer davantage le sujet et les solutions imaginées contre les moustiques, lire cet article en intégralité sur vert.eco

Les votes sont ouverts jusqu’à demain matin et les résultats seront donnés dans l’édition de vendredi. N'hésitez pas à nous envoyer vos questions les plus brûlantes en répondant à ce formulaire, tout simplement. À vos claviers !

Les clichés les plus drôles du monde sauvage

One animal show. Pour s’imaginer à quoi pourrait ressembler la conférence des Nations unies (COP15) sur la biodiversité si on y invitait des représentants d’animaux, les Comedy wildlife photography awards viennent de dévoiler leur sélection des 10 photos animalières les plus décalées de l’année. Du félin qui se viande, aux primates en plein massage, les organisateur·rices espèrent qu’en reconnaissant des traits humains chez les autres êtres vivants, nous serons plus aptes à leur venir en aide.

Le prix du public, « Parle à ma main », représente deux manchots papous sur les îles Falkland. Cliquez pour accéder au reste du palmarès. © Jennifer Hadley

+ Loup Espargilière, Alban Leduc et Anne-Claire Poirier ont contribué à ce numéro.