Malgré une vive opposition locale, l’État continue d’afficher son soutien au projet de mine de lithium de l’entreprise française Imerys à Echassières (Allier). Lundi, le ministre de l’industrie Marc Ferracci s’est rendu sur le futur site d’extraction et a annoncé que le constructeur allait bénéficier d’une réduction d’impôt à hauteur «d’à peu près 200 millions d’euros».
Ce coup de pouce de l’État intervient alors que le coût de construction de cette mine – qui devrait permettre de produire 34 000 tonnes par an d’hydroxyde de lithium et d’équiper 700 000 voitures électriques chaque année –, a été réévalué à 1,8 milliard d’euros, contre un milliard initialement. Et ce, en raison de l’inflation et d’investissements «notamment pour réduire les impacts environnementaux et sociaux», a expliqué le responsable des projets lithium d’Imerys, Alan Parte.
L’État veut «limiter les dépendances que nous avons à un certain nombre de matériaux, de minerais critiques», a précisé Marc Ferracci. À lui seul, le projet d’Imerys, baptisé Emili, «offre de la souveraineté sur un tiers [des] besoins» de la France, selon l’entourage du ministre. La date de mise en exploitation a été repoussée de 2028 à 2030.
Une fois en état de marche, la mine d’Échassières sera le quatrième plus gros gisement au monde, de quoi exploiter du lithium pendant 50 ans. «Le but, c’est d’avoir une filière industrielle autour de la batterie, notamment avec des débouchés pour les batteries que vous connaissez qui sont notamment dans le véhicule électrique, mais pas uniquement», a indiqué le ministre, évoquant aussi la défense.
Une opposition qui ne faiblit pas
Si le projet est au cœur de la stratégie gouvernementale, l’opposition à la mine, elle, ne faiblit pas. Fin juillet, une manifestation d’opposant·es a réuni entre 200 et 300 personnes, à Échassières. Parmi les collectifs mobilisés : Stop.mines, qui avait dénoncé sur ses réseaux un projet «très énergivore, et qui risque de menacer la ressource en eau du territoire ainsi que la biodiversité». De fait, le processus d’extraction s’accompagne du pompage de 600 000 mètres cubes d’eau par an dans la rivière voisine, la Sioule. «L’équivalent d’une piscine olympique tous les deux jours», pointait le média Politis en mars 2024.
La pollution inquiète aussi. Étienne Philippe, membre de l’association locale Préservons la forêt des Colettes, avait confié à Politis que «ce genre de mine va chercher dans la roche des minéraux à l’état moléculaire. Les millions de tonnes de granites sont broyés pour trouver le mica, au sein duquel se trouve le lithium ou le béryllium [un métal polluant, NDLR]. Par un réseau de failles, les eaux souterraines viendront au contact de ces métaux, et on en retrouvera dans les réseaux d’eau d’Échassières.»
Selon Stop.Mines, ce projet «se targue de défendre la transition écologique alors qu’il ne remet absolument pas en cause le système actuel, dans une fuite perpétuelle pour le profit».
Lundi, le ministre a voulu rassurer : «Vous savez que la question de l’acceptabilité des projets est une question majeure et nous avons évidemment à cœur de faire en sorte que ces projets soient compris, soient acceptés.» Entre le 11 et le 31 mai 2024, une concertation publique a été organisée autour du projet et de ses impacts environnementaux. Les opposant·es y ont exprimé leurs inquiétudes, mais redoutaient que cette consultation ne soit que symbolique.
À lire aussi
-
En Suède, une église remarquable déplacée sur des remorques pour permettre l’expansion d’une mine de fer
Mettre l’église au centre du virage. Au nord de la Suède, à Kiruna, les opérations pour déplacer l’église de la ville minière — bijou architectural du pays — ont débuté ce mardi 19 août. À terme, tout le centre-ville doit être relocalisé pour rendre possible l’exploitation d’un immense gisement de minerai de fer. -
Il va piller les fonds marins en toute légalité : qui est Gerard Barron, l’«Elon Musk des abysses» ?
Il ne tourne Barron. Le riche homme d’affaires Gerard Barron est le cerveau de The Metals Company, une entreprise canadienne qui veut être la première au monde à extraire des métaux précieux des abysses, dès 2026. Son projet est sur le point de se concrétiser grâce à ses liens étroits avec la sphère politique américaine, encore faut-il que l’Autorité internationale des fonds marins le laisse faire. Portrait.