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Scénario négaWatt : la transition sans nucléaire ni guerre des ressources

100 transitions. L'association d'expert·e·s de l’énergie vient de proposer sa nouvelle feuille de route pour atteindre la neutralité carbone en 2050 en France sans l'atome, tout en créant de nombreux emplois.
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Pour lut­ter con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, la France doit impéra­tive­ment réduire à zéro ses émis­sions nettes de gaz à effet de serre d’i­ci à 2050. A cette date, le CO2 encore émis devra être com­pen­sé, par exem­ple en plan­tant des arbres. Pour ce faire, elle doit impéra­tive­ment décar­bon­er le secteur de l’én­ergie, respon­s­able de 70% des émis­sions nationales. 

Élec­trisés par la cam­pagne prési­den­tielle, le can­di­dat Macron (Vert) et ses con­cur­rents à droite (voir ici) ne jurent que par le nucléaire, arguant que les éner­gies renou­ve­lables sont inter­mit­tentes et gour­man­des en matéri­aux cri­tiques. Des argu­ments que négaWatt bat en brèche dans la cinquième édi­tion de son scé­nario de tran­si­tion énergé­tique, à paraître le 26 octo­bre, que Vert a pu con­sul­ter.  

L’as­so­ci­a­tion rap­pelle que le gise­ment d’é­conomies d’én­ergie est énorme en France. La con­som­ma­tion pour­rait ain­si être réduite de moitié en ciblant pri­or­i­taire­ment les secteurs du bâti­ment et du trans­port. Dans le bâti­ment, qui représente 40% de la con­som­ma­tion énergé­tique du pays, négaWatt pro­pose ain­si de pass­er de 30 000 loge­ments rénovés par an — le rythme actuel — à 800 000 d’i­ci 2030. Une oblig­a­tion de réno­va­tion glob­ale (pro­gres­sive et con­di­tion­nelle) des loge­ments serait instau­rée, et celle-ci devrait per­me­t­tre d’atteindre la norme bâti­ment basse-con­som­ma­tion (BBC). Un tel pro­gramme pour­rait créer 300 000 emplois non-délo­cal­is­ables, promet l’association.

Dans le trans­port, négaWatt vise aus­si une forte réduc­tion du traf­ic routi­er, en par­tie reportée sur le rail. Pour ce faire, il faudrait inve­stir mas­sive­ment dans les trans­ports en com­mun et le vélo, aug­menter la fis­cal­ité sur le fret routi­er, réduire la vitesse à 110km/h sur les autoroutes et met­tre fin aux véhicules diesel ou essence d’ici 2035. Elle con­teste par ailleurs la souten­abil­ité des scé­nar­ios « tout élec­trique » en rai­son de la crit­ic­ité de cer­taines matières comme le lithi­um et le cobalt util­isé dans les bat­ter­ies. A côté des véhicules élec­triques, elle pro­pose donc de miser sur les véhicules ali­men­tés en gaz d’o­rig­ine renou­ve­lable, comme le biogaz obtenu par fer­men­ta­tion.

© négaWatt

Côté appro­vi­sion­nement, l’as­so­ci­a­tion pro­pose de dou­bler le nom­bre d’éoli­ennes en France, pour attein­dre 18 500 machines (con­tre 30 000 actuelle­ment en Alle­magne). Elle prévoit égale­ment de mul­ti­pli­er par deux le rythme d’in­stal­la­tion de solaire pho­to­voltaïque et de dévelop­per le biogaz agri­cole. Le nucléaire, lui, est appelé à dis­paraître pro­gres­sive­ment d’i­ci à 2045 et le démar­rage de l’EPR de Fla­manville, vic­time de nom­breux aléas, est aban­don­né. La perte d’emplois dans le nucléaire – estimés aujour­d’hui à 220 000 par la société française d’énergie nucléaire – serait par­tielle­ment com­pen­sée par la créa­tion de 135 000 emplois dans le secteur des éner­gies renou­ve­lables.

Le 25 octo­bre, le ges­tion­naire du Réseau de Trans­port d’Elec­tric­ité (RTE) pub­liera d’autres scé­nar­ios, bap­tisés « futurs énergé­tiques ». Une autre sor­tie qui sera très scrutée par l’exé­cu­tif comme par les candidat·e·s à l’élec­tion prési­den­tielle.