Un train d’avance. Afin de répondre à l’urgence climatique et désenclaver des territoires, la coopérative ferroviaire veut réouvrir un axe jugé non rentable par la SNCF il y a dix ans.
C’est une victoire pour les amoureux·ses du rail. La ligne Lyon-Bordeaux, abandonnée par la SNCF il y a dix ans faute de rentabilité, devrait être remise en service par la coopérative ferroviaire Railcoop en juin 2024. «Une étude de marché de 2019 prouve que cette ligne serait viable économiquement. Le marché ferroviaire s’est encore étendu depuis, donc les conditions sont plus favorables encore pour lancer le service», assure Nicolas Debaisieux, directeur général de Railcoop. Maintes fois reportée depuis plusieurs années, la décision a finalement été entérinée par un vote des sociétaires lors de l’assemblée générale du 22 février dernier. «C’est la réponse à une forte demande exprimée par les habitant·es et à l’unanimité des collectivités des territoires traversés», relate la coopérative. 87% des sociétaires ont voté en faveur de la réouverture de la ligne. Un résultat qui n’étonne pas Nicolas Debaisieux. «Il y a urgence face au dérèglement climatique et pour reconnecter ces territoires au service ferroviaire». Le réseau actuel sert en priorité les grandes villes et les axes Paris-régions.
Le service de Railcoop sera d’abord restreint à un aller simple par jour, suivi du retour le lendemain. La ligne transversale desservira notamment Périgueux, Limoges, Guéret, Montluçon et Roanne, au cours d’un trajet de 7h30. La commercialisation des billets se fera à bord des trains et via des partenaires en ligne. «Nous avons décidé de ne pas faire appel à des distributeurs automatiques, car ce serait trop coûteux à installer dans toutes les gares», explique le président de la coopérative Philippe Bourguignon. Afin de rester abordable, le prix du billet sera indexé sur celui du covoiturage, soit environ 40 euros pour un Bordeaux-Lyon. À l’avenir, l’entreprise devrait proposer deux allers-retours par jour. Les rames — du matériel d’occasion acquis auprès de la SNCF — seront dans un premier temps alimentées par du diesel. «Il n’est pas prévu d’électrifier cette ligne. En revanche, nous pourrons à terme utiliser du biogaz», assure le président.
Faute de soutien de la part des banques et des pouvoirs publics, les sociétaires ont décidé de financer ce premier service de voyageur·ses sur leurs fonds propres. Railcoop doit encore récolter 4,1 millions d’euros supplémentaires en 2023, notamment pour se doter d’une rame additionnelle. Une somme importante à première vue. «Il s’agit du montant auquel nous devrions recourir auprès de nos sociétaires si nous n’arrivions pas à renégocier le prix de la rénovation des rames, ni à réduire le coût interne de nos structures et qu’aucun acteur n’acceptait de nous faire crédit», nuance Philippe Bourguignon. Si ce scénario devait se produire, la coopérative reste néanmoins confiante : «En 2022, nous avons déjà réussi à réunir près de 4 millions», affirme Alexandra Debaisieux, directrice générale déléguée de Railcoop. Deux levées de fonds sont en cours, l’une en parts sociales et l’autre en obligations. À ce jour, environ 14 000 sociétaires particuliers, entreprises et collectivités ont déjà investi dans la coopérative pour un montant total de plus 8 millions d’euros.
Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence pour le transport de passagers en 2020, Railcoop devrait être le premier nouvel entrant sur le marché des trains en vitesse classique en régions. À l’avenir, la coopérative prévoit d’exploiter d’autres lignes interrégionales parmi lesquelles Lille-Nantes, Massy-Brest ou encore Clermont-Ferrand — Saint-Etienne. L’entreprise fait déjà rouler des trains de marchandises depuis novembre 2021 entre les territoires du Lot et de l’Aveyron, et la banlieue toulousaine.
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