Décryptage

Pollution de l’air : à Paris, une amélioration «sans précédent» sur la dernière décennie

L’air et la manière. À Paris, la pollution de l’air a fortement reculé entre 2012 et 2022, selon une étude publiée ce mercredi par l'organisme Airparif. Une amélioration inédite, notamment près des axes routiers, portée par des politiques de réduction du trafic et de transformation de l’espace urbain.
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Moins de voitures, plus de vélos, des quais piétonnisés et des rues plus apaisées : en une décennie, Paris a profondément changé de visage. Portées par la municipalité d’Anne Hidalgo (Parti socialiste), ces transformations n’ont pas toujours fait l’unanimité – souvent critiquées pour leur impact sur la circulation ou le stationnement. Mais leur efficacité en matière de pollution atmosphérique est désormais difficile à contester.

Selon une étude publiée ce mercredi 27 août par Airparif, l’organisme chargé de surveiller la qualité de l’air en Île-de-France, la situation s’est «nettement améliorée» entre 2012 et 2022. 

Des cyclistes sur l’Esplanade des Invalides, à Paris. © Paris bike tour/Flickr

Airparif s’est appuyé sur les concentrations de plusieurs polluants atmosphériques bien connus pour leurs effets nocifs sur la santé humaine : le dioxyde d’azote (NO₂) et les particules fines PM2.5 et PM10, en suspension dans l’air. Leur inhalation prolongée est associée à de nombreuses pathologies : asthme, cancers, accidents vasculaires cérébraux (AVC), infections respiratoires, et même décès prématurés – comme le rappelle l’organisme sur son site.

Les résultats de l’étude sont particulièrement encourageants à proximité du trafic routier, principal émetteur de ces polluants. Sur le boulevard périphérique, historiquement l’un des points noirs de la pollution parisienne, les concentrations de NO₂ sont passées de 108 micromètres par mètre cube (µg/m3) en 2012, à 65 µg/m3 en 2022. Dans Paris intra-muros, les concentrations moyennes observées près des axes routiers se situaient entre 62 et 83 µg/m³ en 2012. Elles se situent, en 2022, entre 30 et 43 µg/m³. Soit une baisse d’environ 40 %.

Même tendance encourageante pour les particules fines : sur l’ensemble du territoire parisien, les concentrations de PM2.5 et de PM10 ont diminué entre 2012 et 2022. Sur le périphérique, la concentration annuelle moyenne de PM10 est passée de 49 µg/m³ à 30 µg/m³ en dix ans. Soit une baisse d’environ 28%.

Évolution de la concentration de dioxyde d’azote (NO₂) à Paris entre 2012 et 2022. © Airparif

Ces progrès ont été salués ce mercredi par Dan Lert, adjoint à la maire de Paris en charge du plan climat, de l’eau et de l’énergie. Il s’est félicité d’une «amélioration sans précédent de la qualité de l’air sur les dix dernières années». En mai dernier, une précédente étude du même organisme avait déjà montré que la pollution de l’air en Île-de-France avait été divisée par deux en vingt ans (notre article). Cette nouvelle étude confirme qu’à Paris – seule – la baisse atteint 40 %… en seulement dix ans.

Des mesures qui ont fait leurs preuves

L’amélioration de la qualité de l’air à Paris résulte de plusieurs facteurs, selon Airparif. C’est avant tout grâce à la «modernisation du parc automobile» : dans le cadre des nouvelles normes européennes, des véhicules neufs moins polluants ont remplacé les plus anciens. Et ce renouvellement a été encouragé par la création d’une Zone à faible émission (ZFE) dans la ville en 2017, ce dispositif qui limite en son sein la circulation des véhicules les plus polluants.

On doit également la baisse de la pollution à la réduction du trafic routier : «un ensemble de mesures visant à limiter la place de la voiture individuelle et à favoriser ses alternatives, par exemple à travers le déploiement d’infrastructures spécifiques comme les pistes cyclables ou les voies de bus réservées et la limitation des places de stationnement», détaille Airparif.

Au-delà des polluants atmosphériques, les mesures mises en place ont également contribué à la lutte contre le changement climatique. Les émissions de dioxyde de carbone (CO₂, un des principaux gaz à effet de serre) liées au trafic routier ont diminué de 35 % entre 2012 et 2022. Une baisse majoritairement liée à la réduction du trafic.

«Paris ne peut pas agir seul»

Malgré les progrès enregistrés, Dan Lert a tenu à rompre avec le triomphalisme : «La qualité de l’air à Paris reste en dehors des seuils réglementaires». En matière de dioxyde d’azote, un seuil fait office de référence : celui fixé par l’Organisation mondiale de la santé, à 10 µg/m³. Au-delà, les effets sur la santé sont nettement accrus. En 2022, malgré les progrès considérables, 100% des Parisien·nes étaient encore exposés à des niveaux supérieurs à cette limite.

«Le gouvernement a abandonné la lutte contre la pollution de l’air et la lutte contre le réchauffement d’une manière générale».

Par ailleurs, selon l’Observatoire régional de santé Île-de-France, la pollution de l’air demeure la première cause de mortalité et de maladies chroniques dans la capitale. Chaque année, 11,4% des décès à Paris seraient liés aux particules fines, et 5,4% au dioxyde d’azote.

Selon Dan Lert, «Paris ne peut pas agir seul». Et «le gouvernement a abandonné la lutte contre la pollution de l’air et la lutte contre le réchauffement d’une manière générale». Raison pour laquelle la mairie de Paris a annoncé mercredi avoir saisi la justice en juin contre le dernier Plan de protection de l’atmosphère (PPA) de la région Île-de-France.

Ce document, «qui fixe les grandes orientations de la politique de l’État pour améliorer la qualité de l’air sur notre territoire», n’est «pas du tout à la hauteur de l’urgence sanitaire», a dénoncé Dan Lert. «Le problème de ce plan, c’est qu’il repose en grande partie sur la mise en place de la ZFE, a-t-il rappelé. Sauf que la suppression de ce dispositif a été votée en juin dernier à l’Assemblée nationale.

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