Quel est le point commun entre les Etats-Unis, le pétrolier TotalEnergies, et la compagnie aérienne Air France ? Tous ont promis d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Autrement dit, dans trente ans, les dernières émissions que produiront leurs activités seront intégralement compensées, en plantant des arbres, par exemple. Mais pourquoi les cancres du climat font-ils tous la même promesse ? Parce que ça ne mange pas de pain.
Lors de son assemblée générale, lundi, l’Iata a donc juré que ses membres, qui représentaient 82% du trafic avant la pandémie (selon l’Iata) seront neutres en carbone d’ici 2050. Un vœu pieux qui n’engage à rien, puisque personne n’est capable de prédire l’état de l’économie ou du climat dans 30 ans. Mais l’annonce suffit à donner l’illusion de l’action.
Pis, l’Iata et ses membres se gardent bien de détailler la trajectoire à adopter dès cette année pour atteindre cet objectif ambitieux. Or, il faudrait faire vite. L’Union européenne vient de se fixer pour but de réduire de 55% les émissions de dioxyde de carbone (CO2) de ses membres d’ici 2030, étape cruciale sur le chemin de la neutralité.
Par ailleurs, pour y parvenir, l’Iata fait la part belle à des solutions technologiques souvent irréalistes à grande échelle comme les agrocarburants (notre article sur ce sujet), les avions électriques ou à hydrogène, voire fantaisistes, comme la capture de CO2 (Vert). Autant de manières d’éluder le vrai problème : « Pour nous, l’objectif principal est de continuer à croître, parce que ce n’est pas le trafic qui est l’ennemi, ce sont les émissions », a déclaré lundi Sebastian Mikosz, vice-président de l’Iata en charge de l’environnement.
Ne lui en déplaise, dans une étude publiée en mars dernier, le Shift project et Supaéro Décarbo avaient conclu qu’il était impossible de contenir le réchauffement climatique à moins de 2°C en continuant de faire croître le trafic aérien (notre article). Aujourd’hui, l’aviation civile est responsable de 5% environ du réchauffement (Réseau action climat), alors que seule une poignée de personnes prennent l’avion: en 2018, 1% de la population mondiale était responsable de 50% des émissions de l’aviation (Shift project).
Enfin, l’Iata se garde bien de réclamer l’un des leviers les plus efficaces pour réduire l’impact du transport aérien : la mise en place d’une taxation du kérosène – toujours exonéré – qui rendrait son coût plus élevé pour les consommateurs.