Le scénario semble tout droit sorti d’un film catastrophe. Ce mardi, Melissa, ouragan de catégorie 5 – le niveau maximal sur l’échelle de Saffir-Simpson – doit toucher terre en Jamaïque, avec des vents atteignant 280 kilomètres heure (km/h) et des précipitations dépassant 750 litres d’eau par mètre carré au total. Le Centre américain des ouragans (NHC) anticipe des bourrasques «potentiellement mortelles», une submersion côtière pouvant atteindre quatre mètres et des dommages comparables à ceux causés par les ouragans Katrina (2005, La Nouvelle-Orléans, États-Unis) et Maria (2017, Porto Rico, États-Unis).

«Tout le monde en Jamaïque doit désormais être dans un endroit sûr afin d’y rester le temps que la tempête passe», a prévenu Michael Brennan, le directeur du NHC. Le premier ministre de la Jamaïque Andrew Holness a également mis en garde contre des dégâts majeurs, notamment dans l’ouest de l’île : «Je ne pense pas qu’une seule infrastructure de cette région puisse résister à un ouragan de catégorie 5, donc il pourrait y avoir d’importantes destructions», a-t-il déclaré sur la chaîne américaine CNN, appelant les habitant·es à évacuer les zones les plus à risque.
Pour de nombreux spécialistes, Melissa illustre la façon dont le changement climatique intensifie les phénomènes extrêmes. Sur Bluesky, la géographe française Magali Reghezza estime que la tempête est «dopée par le réchauffement». Même constat pour le climatologue américain Daniel Gilford : «Le changement climatique aggrave tous les aspects les plus néfastes de l’ouragan Melissa. Il entraîne des précipitations et des submersions côtières plus importantes et avec des intensités plus fortes que ce qui aurait été observé dans un monde sans changement climatique.»
Auprès de Vert, le climatologue et océanographe au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) Jean-Baptiste Sallée détaille : «Une fois qu’ils sont développés, les ouragans ont tendance à prendre de l’énergie avec la chaleur de l’Océan. Une eau en surface plus chaude, comme celle des tropiques, a donc tendance à favoriser l’intensité des ouragans forts, et à les faire durer plus longtemps.»
Cette explication rejoint les observations scientifiques récentes : une étude publiée en novembre 2024 par l’institut américain Climate Central avait montré que les 11 ouragans recensés cette année-là s’étaient intensifiés de 14 à 45 km/h à cause de la hausse des températures des océans.
Déjà sept décès dans les Caraïbes
En Jamaïque, l’inquiétude grandit d’autant plus que Melissa avance lentement – à seulement 4 km/h –, laissant craindre des pluies persistantes et des vents destructeurs pendant de longues heures. Et les sols sont déjà lourds, gorgés d’eau après les pluies des semaines précédentes, aggravant les risques de glissements de terrain, souligne Esther Pinnock, chargée de communication à la Croix-Rouge pour la Jamaïque.
Les premières rafales et pluies intenses se font déjà sentir. «La situation s’aggrave d’heure en heure», a rapporté Esther Pinnock lundi soir. L’ouragan, qui balaie les Caraïbes depuis plusieurs jours, a déjà causé au moins quatre morts en Haïti et en République dominicaine. En Jamaïque, trois décès ont été signalés lundi, survenus alors que des habitant·es tentaient de se préparer à l’arrivée du cyclone.
Les autorités jamaïcaines ont fermé les ports ainsi que l’aéroport international. Selon le premier ministre, 881 abris ont été ouverts aux 2,8 millions d’habitant·es de l’île.
Le dernier ouragan majeur à avoir frappé la Jamaïque remonte à Gilbert, en 1988, qui avait fait 40 morts et causé des dégâts considérables. Continuant sa route vers le nord, Melissa devrait ensuite frapper Cuba mercredi, où les autorités ont commencé à fermer des écoles et à évacuer des habitant·es, alors que le manque d’électricité empêche la bonne diffusion des messages d’alerte. L’ouragan pourrait finalement atteindre le sud des Bahamas et l’archipel des îles Turques-et-Caïques, un territoire britannique.
À lire aussi
-
La hausse de la température des océans amplifie la puissance destructrice des ouragans, selon une étude
Houle en délire. L’augmentation des températures des océans a accéléré la vitesse des vents de tous les ouragans de l'Atlantique en 2024, selon l’étude de l'institut de recherche américain Climate central, publiée mercredi. Une confirmation que le réchauffement climatique accentue l’intensité des tempêtes. -
Des employés de l’agence fédérale de gestion des catastrophes naturelles mis à pied après avoir critiqué la politique de Trump dans une lettre ouverte
Fema au moral. Ce mardi 26 août, l’administration Trump a mis à pied une douzaine de salarié·es de la Fema — l’agence américaine de gestion des situations d’urgence — après l’envoi d’une lettre ouverte, signée par 180 fonctionnaires. Ils y critiquent l’inexpérience de la direction actuelle qui pourrait mener, selon eux, à reproduire les erreurs de l'ouragan Katrina.