Mardi, le barrage hydroélectrique de Kakhovka, au sud de l’Ukraine, a été détruit par des explosifs, entraînant le déversement de milliards de tonnes d’eau dans le fleuve Dniepr. Une catastrophe humaine et écologique aux conséquences encore difficiles à appréhender.
«Une bombe environnementale de destruction massive» : c’est par ces mots, forts, que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a décrit la rupture du barrage de Kakhovka, survenue mardi. Ce réservoir fournit la région en eau potable et permet l’irrigation des terres agricoles du sud du pays. Les 18 milliards de tonnes d’eau qu’il contenait se déversent actuellement dans le Dniepr et dans les localités situées en aval, dont la ville de Kherson.
«Les occupants russes ont commis un nouvel acte d’écocide qui fait planer la menace de conséquences environnementales sans précédent sur le sud de l’Ukraine et toute la région de la mer Noire», a réagi l’ONG ukrainienne Ecoaction. Dans une liste effarante, cette dernière énumère la mort d’animaux d’élevages, domestiques ou sauvages, la destruction des écosystèmes aquatiques et terrestres à proximité, la perturbation de l’approvisionnement en eau de nombreuses infrastructures, la pollution des ressources hydriques, les inondations de maisons ou d’entreprises ou encore les risques pour les terres agricoles. Au moins 24 villages ont été inondés, a précisé le ministre ukrainien de l’intérieur, Igor Klymenko, mardi. 150 tonnes d’huile de moteur ont été déversées à la suite de la rupture du barrage, d’après les autorités, qui ont évoqué un risque de fuite supplémentaire de plus de 300 tonnes.
La rupture du réservoir laisse aussi craindre un nouveau risque pour la centrale nucléaire de Zaporijia, située en amont du barrage et qui utilise l’eau pour refroidir les combustibles. La situation est sous contrôle, d’après l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) : «Il n’y a pas de risque à court terme pour la sûreté nucléaire», a confirmé le directeur général de l’AIEA, Rafael Mariano Grossi, soulignant les systèmes alternatifs de refroidissement disponibles.
«Les dommages provoqués par la destruction du barrage signifient que la vie va devenir intolérablement plus dure pour ceux qui souffrent déjà du conflit. Les conséquences de ne pas être en capacité de fournir d’aide à des millions de personnes touchées par les inondations dans ces zones sont potentiellement catastrophiques», a décrit le responsable des Nations unies pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, lors d’une réunion d’urgence au Conseil de sécurité de l’ONU. Selon la Convention de Genève de 1949, la destruction de barrages est considérée comme un crime de guerre.
Il est encore trop tôt pour appréhender les conséquences à long terme de cet événement. «Il est actuellement impossible d’évaluer la situation», a simplement commenté le Groupe ukrainien pour la conservation de la nature. Il faudra attendre la décrue des inondations pour établir l’ampleur des dommages causés à l’ensemble des écosystèmes.
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