Décryptage

Climat : le réchauffement pourrait déjà avoir atteint +1,7°C

  • Par

C’est chaud. Le réchauffement climatique serait plus important que les estimations actuelles du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), révèle une étude, dont il faut toutefois prendre les résultats avec prudence.

Le changement climatique pourrait dépasser les +2 °C d’ici la fin de la décennie, soit vingt ans plus tôt que les prévisions actuelles, avance une étude publiée lundi dans la revue scientifique Nature climate change.

Les chercheur·ses se sont basé·es sur l’analyse de squelettes de sclérosponges, des organismes marins prélevés au large de Porto Rico, afin de reconstituer l’évolution des températures de l’océan des années 1700 à nos jours. Considérées comme des archives naturelles précieuses grâce à leurs données robustes, les sclérosponges constituent «le Saint-Graal de la reconstruction» des températures, d’après le docteur Amos Winter, co-auteur de l’étude.

Jusqu’à présent, l’étude du réchauffement climatique s’est largement basée sur la période de référence 1850-1900, notamment en raison de la disponibilité des données, pour la plupart enregistrées à partir du milieu du 19ème siècle.

L’étude suggère que le dérèglement climatique a en réalité débuté dès 1860, et que le réchauffement non pris en compte par les scientifiques jusqu’à présent s’élève à un demi-degré, portant le réchauffement global à +1,7 °C au lieu de +1,2 °C établi à l’heure actuelle.

En violet, les températures observées jusqu’à présent pour estimer le réchauffement climatique à partir de 1900. En bleu, les résultats de cette nouvelle étude suggèrent que le réchauffement débuterait à partir des années 1850.

En violet, les températures observées jusqu’à présent pour estimer le réchauffement climatique à partir de 1900. En bleu, les résultats de cette nouvelle étude suggère que le réchauffement débuterait à partir des années 1850. © McCulloch et al.

L’origine des données récoltées soulève toutefois des doutes sur la solidité des conclusions de l’étude. «Un seul endroit ne peut pas remplacer des données mondiales, car le climat varie d’un bout à l’autre de la planète, et c’est pourquoi la seule façon de mesurer la température mondiale est d’obtenir des données issues de l’ensemble du globe», nuance auprès du média Carbon brief Gabi Hegerl, professeure de science du système climatique à l’Université d’Édimbourg (qui n’a pas participé à l’étude).

Si elles sont utiles pour comprendre le réchauffement passé, ces conclusions ne sont pas le reflet du réchauffement actuel. Les politiques climatiques mondiales se basent sur les objectifs de l’Accord de Paris – à savoir maintenir le réchauffement bien en dessous de +2 °C en 2100 par rapport à l’ère préindustrielle, et si possible à +1,5 °C, pour éviter les pires impacts du réchauffement.

Les conclusions de cette étude ne remettent ainsi pas en cause la pertinence de l’Accord de Paris, puisque ces objectifs sont relatifs à une période précise. En effet, la limite des 1,5 °C «a été établie comme le seuil d’un réchauffement dangereux inacceptable et décrit l’augmentation des températures par rapport à la fin du 19ème siècle», rappelle la climatologue Friederike Otto à Carbon brief.

Si ces résultats étaient validés par le Giec, cela viendrait donc seulement «décaler» les conséquences associées aux différents niveaux de réchauffement : les impacts d’un réchauffement de +1,5 °C arriveraient finalement à +2 °C, et ainsi de suite.

Photo d’illustration : Sécheresse du fleuve Agly, dans le sud-ouest de la France, en avril 2023. Raymond Roig / AFP

Vert l’infini et au-delà

Dans le chaos actuel, plus de 10 000 personnes soutiennent Vert avec un don mensuel, pour construire la relève médiatique à nos côtés.
Grâce à ce soutien massif, nous allons pouvoir continuer notre travail dans l’indépendance absolue. Merci !

Alors que l’objectif de contenir le réchauffement à moins de 1,5°C est un échec, les scientifiques le martèlent : chaque dixième de degré supplémentaire compte. Dans le contexte médiatique actuel, chaque nouveau membre du Club compte. Chaque soutien en plus, c’est plus de force, de bonnes informations, de bonnes nouvelles et un pas de plus vers une société plus écologique et solidaire.

C’est pourquoi nous voulons désormais atteindre les 12 000 membres du Club avant le 6 juillet. Ces 2 000 membres supplémentaires nous permettront de nous consolider, alors que la période est plus incertaine que jamais, d’informer encore plus de monde, avec du contenu de meilleure qualité.

Rejoignez les milliers de membres du Club de Vert sans perdre une seconde et faisons la différence ensemble.