Monts émerveillent. Dans ce livre-entretien, l’auteur de bandes dessinées à succès raconte son amour de la montagne, son rapport à l’art, à l’écologie, à la politique. Une conversation avec le journaliste Adrien Rivierre, aussi érudite que passionnante, comme une fenêtre sur le monde par-delà les sommets.
Nous serions tentés de l’imaginer comme un ermite, un reclus, un homme qui a tourné le dos au reste de l’humanité. C’est pourtant tout l’inverse. Le peintre et auteur de bandes dessinées Jean-Marc Rochette a beau vivre en altitude, au cœur des Alpes, il reste attentif aux soubresauts du monde moderne, qui s’agite en bas de la montagne.

C’est le sentiment que donne La Chair du monde, le livre-entretien du journaliste Adrien Rivierre, paru jeudi 13 mars aux éditions Allary. Le fondateur du média en ligne Résonances – qui parle bifurcation écologique avec des artistes – a choisi de rencontrer l’auteur du Transperceneige, quitte à donner de sa personne. Il l’a rejoint chez lui en octobre 2023, au pied d’une montagne aussi belle qu’impitoyable (quelques mois plus tard, une crue torrentielle détruira intégralement le village voisin de La Bérarde).
«Cicatrices du temps»
Un environnement singulier qui est au cœur de la pensée écologique de Jean-Marc Rochette. Selon lui, les humains ne sont pas faits pour vivre en ville — un univers de béton que le peintre qualifie non sans malice de «nature morte». À l’inverse, il prône un mode de vie plus proche de la nature, en harmonie avec «la magie du monde vivant» et «en périphérie du système capitaliste tout-puissant».
Au rythme des questions ciselées d’Adrien Rivierre, Jean-Marc Rochette convoque celles et ceux qui l’inspirent. Des peintres, bien sûr : Soutine, Cézanne, Rembrandt. Des chercheur·ses : Nastassja Martin, Philippe Descola, Baptiste Morizot. Et des écrivains de science-fiction : Cormac McCarthy, Philip K. Dick. Les références culturelles fusent et s’enchaînent – des notes de l’auteur, regroupées en fin d’ouvrage, explicitent les concepts et idées, comme autant de clés de compréhension.
Après plusieurs jours au pied des montagnes – ces «cicatrices du temps», dit Rochette –, Adrien Rivierre s’approche peu à peu de la pensée profonde de son hôte. Et il embarque les lecteur·ices avec lui. Elon Musk, Jeff Bezos, l’autoroute A69, les mégabassines de Sainte-Soline ou le projet The Line en Arabie Saoudite : les thèmes abordés sont riches et variés. On sort de cette lecture avec beaucoup de questions, l’envie de creuser, de pousser la réflexion encore plus loin : et c’est tant mieux.
«La Chair du monde», d’Adrien Rivierre, Allary éditions, mars 2025, 192 pages, 20,90 euros.
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