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Jachères, rotations des cultures et prairies : la politique agricole commune européenne revient dix ans en arrière

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À la bourre. Le 24 avril dernier, le Par­lement européen a voté à toute vitesse une nou­velle réforme de sa poli­tique agri­cole com­mune (PAC) qui signe un net recul sur le plan écologique.

Pour répon­dre à la récente crise agri­cole, la Com­mis­sion européenne a pro­posé dès la mi-mars d’alléger plusieurs règle­men­ta­tions envi­ron­nemen­tales. «Une ini­tia­tive con­duite en cati­mi­ni après con­sul­ta­tion de qua­tre syn­di­cats agri­coles, Copa-Coge­ca en tête», com­mente Faus­tine Bas-Des­fos­sez du Bureau européen de l’environnement — une fédéra­tion qui réu­nit 180 ONG européennes.

Jusqu’à présent, pour touch­er les aides de la PAC, les agriculteur·ices devaient respecter neuf «bonnes con­di­tions agri­coles et envi­ron­nemen­tales» (BCAE). Celles-ci por­tent sur le main­tien des prairies per­ma­nentes, des zones humides et des tour­bières ; l’interdiction de brûler les chaumes ; la créa­tion de ban­des tam­pons le long des cours d’eau ; la ges­tion du tra­vail des sols pour en lim­iter l’éro­sion et leur cou­ver­ture pen­dant les péri­odes sen­si­bles (automne-hiv­er) ; la rota­tion des cul­tures, les jachères et le main­tien des haies et des arbres dans les champs.

Le 24 avril, les eurodéputé·es ont voté (avec 425 votes pour, 130 con­tre et 33 absten­tions) l’assouplissement de qua­tre BCAE. L’obligation de laiss­er 4% des ter­res arables en jachère est sup­primée, de même que celle de pra­ti­quer la rota­tion des cul­tures (cul­tiv­er dif­férentes plantes sur le même ter­rain pour éviter l’érosion des sols et dimin­uer l’usage des pes­ti­cides). Les prairies per­ma­nentes pour­ront être plus facile­ment «retournées» pour devenir des cul­tures. Les petites exploita­tions (celles de moins de dix hectares, qui représen­tent les trois quarts des struc­tures agri­coles de l’UE) ne seront plus visées par les con­trôles et sanc­tions pour non-respect des BCAE.

«Avec cette réforme, on revient un peu à la PAC de 2013, analyse Faus­tine Bas-Des­fos­sez. Et il n’y a eu aucune étude d’impact pour éval­uer les effets de ces assou­plisse­ments. À quelques semaines des élec­tions européennes, ce coup d’arrêt bru­tal au verdisse­ment de la PAC est un très mau­vais sig­nal pour la pro­tec­tion de l’environnement».

Avec plus de 58 mil­liards d’euros par an, la PAC représente le prin­ci­pal poste de dépense de l’Union européenne (UE). Une gigan­tesque enveloppe finan­cière dis­tribuée sous forme de sub­ven­tions aux agriculteur·ices des 27 États-mem­bres. La France, pre­mière agri­cul­ture du con­ti­nent, en est la prin­ci­pale béné­fi­ci­aire (9,5 mil­liards annuels).

Pho­to : Chris Ensminger/Unsplash