Décryptage

Européennes : que proposent les candidats pour répondre aux défis de l’agriculture ?

Champ des possibles. Vert a décrypté les programmes des partis français en lice pour le scrutin du 9 juin 2024 en matière d’agriculture. Quelles sont leurs propositions sur la politique agricole commune, le protectionnisme, les revenus du secteur et les pesticides ?
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Dans ce premier scrutin qui succède à la crise du monde agricole, les principales listes – Rassemblement national (RN), Renaissance, Parti socialiste-Place publique (PS-PP), France insoumise (LFI), Les Républicains (LR) et Les Écologistes – ont mis l’agriculture au cœur de leur programme.

Que faire du magot de la PAC ?

Avec plus de 58 milliards d’euros par an, la politique agricole commune (PAC) représente le principal poste de dépense de l’Union européenne (UE). La France, première agriculture du continent, en est la principale bénéficiaire (9,5 milliards d’euros annuels).

Qu’il souhaite la simplifier ou carrément la réformer, chaque parti a sa «solution» pour que la PAC fonctionne mieux et contente les agriculteur·ices. Le RN, LR et Renaissance appellent à rendre «plus simple» ce système de subventions ; le RN veut y ajouter des aides françaises ; dans leur majorité, les partis visent une augmentation du budget de la PAC.

Pour Renaissance, le PS-Place publique, LFI et les Écologistes, une réforme des critères d’attribution des aides agricoles s’impose : afin de mieux aider les petits producteurs, il faut prendre en compte la main-d’œuvre et plus seulement la surface des exploitations pour décider du montant des aides. LFI réclame aussi un fléchage de l’argent pour favoriser l’agriculture bio et restructurer les filières de productions légumineuses et végétales.

Des clauses miroirs pour une agriculture plus belle ?

À l’heure où les États-Unis et la Chine renforcent leurs mesures protectionnistes et où l’afflux de produits ukrainiens sur le marché commun est largement dénoncé, la protection des agriculteur·ices européen·nes contre la concurrence déloyale fait l’unanimité. Les différences concernent le niveau de protection désiré.

Renaissance souhaite évaluer les traités de libre-échange au cas par cas : la liste macroniste estime que certains sont bénéfiques, comme celui sur le lithium avec le Chili et d’autres non, comme celui avec le Mercosur, le marché sud-américain. LFI est opposé à l’ensemble des traités de libre-échange. Tous réclament l’instauration de clauses dites «miroirs», ou de réciprocité : celles-ci permettraient d’imposer aux pays qui veulent exporter leurs produits vers Europe de respecter les mêmes règles et normes que celles qui s’appliquent aux producteurs européens.

À Bruxelles, pendant les manifestations des agriculteur·ices à l’hiver 2023. © Benoit Doppagne/AFP

Comment assurer le gagne-pain des agriculteurs ?

Assurer un revenu digne aux professionnel·les du monde agricole ; c’était l’une des revendications phares des agriculteurs en colère. Comment les partis comptent-ils y répondre ?

Renaissance et les Écologistes proposent de mettre sur pied un «Egalim» européen, du nom de la loi française qui, depuis 2018, est censée protéger les exploitants agricoles dans les rapports de force qui les opposent à la grande distribution et aux industriels de l’agroalimentaire sur les prix de vente. Le RN propose de renforcer la loi Egalim en France.

Autre mesure clé dans ce dossier de la rémunération : instaurer des prix planchers pour garantir aux agriculteur·ices un prix de vente minimum de leurs produits. Les listes RN, PS-PP, LFI et les Écologistes le préconisent.

Pesticides, un peu, beaucoup… à la folie ?

PS-Place publique, LFI et les Écologistes proposent de réduire drastiquement le recours aux pesticides. Les Insoumis proposent de bannir le glyphosate – l’herbicide cancérigène dont la commercialisation au sein de l’UE a été réautorisée pour dix ans à l’automne 2023 – et l’exportation de pesticides dangereux à partir de l’Europe. Si Renaissance souligne la nécessité de réduire l’usage de ces produits, le parti présidentiel mise moins sur les interdictions que sur l’innovation pour trouver des alternatives. Une position partagée par LR qui veut consacrer à cette recherche une part du budget de la PAC. Du côté du RN, défenseur d’une agriculture «qui produit», silence radio sur le sujet.

Et les animaux dans tout ça ?

C’est certainement sur la question du bien-être animal que les lignes de démarcation sont les plus nettes. Si LFI souhaite interdire l’élevage en cage et améliorer les conditions de transport des animaux, les Écologistes défendent une approche globale. Renaissance souhaite que les animaux en provenance de pays tiers respectent les règles de l’UE en la matière. La question n’est tout simplement pas abordée par LR ni le RN. C’est bête.