Reportage

En lutte contre l’A69, le militant Thomas Brail s’est perché dans un arbre en face du ministère de l’écologie

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Bon­net de pla­tane. En grève de la faim depuis main­tenant deux semaines, Thomas Brail a investi un pla­tane du boule­vard Saint-Ger­main de Paris, exigeant d’être reçu par l’exécutif pour deman­der la sus­pen­sion du chantier de l’autoroute A69 entre Cas­tres et Toulouse.

«Tant qu’on n’aura pas une dis­cus­sion avec le min­istre, on reste dans l’arbre», jure Thomas Brail auprès de Vert, jeu­di matin. Quelques heures plus tôt, le fon­da­teur du GNSA (Groupe nation­al de sur­veil­lance des arbres) s’est hissé à l’aide de cordes dans cet arbre en com­pag­nie de deux autres mem­bres du groupe qui assurent sa sécu­rité. Qua­tre mètres plus bas, les passant·es dégainent leur télé­phone pour pho­togra­phi­er la scène inhab­ituelle, con­tour­nant les rubalis­es instal­lées par les forces de l’ordre pour empêch­er les regroupe­ments.

Thomas Brail per­ché à qua­tre mètres de hau­teur devant le min­istère de l’é­colo­gie, jeu­di 14 sep­tem­bre. © Alexan­dre Carré/Vert

Des mem­bres du GNSA sont tout de même autorisés à rav­i­tailler les trois grimpeurs qui patien­tent en obser­vant le bal­let des voitures parisi­ennes. Les traits tirés et la voix fatiguée, Thomas Brail con­fie que ce mode d’action est le dernier moyen qu’il ait trou­vé pour inter­peller le gou­verne­ment. «Je suis désolé d’en arriv­er jusque-là, mais je n’ai pas le choix», déclare-t-il, déter­miné.

Le 1er sep­tem­bre, il a entamé une grève de la faim pour réclamer l’arrêt du chantier de l’autoroute A69, qui a néces­sité l’abattage de plusieurs arbres cen­te­naires sur son tracé. Ce lun­di, il s’était per­ché en face du con­seil région­al d’Oc­c­i­tanie, à Toulouse, pour inter­peller la prési­dente social­iste de la région, Car­ole Del­ga, ain­si que Clé­ment Beaune, min­istre délégué chargé des trans­ports. Sans suc­cès. En deux semaines, une dizaine de per­son­nes l’ont rejoint dans sa grève de la faim.

La con­struc­tion de l’A69 est un pro­jet vieux de 30 ans, mené par la société Atosca, qui prévoit l’artificialisation de 550 hectares de ter­res, dont 25 hectares de zones humides et 400 hectares de ter­res agri­coles. Il frag­mentera le ter­ri­toire et con­damn­era des cor­ri­dors écologiques, des écosys­tèmes et des espèces pro­tégées.

«Il y a trois recours en cours, mais les travaux se pour­suiv­ent mal­gré tout, déplore Thomas Brail. Si on ne fait rien, les travaux peu­vent se ter­min­er avant les juge­ments. Peu importe s’ils sont favor­ables ou non.» Pour le mil­i­tant, «les autorités fer­ment les yeux sur la pour­suite des travaux pen­dant l’évaluation» lorsqu’il s’agit de recours envi­ron­nemen­taux. En 2021 déjà, les pro­mo­teurs du Grand con­tourne­ment ouest (GCO) de Stras­bourg avaient con­stru­it un tronçon routi­er sans atten­dre le juge­ment défini­tif.

Plusieurs pro­jets alter­nat­ifs à l’autoroute ont été soumis par les asso­ci­a­tions écol­o­gistes comme France nature envi­ron­nement, les Amis de la Terre, la Con­fédéra­tion paysanne et La voie est libre. Notam­ment le pro­jet bap­tisé «Une Autre Voie», mené bénév­ole­ment par le paysag­iste urban­iste Karim Lahi­ani.

En 2022, Thomas Brail s’était déjà sus­pendu à un pla­tane au pied de la Tour Eif­fel pour s’opposer à l’abattage de plusieurs d’entre eux. Trois ans plus tôt, il s’était déjà per­ché devant le min­istère de la tran­si­tion écologique pour s’opposer à la coupe de 25 pla­tanes dans le Gers.

Dans son dernier rap­port, le Groupe d’experts inter­gou­verne­men­tal sur l’évolution du cli­mat pré­cise que les arbres jouent un rôle cru­cial dans la réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre. Planter des arbres au bon endroit est aus­si une solu­tion naturelle, pré­cieuse et peu coû­teuse, pour réduire les effets de la chaleur.