2024 a été l’année la plus chaude jamais mesurée à l’échelle planétaire, mais ce signal d’alarme n’a pas suffi à convaincre les banques d’arrêter de financer les énergies fossiles (pétrole, charbon et gaz), responsables à plus de 75% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Entre 2023 et 2024, deux tiers des 65 plus grandes banques mondiales ont augmenté leurs financements des énergies fossiles, dévoile le 16ème rapport Banking on climate chaos, publié ce mardi. Mise sur pied par huit organisations internationales (dont la française Reclaim finance), cette analyse recense chaque année les financements des plus grands établissements bancaires accordés aux producteurs d’hydrocarbures.
Au total, ces 65 banques ont accordé quelque 869 milliards de dollars (752 milliards d’euros) au secteur en 2024, soit 23% de plus que l’année précédente. Un inquiétant rebond que l’on doit à une baisse des taux d’intérêts en 2024 (qui diminue le coût des emprunts) et à «un contexte général propice au désengagement climatique», décrypte l’ONG Reclaim finance.
Près de la moitié de ces financements (429 milliards de dollars ou 371 milliards d’euros) étaient destinés à l’expansion des énergies fossiles (exploration de champs, développement de nouveaux projets d’extraction, etc.). D’après l’Agence internationale de l’énergie, il faudrait pourtant renoncer à tout nouveau projet pétrogazier pour espérer limiter le réchauffement du climat à +1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle – c’est l’objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris sur le climat de 2015, qui éviterait au monde les pires impacts du changement climatique.
De mauvais élèves français
Si les grandes banques américaines (JP Morgan Chase, Bank of America, etc.) dominent largement ce classement, certains établissements français ne sont pas en reste. La BNP Paribas, le Crédit agricole et la Société générale se trouvent dans le top 30, avec la Banque populaire Caisse d’épargne (BPCE) à la 31ème place. Les quatre banques ont financé le secteur fossile à hauteur de 50 milliards de dollars (43 milliards d’euros) en 2024, dont plus de 20 milliards (17 milliards d’euros) pour l’expansion.

Les deux autres banques tricolores recensées, le Crédit mutuel et la Banque postale, font office de bonnes élèves puisqu’elles se retrouvent tout en bas du classement (aux places 63 et 64 sur 65), avec respectivement 53 millions et 37 millions de dollars (46 et 32 millions d’euros) accordés au secteur l’année dernière.
Si la BPCE n’est pas au premier rang des banques françaises financeuses, sa dynamique est particulièrement inquiétante, relève Reclaim finance. Elle est la seule à avoir augmenté ses financements à l’expansion fossile au cours des dernières années, à rebours de toutes les recommandations scientifiques. «Le groupe Banque Populaire Caisse d’Épargne persiste à tourner le dos à la science et au climat, aggravant son retard sur les autres banques françaises, remarque Lucie Pinson, fondatrice et directrice de l’ONG. Alors que certaines de ses concurrentes ont amorcé une baisse de leurs financements aux entreprises développant de nouveaux champs pétroliers et gaziers, BPCE fait le choix inverse.»
«Chaque dollar que les banques consacrent à la production et à la distribution des énergies fossiles contribue à amplifier le chaos climatique», rappelle le rapport. Les ONG appellent à la fin immédiate du développement des énergies fossiles et à la sortie progressive du secteur à travers la mise en œuvre de plans rigoureux de transition.