Les trois associations qui avaient mis en demeure la banque en octobre ont décidé de poursuivre la procédure au tribunal pour lui faire cesser ses investissements dans les énergies fossiles.
«La banque d’un monde qui change». Hélas pour le monde, la BNP Paribas a accordé plus de 140 milliards de dollars (133Mds€) à des entreprises engagées dans l’industrie entre 2016 et 2021, selon l’édition 2022 du rapport Banking on climate chaos piloté par une dizaine d’ONG.
Pour rendre ses investissements compatibles avec l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle, trois associations avaiten mis en demeure le groupe, en octobre dernier, de cesser d’investir dans les énergies fossiles (notre article). Face à une réponse qu’elles ont jugé insuffisante, les Amis de la Terre France, Notre affaire à tous et Oxfam France ont décidé d’assigner la BNP Paribas au tribunal, ce jeudi.
Des annonces trompeuses pour le public
«À l’horizon 2030, BNP Paribas aura accompli à plus de 80% la transition de ses activités de financement à la production d’énergie vers le bas-carbone», annonçait le groupe bancaire en janvier dernier, quelques jours avant la fin de l’instruction. «Une réponse qui tombe à côté», pour les associations qui ont décortiqué l’annonce. Selon elles, la banque ne se concentre que sur les prêts et laisse de côté les investissements sur les marchés financiers. Elle fixe également des seuils très larges pour choisir les entreprises qu’elle finance. Parmi les critères, un groupe sera par exemple exclu des possibilités de crédits si son activité est liée à plus de 10% au pétrole et au gaz en Arctique. Dès lors, BNP Paribas continue de prêter à de grands groupes dont les activités sont diversifiées et fait toujours partie des principaux financeurs de l’exploitation pétro-gazière en Arctique.
«Ces annonces sont une manière de tromper le public», explique à Vert Justine Ripoll, de Notre affaire à tous. «BNP joue sur le fait que la traduction de ses mesures reste compliquée pour les clients ou employés.» Pour déconstruire ce greenwashing, les associations se fondent sur le devoir de vigilance, inscrit dans la loi française en 2017, suite à l’effondrement des usines textiles du Rana Plaza au Bangladesh. Cette disposition engage les grandes entreprises à prévenir les atteintes graves aux droits humains, aux libertés fondamentales, à la santé, à la sécurité des personnes, et à l’environnement qui pourraient naître de leurs activités. Ce jeudi matin, un huissier a remis l’assignation au siège de BNP Paribas. Les associations s’attendent à une procédure de plusieurs années.
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