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À l’origine des pénuries d’essence, une grève des raffineries pour réclamer une meilleure répartition des profits des pétroliers

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Pom­pes à décence. Les inter­minables files de voitures et les images de conducteur·rices excédé·es dans des sta­tions ser­vices qui inon­dent les JT depuis plusieurs jours ont deux caus­es prin­ci­pales : les ris­tournes à la pompe et un mou­ve­ment social dans les raf­finer­ies des géants du pét­role.

D’après le gou­verne­ment, env­i­ron 15 % des sta­tions ser­vice français­es con­nais­sent actuelle­ment des dif­fi­cultés d’approvisionnement en essence, entraî­nant la fer­me­ture de cer­taines pom­pes et de longues files d’attente pour les auto­mo­bilistes. La majorité des sta­tions en ques­tion appar­ti­en­nent à Total­En­er­gies.

Dans les Hauts-de-France, la région la plus touchée par ces ten­sions logis­tiques, 30 % des sta­tions sont dans une sit­u­a­tion déli­cate. Les pré­fec­tures du Nord et du Pas-de-Calais ont notam­ment inter­dit la vente de car­bu­rants « dans des récip­i­ents trans­porta­bles manuelle­ment » (bidons, jer­ri­cans) depuis mer­cre­di et appelé au « civisme et à la respon­s­abil­ité de cha­cun ». L’accès à cer­taines sta­tions encore appro­vi­sion­nées en essence est réservé en pri­or­ité aux véhicules d’urgence (ambu­lances, gen­darmes, sapeur-pom­piers).

Un gréviste de la raf­finer­ie d’Exxonmobil à Port-Jérôme-sur-Seine (Seine-Mar­itime), mer­cre­di. © Lou Benoist / AFP

Par­mi les caus­es de cette sit­u­a­tion : un mou­ve­ment social paral­yse les raf­finer­ies Total du Havre (Seine-Mar­itime), de Dunkerque (Nord) et de Feyzin (Rhône) depuis le 27 sep­tem­bre. Deux raf­finer­ies Exxon­Mo­bil, en Seine-Mar­itime et dans les Bouch­es-du-Rhône, sont aus­si con­cernées par la grève. Les syn­di­cats récla­ment une reval­ori­sa­tion des salaires de 10%. « 7% liés à l’inflation, et 3% liés à une pro­gres­sion de pou­voir d’achat et au partage des richess­es par rap­port aux résul­tats mirobolants de Total », a détail­lé Thier­ry Defresne, secré­taire (CGT) du comité d’entreprise européen du groupe, au micro de RMC ce ven­dre­di matin. Le syn­di­cal­iste ajoute : « Il y a un prob­lème de partage des richess­es chez Total ». La semaine dernière, le pétroli­er annonçait le verse­ment d’un div­i­dende excep­tion­nel de 2,62 mil­liards d’euros à ses action­naires, au cœur d’une crise énergé­tique qui a fait bondir ses béné­fices nets.

Une grève « vouée à s’ancrer dans le temps »

Autre élé­ment aggra­vant, les ris­tournes sur l’essence pro­posées par Total­En­er­gies qui stim­u­lent l’affluence dans ces sta­tions. Au 31 octo­bre, la remise de 20 cen­times d’euros par litre d’essence (qui vient s’ajouter aux 30 cen­times du gou­verne­ment) dimin­uera de moitié, faisant de nou­veau grimper les prix à la pompe pour les auto­mo­bilistes.

« On n’est pas dans quelque chose qui relève de la pénurie. […] On est dans des dif­fi­cultés tem­po­raires de dis­tri­b­u­tion, liées à un mou­ve­ment social », a martelé le porte-parole du gou­verne­ment, Olivi­er Véran, invité par BFMTV ven­dre­di matin. « Atten­tion à l’effet panique », a‑t-il aver­ti. Des appro­vi­sion­nements sup­plé­men­taires venant de Bel­gique sont prévus, a aus­si pré­cisé la min­istre de la tran­si­tion énergé­tique, Agnès Pan­nier-Runach­er, jeu­di soir, assur­ant que la sit­u­a­tion s’arrangerait dans les prochains jours. Thier­ry Defresne, qui déplore un manque total de com­mu­ni­ca­tion avec la direc­tion de Total­En­er­gies, con­sid­ère de son côté que la grève est « vouée à s’ancrer dans le temps ».