Chères toutes et chers tous,
Vous êtes en manque de sensations fortes ? Alors suivez le direct de notre journaliste Justine Prados, qui raconte sur Twitter le Climate finance day, raout de la finance dédié à la transition, perturbé dès le matin par les activistes d'Alternatiba et des Amis de la Terre, comme vous le verrez plus bas dans ce numéro.
Nucléaire ou renouvelables ? A petits pas ou de façon radicale ? Gare à l'électrocution quand on parle de transitions.

Futurs énergétiques de RTE : la France à l'heure des choix
Réseau pas réseau. Le gestionnaire du réseau électrique français RTE a examiné six façons de se passer des énergies fossiles, dont la France dépend encore à 60%.
Commandés il y a deux ans par le gouvernement, les « Futurs énergétiques 2050 » présentés lundi par RTE étaient aussi très attendus par l'ensemble de la classe politique en pleine campagne présidentielle. « Ces scénarios renvoient à des choix de société, c'est au politique de choisir », a en effet expliqué à la presse Xavier Piechaczyk, le président du Directoire. Le secteur de l'énergie représente à lui seul 70% des émissions de gaz à effet de serre du pays.
La décarbonation du système devra passer par une baisse sensible de la consommation et une électrification des usages qui reposent aujourd'hui sur les énergies fossiles : passage à la voiture électrique et remplacement des chauffages au gaz et fioul par des pompes à chaleur, par exemple. La consommation globale d'énergie devrait chuter de 35% et la facture d'importation d'énergie fossile – qui varie entre 30 et 70 milliards d'euros chaque année – tombera à zéro. En revanche, la consommation d'électricité augmentera, de 16 à 60%, selon les hypothèses. RTE a examiné plus précisément la piste médiane qui prévoit une hausse de 35%. A partir de là, le gestionnaire a élaboré six scénarios qui vont du 100% renouvelable à une répartition 50/50 avec le nucléaire.
C'est là que les choses se corsent car il s'agit de décider du mix électrique des prochaines générations. « La majorité des sources de production qui alimenteront la France en 2050 n’existent pas aujourd’hui », a rappelé Xavier Piechaczyk. La plupart des centrales nucléaires actuelles fermeront au cours de la décennie 2040. RTE a déjà prouvé, dans une étude décryptée par Vert, qu'un mix 100% renouvelable est possible. Toutefois, ce ne serait pas le choix le plus économique, comparé à la relance d'un programme nucléaire qui pourrait représenter entre 25 et 50% du mix, mais qui nécessiterait de construire entre 8 et 14 nouveaux réacteurs EPR.
« Se passer de nouveaux réacteurs implique des rythmes de développement des énergies renouvelables plus rapides que ceux des pays européens les plus dynamiques », constate aussi l'étude. Dans tous les cas, les renouvelables devront représenter au minimum 50% du mix électrique, ce qui implique de tripler le parc éolien terrestre ou de multiplier par six le parc photovoltaïque.
Les écologistes regrettent que le scénario le plus économe en énergie n'ait pas été présenté - il ne sera examiné qu’en 2022 - car les conclusions seraient sans doute différentes. La semaine dernière, négaWatt avait démontré que l'atteinte du 100% renouvelable était possible à condition de miser beaucoup plus sur la sobriété.

· Lundi, la communauté de communes de Grand Lieu a annoncé la fin des discussions sur le projet de centre logistique porté par Amazon. Le géant du commerce en ligne prévoyait de construire une plateforme de 185 000 mètres carrés sur une ancienne friche hospitalière. Depuis l'automne 2020, les associations du collectif Stop Amazon 44 se battaient contre ce projet jugé nuisible au tissu local et anti-écologique. - France 3
· Ce mardi, le gouvernement australien a annoncé qu'il viserait la neutralité carbone en 2050 (ABC news) – c'est-à-dire qu'à cette date, les dernières émissions de CO2 devront être compensées. Mais le premier ministre Scott Morrison s'est refusé à inscrire cet objectif dans la loi et compte essentiellement sur l'achat de droits à polluer pour y parvenir. Parmi les premiers producteurs de charbon au monde, l'Australie fait toujours figure de cancre mondial du climat, comme Vert l'avait raconté. Quelques jours plus tôt, samedi, l'Arabie Saoudite annonçait « zéro émission nette » pour 2060.
· Mardi matin, une quinzaine d'activistes d'Alternatiba et des Amis de la Terre ont interrompu le discours prononcé par le ministre de l'économie Bruno Le Maire lors du Climate finance day : un événement parisien dédié à la transition écologique de la finance. Recouvert·e·s de mélasse, et au son strident d'alarmes, les militant·e·s ont exigé de plus forts engagements du gouvernement pour pousser les banques à se désinvestir des énergies fossiles. Plus d'informations demain dans Vert.


413 ppm
Pandémie ou pas, la concentration de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère a atteint un nouveau record : en 2020, elle s'est établie à 413,2 parties par million (ppm) en moyenne annuelle, a annoncé l'Organisation météorologique mondiale (OMM) ce lundi. « Le ralentissement de l’économie imposé par la COVID-19 n’a pas eu d’incidence perceptible sur le niveau et la progression des gaz à effet de serre dans l’atmosphère » malgré une hausse moins rapide que les années précédentes, indique l'OMM. Il y a désormais 149% de plus de CO2 dans l'atmosphère qu'à l'ère préindustrielle (milieu des années 1800) où ce chiffre se montait à 278 ppm. « La dernière fois qu’une teneur en CO2 comparable existait sur Terre, c’était il y a 3 à 5 millions d’années : la température était alors de 2 à 3 °C plus élevée qu’aujourd’hui et le niveau de la mer excédait de 10 à 20 mètres le niveau actuel », a alerté Petteri Taalas, secrétaire général de l'OMM.

Le Conseil d'Etat suspend (à nouveau) certaines chasses traditionnelles d'oiseaux
Qui part à la chasse... Pour la deuxième fois en trois mois, le Conseil d'Etat a annulé les arrêtés ministériels qui autorisaient certaines méthodes traditionnelles de chasse des oiseaux.
Bis repetita. En août, la plus haute juridiction administrative avait déjà annulé les textes qui permettaient la chasse des vanneaux huppés, pluviers dorés, grives et merles noirs à l’aide de tenderies (filets) et celle d'alouettes des champs à l’aide de pantes (filets) et de matoles (cages). Saisi par la Ligue de protection des oiseaux et One Voice, le Conseil d'Etat avait jugé que les arrêtés fixés par le ministère de la transition écologique ne respectaient pas la directive européenne « Oiseaux » de 2009, qui interdit les techniques de captures massives et non-sélectives.
La Fédération nationale des chasseurs (FNC) avait alors trouvé « insupportable » la décision du Conseil d’Etat, dénonçant « un acharnement sans précédent ». Qu'à cela ne tienne, le 12 octobre, le gouvernement a promulgué des arrêtés quasiment identiques. Arguant, cette fois-ci, que les versions précédentes « ne permettaient pas au Conseil d’Etat de considérer que le ministère avait apporté les motivations nécessaires sur l’absence de solution alternative, la sélectivité, l’usage judicieux et les faibles quantités ».
Celui-ci n'aura pas été convaincu. Saisi en référé-liberté (une procédure d'urgence) par les deux mêmes associations, le Conseil d'Etat a une nouvelle fois cassé les arrêtés concernés. « Les nouvelles autorisations étant prises sur la base de cette même réglementation [la directive « Oiseaux » - Ndlr], le juge des référés estime qu’il existe un doute sérieux quant à leur légalité », indiquent les juges dans un communiqué.
Après cette première décision rendue en urgence, le Conseil d’État statuera « au fond » sur les recours contre les arrêtés « dans les prochains mois ». Tout en déplorant « la faiblesse du gouvernement face au lobby cynégétique », la LPO a salué « une grande et belle victoire pour la biodiversité ».

Quand l'énergie devient un produit de luxe
Or noir. Les prix du gaz et du pétrole s'envolent, à tel point que les hydrocarbures s'échangent désormais comme des produits de luxe. C'est le scénario - à peine fictif - imaginé par le pastiche d'actualité Broute dans son dernier épisode.

+ Anne-Claire Poirier et Justine Prados ont contribué à ce numéro