La quotidienne

Relances à incendie

Un numéro où l'on verra que tricher avec la planète ne sert qu'à faire grimper le thermomètre.


Le Conseil d’État pourrait contraindre le gouvernement à revoir sa politique climatique

Conseil d'ami. Vendredi, la plus haute cour administrative a statué sur l'action du gouvernement en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Le rapporteur public n'a pas été convaincu par les mesures présentées.

Sur le climat « personne n'a fait autant que nous depuis trois ans », expliquait en décembre dernier le président de la République à nos confrères de Brut. Certes, mais cela ne suffit pas, lui a répondu en substance le rapporteur public du Conseil d’État, Stéphane Hoynck. L'audience de vendredi opposait l’État à la commune de Grande-Synthe, rejointe par Grenoble, Paris et les associations de l’Affaire du siècle. Ces dernières reprochent au gouvernement son inaction climatique. Juridiquement parlant, la France serait sur le point de manquer un objectif contraignant, gravé dans la Stratégie nationale bas-carbone : celui de réduire de 40% ses émissions de CO2 entre 1990 et 2030.

Une pancarte aperçue lors de la marche pour le climat, à Paris, le 9 mai 2021 © Jeanne Menjoulet

En novembre 2020, le Conseil d’État avait donné trois mois au gouvernement pour donner des preuves de son action dans la lutte contre le réchauffement climatique (

• Depuis vendredi, la Corse est menacée par une marée noire suite au dégazage illégal d’un navire. Certains marins ont en effet pour pratique de relarguer en mer les produits toxiques issus du nettoyage des cuves pour éviter d’avoir à payer ce service au port. Les deux nappes d’hydrocarbures d’environ 35 kilomètres de long ont été repérées lors d’un exercice militaire aérien. Elles dérivent désormais à une dizaine de kilomètres au sud-est de l’île et des galettes ont commencé à s’échouer sur les plages. Le parquet de Marseille a ouvert une enquête pour retrouver les coupables. - Le Monde (AFP)

• Ce weekend, les dirigeant·e·s du G7 se sont engagé·e·s à réduire collectivement de moitié leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Sans toutefois détailler les moyens d’y parvenir. Il y a deux semaines, elles et ils avaient déjà promis de supprimer les aides publiques au charbon dès cette année (Vert) et indiqué leur souhait de contraindre les multinationales à dévoiler leur impact climatique (Vert). Greenpeace France estime toutefois que les leaders ont « échoué à accélérer leur sortie des énergies fossiles, pourtant indispensable pour donner corps à l’accord de Paris ». - Greenpeace

• Dimanche, les Suisses ont rejeté à 61% deux initiatives populaires anti-pesticides. La première votation portait sur l’interdiction des pesticides de synthèse, la deuxième prévoyait que les subventions aux agriculteur·rice·s soient versées uniquement aux exploitations qui n'utilisent pas de pesticides, bannissent l'utilisation préventive ou régulière d'antibiotiques et sont en mesure de nourrir leurs animaux avec le fourrage qu'elles produisent elles-mêmes. « La population a dit non mais la thématique l’a touchée » se félicite malgré tout le quotidien national Le Temps.

Les pays de l'Union européenne manquent l'occasion d'une relance verte

Relances à incendies. Les États européens font passer pour « verts » des plans de relance qui ne le sont pas et s'apprêtent à manquer collectivement les objectifs qu'ils se sont fixés, révèle le site Green Recovery Tracker.

En mai 2020, alors que la pandémie de Covid-19 mettait à genoux des pans entiers de l'économie mondiale, les dirigeant·e·s des 27 ont promis d'utiliser les fonds de secours pour relancer l’Europe sur des bases plus vertes. L’enveloppe de 750 milliards d'euros dédiée au sauvetage de l’économie européenne fut ainsi conditionnée au fléchage d’au moins 37 % des investissements nationaux vers des projets liés à la transition écologique. Un an plus tard, 23 des 27 plans nationaux sont arrivés sur le bureau de la Commission européenne. Et pour l'instant, l'auto-satisfecit général ne résiste pas à l'analyse des experts du site Green Recovery Tracker.

L'examen détaillé de 15 d'entre eux révèle que la plupart ne respectent pas l'objectif des 37% d'investissements verts. Seule la Finlande y parvient avec un taux de 42% contre 13% pour l'Italie. La France fait partie des mauvais·es élèves avec son plan France Relance de 100 milliards d'euros présenté en septembre 2020. 23% des financements sont destinés à la transition écologique, mais 22% sont identifiés comme négatifs pour le climat et 32% impossibles à déterminer.

Le Green Recovery Tracker souligne en outre qu'« il y a un risque significatif que des mesures qui ont l'air vertes à première vue finissent par bénéficier aux énergies fossiles ». Il prend l'exemple de programmes destinés à financer les économies d'énergies qui subventionnent le remplacement des chaudières au fioul par des équipements au gaz, en Italie, en Pologne ou en République Tchèque.

Au final, il estime qu'aucun des plans ne permettra d'atteindre les objectifs climatiques de l'Union européenne, d’une réduction de 55% des émissions de CO2 d’ici 2030 (Vert). Sauf si la Commission européenne fait preuve de fermeté dans l’examen des plans nationaux.

Carboniq rend l'empreinte carbone ludique

Jeu de maux. Une game-designeuse et deux experts du climat ont créé un jeu autour du concept d'empreinte carbone, qui permet de sensibiliser aux questions environnementales sans braquer.

Pour limiter le réchauffement climatique en deçà de 2°C d'ici la fin du siècle, il est nécessaire de limiter collectivement nos émissions de gaz à effet de serre à deux tonnes par personne et par an. Or pour l'instant, les Français·es affichent un bilan moyen de onze tonnes. 

C'est en partant de ce constat qu'Axelle Gay, Guillaume Pakula et Clément Reynaud ont donné naissance au jeu Carboniq. L'objectif est simple – en apparence – puisqu'il s'agit de diminuer son bilan carbone le plus possible dans le but de remporter une partie. Pour cela, il faut être capable d’estimer l’impact de ses actions puis d'arbitrer entre les unes et les autres. Mais attention, car vous n'êtes pas seul·e·s et les actions des un·e·s peuvent rejaillir sur les autres. Même les cadeaux peuvent être empoisonnés, et surtout carbonés.

© Carboniq

Tous les aspects de la vie sont couverts et les chiffres issus de données scientifiques. Pour l’instant, seules les actions individuelles sont concernées mais on espère qu’une extension sera très vite consacrée aux entreprises et aux lobbies ! Les trois associés ont lancé un financement participatif

La loi climat arrive au Sénat 

Après les députés, c’est au tour des sénateurs d’examiner, à partir d’aujourd'hui le projet de loi Climat et résilience. Ce texte est censé reprendre une large partie des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. De nombreuses voix ont déploré les lacunes de ce texte (Vert) mais les sénateurs, notamment écologistes, espèrent en rehausser l’ambition. Plus de 2 200 amendements ont été déposés, dont 400 par le groupe écologiste. Parmi les mesures structurantes figurent celles sur la responsabilité climatique des entreprises mais elles n’ont pas encore de place dans le projet de loi, comme l’explique Brut dans cette vidéo.

© Brut