Chères toutes et chers tous,
Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort, nous nous vîmes dix mille sur Instagram. Si ce n'est pas déjà fait, rejoignez-nous !
Pour les candidat·es qui voudraient bien nous sortir de l'ornière, nous avons concocté un programme 100% efficace, juste et vert.

Demandez le contre-programme !
En cette odieuse campagne qui continue de parler davantage d’immigration et de sécurité que des crises qui vont bouleverser nos existences, Vert propose de remettre le climat et la biodiversité à l’agenda.
Pour ce faire, nous avons sélectionné un ensemble de mesures politiques que nous voudrions voir figurer dans l’ensemble des programmes, de gauche comme de droite. Ces mesures ont en commun de pouvoir être rapidement mises en œuvre, d’avoir un fort potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre, d’être socialement justes et de préparer le terrain aux changements d’ampleur qu’exige la crise climatique.
Nous n’avons pas simplement fait la collection des idées qui nous semblaient les plus cool ou les plus vendeuses; nous avons interrogé des expert·es de tous genres, regardé les expériences similaires menées à l’étranger, et nous avons, à chaque fois, interrogé le bien-fondé et les limites des mesures avancées.
Il en ressort un contre-programme présidentiel, que vous verrez s’étoffer au fur et à mesure de la campagne.
Au menu
Est-ce le rôle d’un journal que de porter des mesures politiques ? À l’heure où d’autres médias nous inondent de fausses bonnes idées pleines de greenwashing (paires de Nike recyclées, avions « verts » et autres aspirateurs à CO2), qui nous font perdre un temps précieux ainsi que la compréhension de l’urgence, martelée rapport après rapport par les scientifiques du GIEC, il nous paraît essentiel de proposer des solutions à la hauteur de la crise. Et de permettre à nos lecteur·rices de s’y retrouver parmi les propositions faites par les candidat·es.
Sommes-nous militant·es pour un parti ? Certainement pas. Engagé·es pour faire entrer dans le débat des solutions qui permettront de réduire nos émissions en faisant changer la société ? Absolument.
Nous espérons que cette programmation vous plaira et vous donnera des idées. Bonnes lectures.

· Mardi, l'Allemagne a annoncé qu'elle suspendait l'autorisation de l’immense gazoduc Nord Stream 2 qui doit bientôt l'abreuver de gaz en provenance de Russie. Une conséquence de la reconnaissance par le Kremlin de l'indépendance des territoires séparatistes pro-russes ukrainiens, qui devrait aggraver la crise de l’énergie. Sa construction est achevée depuis l'automne dernier, mais sa mise en service était jusqu'ici suspendue en raison de blocages juridiques. - Le Figaro (AFP)
· En France, le patrimoine financier de 63 milliardaires émet autant de CO2 que la moitié la plus modeste de la population, révèlent les ONG Greenpeace et Oxfam dans une étude qui paraît aujourd’hui. Et encore, seule la fortune de 63 des 119 milliardaires que compte le pays a pu être analysée. Les deux organisations s'interrogent sur « l'ampleur de ces inégalités climatiques qui pose la question du partage de l'effort dans la transition écologique à accomplir » et préconisent « l'instauration urgente d'un impôt sur la fortune (ISF) climatique » (notre article sur le sujet), ainsi qu'une « taxation accrue des dividendes ».
· La semaine dernière, le climat n'a occupé que 2,6% du « volume rédactionnel » des télévisions, radios et journaux, selon la seconde édition du baromètre hebdomadaire UBM Onclusive commandé par les quatre ONG de l'Affaire du siècle - Oxfam, Notre affaire à tous, la Fondation pour la nature et l’Homme et Greenpeace. C'est encore moins que la semaine précédente (2,7%). Le 13 mars, les associations organisent une causerie sur le climat avec les aspirant·es à l’Elysée, un « débat du siècle » qui se tiendra sur la plateforme Twitch (notre article sur le sujet).


« Chaque année, c’est une surface équivalente à la capacité à nourrir une ville comme le Havre qui est perdue »
Terres brûlées. Dans son premier rapport paru lundi, l'association Terre de liens tire la sonnette d'alarme sur l'état des terres agricoles en France. Entre 50 000 et 60 000 hectares seraient artificialisés chaque année. Autres motifs d’inquiétude : la dégradation des sols, la concentration des terres qui favorise les grandes exploitations et le non-renouvellement des générations paysannes. Dans moins de dix ans, un quart des agriculteur·rices français·es auront pris leur retraite et plus de cinq millions d'hectares, soit près de 20 % de la surface agricole française, vont changer de main. Que vont devenir leurs terres ? L'association exhorte les candidat·es à l'élection présidentielle à s'engager pour écrire une « grande loi sur les terres agricoles ». Celle-ci devra permettre de préserver leur usage agricole, favoriser les pratiques vertueuses et aider à l'installation d'une nouvelle génération d’agriculteur·rices.

Et si le prochain président donnait de vrais droits au vivant ?
Venue d'Amérique latine, l'idée de donner des droits au vivant peine encore à s'établir pleinement en France. Voilà qui nous permettrait pourtant de décoloniser notre rapport à l’environnement et changer la manière dont on s’en (pré-)occupe. Tour d’horizon des outils juridiques à notre disposition.
En inscrivant dans la loi les intérêts de la nature, on lui reconnaît le droit d’exister pour ce qu’elle est, de se régénérer et de ne pas subir le pillage de ses ressources. Et l’on sort d’une justice qui tenter de réparer des dégâts déjà commis, pour protéger le vivant en amont.
Cette reconnaissance peut prendre des formes très différentes. Au niveau local, il est possible d’attribuer une personnalité juridique à un écosystème donné, qui devient alors un sujet de droit. C’est ainsi que les droits du fleuve Whanganui, en Nouvelle-Zélande, et du lac Érié, aux États-Unis, ont été légalement reconnus.
Ces initiatives sont généralement le fruit de luttes contre des projets jugés destructeurs : les communautés locales se mobilisent pour administrer et préserver leur environnement, explique à Vert Marine Calmet, juriste spécialisée dans les droits de la nature.

À l’échelle nationale, on peut sanctuariser les droits de la nature en les inscrivant dans la Constitution. C’est ce qu’ont fait l’Équateur en 2008, puis la Bolivie en 2010 et l’Ouganda en 2019. Concrètement, chaque citoyen·ne qui veut réagir à une violation des droits de la nature peut saisir le juge pour y mettre fin.
Depuis 2017, Stop Ecocide porte le combat pour reconnaître le crime d’écocide au niveau de la Cour pénale internationale (CPI). La fondation revendique la création d’un cinquième crime international, en plus du génocide et des crimes de guerre, d’agression ou contre l’humanité.
Pour Valérie Cabanes, juriste internationale et membre de Stop Ecocide, reconnaître ce crime revient à adopter une vision écosystémique : « menacer la sûreté de la planète, c’est menacer par extension celle de l’humanité ». Une perspective plus approfondie que le droit à l’environnement, qui considère souvent la nature comme une entité différente et extérieure à l’Homme.
En France, plusieurs candidat·es - de gauche - à la présidentielle se sont emparé·es de la question des droits de la nature. Le crime d’écocide est au programme d’Anne Hidalgo (PS), Yannick Jadot (EELV), Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Christiane Taubira. Les candidat·s socialiste, écologiste et insoumis prévoient également d’inscrire les droits du vivant dans la Constitution.
Retrouvez notre analyse en intégralité sur vert.eco

Micmac à Millau
Big Mac à tire-larigot. Nous sommes en 1999. En représailles de l'interdiction de l'importation de bœuf américain aux hormones en Europe, les États-Unis ont augmenté de 100 % la taxe sur les produits AOP français, comme le roquefort produit en Aveyron. Alors à Millau, juste à côté du Larzac déjà reconnu pour sa rébellion écologiste, des paysans expriment leur colère en démontant un restaurant McDonald’s en construction. Cet événement fondateur de la lutte contre la mondialisation est au cœur du documentaire « Micmac à Millau » diffusé sur France 3, qui revient avec beaucoup d'humour sur ce fait divers en faisant témoigner les acteurs de l'époque comme José Bové, qui s’en amusent encore.

+ Loup Espargilière et Justine Prados ont contribué à ce numéro