Edition spéciale

Il nous faut une COP claire

Chères toutes et chers tous,

Vous tenez entre vos mains une édition très spéciale ! A l'occasion du 16ème Sommet mondial (COP16) sur la biodiversité qui s'est ouvert à Cali, en Colombie, Vert vous propose un grand reportage en Amazonie auprès d'une défenseuse de l'environnement menacée, un portrait du grand hamster d'Alsace, victime de la destruction de son habitat, un décryptage des enjeux clés de la COP16 et d'autres surprises bien vivantes. Bonne lecture !


A l’heure de l’effondrement du vivant, tenir ses promesses est bien plus qu’urgent.


«Je préfère mourir debout que vivre à genoux» : rencontre avec Maydany Salcedo, une défenseuse de l’environnement menacée au cœur de l’Amazonie colombienne

Le 16ème Sommet mondial (COP16) sur la biodiversité se déroule en Colombie sur le thème «Paix avec la nature», mais le pays est le plus meurtrier au monde pour les défenseur·ses de l'environnement. Dans le sud, Maydany Salcedo et son association luttent sous la menace de plus en plus pressante des groupes armés illégaux.

Depuis la terrasse, trois hommes installés dans des transats veillent sur le portail, tandis qu’une dizaine de poules picorent dans le petit jardin qui jouxte la maison. «Voilà ma prison», soupire Maydany Salcedo. Sur les murs blancs du salon, sommairement meublé, ses trois diplômes et une photo de famille font office de décoration. Arrivée dans ce lieu secret il y a cinq mois, au sud de la Colombie, la militante y vit avec sa fille, ses deux petits-enfants et les trois gardes du corps fournis par l’Unité nationale de protection de l’État colombien. «Autant dire que je n’ai plus de vie privée», rumine-t-elle en débitant des bananes plantains pour nourrir la maisonnée.

Maydany Salcedo, près du lieu où elle s'est réfugiée en Colombie, le 11 octobre 2024. © Nolwenn Jaumouillé/Vert

Le cheveu argenté, les traits ronds et généreux, Maydany Salcedo a le sourire irrépressible. Mais, de ses yeux de jais, affleure une force de caractère forgée par des années de lutte. Autour de son cou, elle porte un archange en guise de protection. Pour cause : attaques armées, viols et menaces à répétition ont jalonné son parcours depuis l’enfance. Elle vit sous escorte depuis sept ans et ne se déplace que dans une «boîte à sardines» - une camionnette blindée.

Cette militante de 50 ans fait partie des milliers de «leaders» locaux qui luttent pour la nature en Colombie. A cet égard, le pays vit une tragédie : 79 défenseur·ses de l’environnement ont été assassiné·es en 2023, sur 196 au total dans le monde, selon l’ONG Global Witness. Dans ce territoire qui abrite l’une des biodiversités les plus riches de la planète, la mainmise sur les ressources naturelles sert, depuis des décennies, à financer le conflit armé entre État, guérillas, paramilitaires et criminalité organisée.

👉 Cliquez ici pour lire la suite de ce grand reportage de notre correspondante en Colombie Nolwenn Jaumouillé

· Vendredi, le président colombien Gustavo Petro a reconnu être «nerveux» à propos de la sécurité du seizième Sommet mondial (COP16) sur la biodiversité, qui s’ouvre aujourd’hui à Cali. Alors que plus de 12 000 personnes, 190 délégations et 14 chef·fes d’État sont attendu·es, le groupe armé EMC, qui se dit héritier de l’ancienne guérilla des Farc, a promis un «fiasco». - Le Monde (abonné·es)

· Ce week-end, des agriculteur·ices ont multiplié les actions partout en France pour dénoncer le manque d’actions concrètes de l’État face aux multiples crises qu’ils et elles traversent. Encouragé·es par les syndicats productivistes (FNSEA, Jeunes Agriculteurs, Coordination rurale), ils et elles menacent de reconduire le mouvement de contestation qui avait mené à d’importants blocages et des mesures d’urgence l’hiver dernier. - Libération (abonné·es)

· Samedi, 304 rassemblements ont eu lieu partout en France pour rendre hommage à Paul Varry, un jeune cycliste tué à Paris après un différend avec un automobiliste, annonce la FUB (Fédération des usagers de la bicyclette). Le ministre des Transports, François Durovray, reçoit ce lundi des associations de cyclistes «pour écouter et agir pour leur sécurité». - Ouest France

Rat le bol. La vie du grand hamster d’Europe a été profondément bouleversée par le développement des monocultures de céréales. Quelques derniers spécimens survivent dans la plaine d’Alsace. Une illustration glaçante de l’impact de la transformation des habitats naturels, première cause de l’effondrement de la biodiversité selon l’IPBES (le «Giec de la biodiversité»).

👉 Cliquez ici pour lire cet article d’Esteban Grépinet

Le grand hamster d’Europe est classé en danger critique d’extinction depuis 2020. © Nicolas Busser/CNRS

Que peut-on attendre de la 16ème Conférence mondiale (COP16) sur la biodiversité qui s’ouvre en Colombie ?

Il nous faut une COP claire. Deux ans après l’accord historique sur la biodiversité de Kunming-Montréal, les États du monde entier se retrouvent à partir de ce lundi à Cali, en Colombie. Vert vous résume les grands enjeux de cet événement.

Lors de la dernière conférence mondiale (COP15) sur la biodiversité, à Montréal, les 196 pays participants avaient adopté un ambitieux «Cadre mondial de la biodiversité» (notre article). Protection de 30% des mers et des terres, restauration de 30% des écosystèmes dégradés, réduction de moitié des «risques liés aux pesticides» : 23 objectifs pour 2030 avaient été définis. Pour s’aligner sur ces cibles, chaque gouvernement avait promis de définir un plan d’action national, mais seuls 34 États ont fourni un document actualisé.

© Vert

Après l’accord de Kunming-Montréal, un fonds de solidarité a été mis en place pour aider les pays en développement. Il doit atteindre 30 milliards de dollars (environ 27,6 milliards d'euros) d’ici à 2030. Les pays africains réclament un nouveau fonds, plus indépendant, tandis que les pays donateurs préfèrent conserver le système actuel. Les discussions porteront également sur la manière de réduire les subventions néfastes à la biodiversité.

La biodiversité regorge d’informations génétiques, contenues dans l’ADN des êtres vivants. Alimentation, médicaments, cosmétiques… ces ressources sont exploitées par les pays riches, au détriment des pays en développement d’où elles sont majoritairement issues (notre article). À Cali, les négociateur·ices devront se mettre d’accord sur un mécanisme de partage concret de ces ressources.

L’accord de Kumming-Montréal a reconnu l’importance des peuples autochtones dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité (notre article). Ces derniers gèrent, possèdent ou occupent un quart des terres mondiales qui abrite 80% de la biodiversité totale. L’enjeu est désormais de les intégrer pleinement aux négociations et de créer un organe assurant leur participation dans la gouvernance de la biodiversité.

C’est assez rare pour être souligné : pour la première fois, plusieurs chef·fes d’État sont attendu·es à Cali. La présidence de la Colombie, pays du Sud, hôte d’une riche biodiversité et aux positions ambitieuses, tentera d’impulser une forte dynamique.

Esteban Grépinet et Justine Prados

Araignées : bas les pattes !

La tête dans les toiles. Les araignées sont-elles si terribles que ça ? Bah non, ce sont même nos meilleures colocs ! Dans le nouvel épisode de sa chronique pour Vert, Ophélie Damblé, alias ‪Ta Mère Nature‬, déconstruit les mythes qui les entourent ! En bonus : un palmarès des araignées les plus mignonnes.

👉 Cliquez ici pour regarder cette vidéo sur Instagram

© Vert

+ Ophélie Damblé, Margot Desmons, Esteban Grépinet, Nolwenn Jaumouillé, Anne-Claire Poirier, Antoine Poncet et Juliette Quef ont contribué à ce numéro.