Rat le bol. Ces dernières décennies, le développement des monocultures de céréales a bouleversé le mode de vie de ce gros rongeur. Une petite population survit difficilement dans la plaine alsacienne.
Avec ses grosses joues blanches et ses petits yeux noirs, le grand hamster d’Europe a tout pour plaire. Pourtant, il est au bord de l’extinction en Alsace, où subsiste la dernière population française.
💡 Pollutions, surexploitation, changements climatiques… le «Giec de la biodiversité» a identifié cinq grandes causes de l’effondrement de la biodiversité. À l’occasion de la COP16 de Cali (Colombie), Vert part à la rencontre de cinq espèces qui symbolisent ces problématiques en France.
Le cas du grand hamster est typique de l’impact du «changement d’utilisation des terres» – destruction et fragmentation des habitats, urbanisation, etc. -, première cause d’effondrement de la biodiversité selon le rapport de l’IPBES (le «Giec de la biodiversité»).
Carences alimentaires, cannibalisme, prédation
Animal emblématique des champs, où il creuse ses terriers, le grand hamster a gravement souffert de la révolution agricole amorcée dans les années 1960. Monocultures, agrandissement des parcelles… «Ces pratiques réduisent la diversité de son alimentation», analyse auprès de Vert Caroline Habold, chercheuse en écophysiologie animale au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
La chercheuse étudie depuis 2010 les derniers hamsters d’Alsace. Son équipe de recherche a découvert que le développement massif des grandes monocultures de céréales mène ce gros rongeur à des carences alimentaires.
Par exemple, en se nourrissant presque exclusivement de maïs, le hamster manque de vitamine B3. «Cette carence entraîne du cannibalisme chez les femelles, qui vont manger leurs petits après avoir mis bas», décrit Caroline Habold.
«Les récoltes sont aussi plus monotones, avec une grande partie de l’année sans couvert végétal, ce qui l’expose à la prédation», complète-t-elle.
Un changement des pratiques agricoles qui laisse de l’espoir
Longtemps considéré comme nuisible en France, le grand hamster d’Europe est protégé depuis 1993. 400 à 500 individus d’élevage sont relâchés tous les ans près de Strasbourg : «sans ces renforcements de population, il n’y aurait plus de hamsters en Alsace», souffle Caroline Habold.
Pour son équipe de recherche, la priorité reste de restaurer l’habitat en concertation avec les agriculteur·ices. Mélanges de cultures pour diversifier l’alimentation du hamster, «bandes refuges» au milieu des champs de maïs avec des plantations variées… les solutions existent et se multiplient.
Leurs effets commencent à se faire sentir : en 2024, l’Office français de la biodiversité (OFB) a recensé 1 155 terriers en Alsace, un chiffre qui augmente légèrement au fil des années. Caroline Habold est optimiste : «avec la motivation des agriculteurs en Alsace, on arrivera à sauver la population».
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