Chères toutes et chers tous,
A l'occasion de la campagne présidentielle, l'équipe de Vert s'étoffe. Dès lundi, nous aurons le plaisir de compter une nouvelle journaliste, dont il nous tarde de vous annoncer le nom ! D'ici-là, nous vous laissons vous perdre en spéculations.
Tantôt ils manquent d'ambition, tantôt ils placent les activistes en détention : les gouvernements ont de drôles de façons de protéger leur population.

Le gouvernement ignore les injonctions du Conseil d’État sur les pesticides
Conseil des quoi ? La plus haute juridiction administrative avait donné six mois au gouvernement pour muscler les règles d’épandage des pesticides. L'indigence des modifications officialisées ce mercredi provoque la colère des associations.
Il y a six mois, le 26 juillet dernier, le Conseil d’État ordonnait au gouvernement de revoir sa copie concernant la réglementation relative aux épandages de pesticides « pour mieux protéger la population ». Premier point, les juges ont enjoint l’État à augmenter les distances minimales entre habitations et zones d'épandage de pesticides pour les produits cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR). Le Conseil d’État soulignait que l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) recommande une distance d’au moins dix mètres, que la toxicité des produits soit « avérée », « présumée » ou seulement « suspectée ». Alors que l’Etat se contente d’exiger une distance de trois à cinq mètres pour les cultures basses (légumes, céréales) et cinq à dix mètres pour les cultures hautes (arbres, vignes) si la toxicité des produits n’est que « suspectée ».

Engagé depuis 2019 dans ce bras de fer avec l’exécutif, le collectif des « maires antipesticides » demande au moins 150 mètres (Vert). Le juge réclamait également que des mesures de protection soient prises pour les personnes travaillant à proximité et qu'une information des riverain·es soit organisée en amont de l’utilisation de ces produits.
Une fois n'est pas coutume, les ordres du Conseil d’État ressemblent à un grand coup d'épée dans l'eau puisque le gouvernement a choisi de les ignorer dans le décret et l'arrêté publiés hier. Pour commencer, les « zones de non-traitement » (ZNT) ne sont pas réévaluées. Dans un récent communiqué, le ministère de la transition écologique avait argué que l'Anses définit déjà des distances de sécurité lorsqu'un produit est mis sur le marché. Celle-ci est d'ailleurs invitée à mettre à jour ses autorisations d'ici octobre 2022.
Le gouvernement esquive le sujet de la protection des travailleur·ses en introduisant une formulation à la fois trop restrictive et trop floue pour être juridiquement applicable. Par exemple, des distances de sécurité devraient être introduites dans les « lieux accueillant des travailleurs présents de façon régulière à proximité de ces traitements ». Mais l’on ignore, par exemple, si et comment cela pourrait s’appliquer aux travailleurs saisonniers (donc non réguliers) qui s'activent dans les vignes. Quant à l'information des riverain·es, elle est renvoyée à des chartes d’engagement, censées installer un dialogue entre agriculteur·rices et habitant·es à l’échelon départemental. Problème : le Conseil constitutionnel les a invalidées en mars 2021 et elles n'ont donc plus de cadre légal.
La réaction des associations environnementales ne s'est pas faite attendre. L'ONG Agir pour l'environnement a déjà annoncé saisir le Conseil d'État en urgence pour faire annuler les deux textes « entachés d’une illégalité évidente ».

· Le scrutin de la Primaire populaire s’est ouvert ce jeudi et il durera jusqu’à dimanche. 467 000 personnes se sont inscrites pour élire l’un·e des sept candidat·es proposé·es au vote. Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon et Anne Hidalgo ont déjà annoncé qu’elle et ils refusaient de reconnaître le résultat du scrutin. Pour tout comprendre à cette initiative, (re)lisez notre article sur la primaire populaire.
· La marque italienne de prêt-à-porter Moncler a annoncé, mercredi, qu'elle renonçait à l'utilisation de fourrure animale. La dernière collection à présenter de la fourrure sera celle de l'automne-hiver 2023, a-t-elle précisé par communiqué. Ce faisant, elle emboîte le pas à d'autres marques de luxe comme Chanel, Gucci, Balenciaga ou Armani. - Sciences et avenir (AFP)
· Mardi, le conseil municipal de Los Angeles a décidé l'interdiction de tout nouveau forage pétrolier sur son territoire et lancé une étude visant à faire disparaître les puits actuels dans les vingt ans à venir. Ses habitant·es supportent de moins en moins les milliers de sites déjà installés, parfois au beau milieu de quartiers résidentiels comme le raconte l'AFP.
· (V)ERRATUM. Contrairement à ce que nous avons écrit dans l’édition d’hier, l’usine de captage de gaz à effet de serre de Shell a stocké 4,8 millions de tonnes de CO2, et non pas 4,8 tonnes. La correction a été faite dans la version longue de ce décryptage à retrouver sur vert.eco. Le responsable de cette erreur a été capturé et stocké dans le sol.



« Le CULOT ! », s'est exclamé Thomas Wagner sur les réseaux sociaux. C'est vrai qu'il en faut pour oser une telle leçon d’écologie lorsque l’on est soi-même un cancre du climat. BNP Paribas est la championne européenne (4è mondiale) pour le financement des énergies fossiles. Entre 2015 et 2020, elle a presque doublé ses investissements annuels dans le secteur, atteignant 41 milliards de dollars sur la seule année 2020, selon Oxfam et Reclaim Finance.

En 2021, le vélo continue son essor
La petite reine reste sur son trône. Les chiffres de fréquentation cyclable pour 2021 affichent les mêmes niveaux que 2020, lorsque tous les records avaient été battus en pleine pandémie.
Après une vaste grève dans les transports en commun à la fin 2019, la pandémie de Covid a poussé un grand nombre de Français·es à se tourner vers la bicyclette. Un véhicule fiable, bon marché et qui permet d’éviter de se frotter à ses contemporains au pic de l’épidémie. De nombreuses villes avaient alors installé des « coronapistes », des voies cyclables temporaires marquées à la peinture jaune, pour inciter leurs administré·es à adopter le vélo. Des centaines de kilomètres ont ensuite été pérennisés.
On pouvait craindre que le soufflé ne retombe en 2021. Il n’en fut rien, selon le réseau Vélo et Territoires. Le coordinateur du réseau cyclable national, qui agrège les données de 1 200 compteurs répartis dans toute la France, a constaté une stabilité de la fréquentation en 2021 par rapport à 2020, soit une progression de 28% par rapport à 2019.

C'est en milieu urbain que la progression est la plus forte avec +32% de passage par rapport à 2019, contre +14% observé en milieu rural. Dunkerque monte sur la première marche du podium, avec une hausse spectaculaire de 74% en deux ans. L'installation, puis la pérennisation, des pistes temporaires a porté ses fruits à Paris (+53%) ou Nantes (+44%) comme Vert l’avait noté en avril dernier.
Espérons que ce report modal grignote en priorité la part de la voiture individuelle. La dernière enquête décennale du gouvernement sur les pratiques des Français·es en matière de mobilités (décryptée par Vert) montrait que la voiture prenait de plus en plus de place, tandis que le vélo plafonnait à 3%, en moyenne, des trajets du quotidien. Mais l'étude s'arrête en 2019, soit juste avant les bouleversements de 2020.

Crime pour le climat
La désobéissance, si vile ? En France, la désobéissance civile n'est pas du goût du gouvernement, qui a déjà pris des mesures pour criminaliser les intrusions dans les aéroports ou les installations agricoles. Mais l'herbe n'est pas plus verte ailleurs, comme le montre ce reportage d'Arte au Royaume-Uni. Le ministre de l'Intérieur y a déclaré la guerre aux activistes du mouvement Insulate Britain, qui réclament une meilleure isolation des logements. Neuf d'entre elles et eux sont déjà emprisonné·es et d'autres attendent leur jugement pour avoir bloqué plusieurs axes routiers.

+ Loup Espargilière et Juliette Quef ont contribué à ce numéro