De Paris au « Dakar », un même train de retard

Vendredi 15 janvier 2020


De Paris au "Dakar", les dirigeants sont priés d'arrêter leur char.  


La justice invitée à condamner l'État pour son inaction climatique

L'affaire est entendue ? Jeudi, lors du procès de l'« Affaire du siècle », la rapporteuse publique a invité le tribunal administratif à condamner l'État pour « carence fautive » dans sa lutte contre le changement climatique. 

Deux ans après le lancement de l'« Affaire du siècle » (détaillée par Vert), l'État s'est retrouvé, jeudi, devant le tribunal administratif de Paris pour répondre des accusations d'inaction climatique portées par quatre ONG : Notre affaire à tous, Greenpeace, Oxfam et la Fondation Nicolas Hulot. 

Chargée d'éclairer les juges, la rapporteuse publique Amélie Fort-Besnard a donné raison aux requérantes. Elle a constaté « la carence de l’État à adopter des mesures publiques contraignantes », dont résulte « un surplus annuel d’émissions de gaz à effet de serre qui aggrave le préjudice écologique »raconte Reporterre

Jeudi, des militant•e•s ont déployé une banderole en bord de Seine pour rappeler que 2,3 millions de personnes ont soutenu la pétition de l'Affaire du siècle. © Greenpeace

Elle a souligné le non-respect de la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre que l'État s'est lui-même fixée. En 2015, la France s'est promise de réduire de 40% ses émissions de CO2 d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990 (SNBC). Or, les émissions n'ont baissé que de 0,9% entre 2018 et 2019, alors que le rythme prévu est de 1,5% par an jusqu'en 2025 et 3% au-delà, comme l'a rappelé le Haut-Conseil pour le climat en juillet dernier (rapport).

La rapporteuse publique, dont les recommandations sont généralement suivies par les magistrat•e•s, a proposé que l'État soit condamné à verser 1 euro symbolique aux associations (sauf Notre affaire à tous, jugée trop jeune) en raison du préjudice moral. Si elle a considéré qu'une large part de la population française était bien victime d'un préjudice écologique, Amélie Fort-Besnard a rejeté l'idée d'une réparation. Préférant laisser du temps à l'État pour ajuster le tir.

Une condamnation de l'État pour un tel motif serait inédite en France et marquerait un tournant dans la justice climatique. Réponse du tribunal d'ici une quinzaine de jours. 

L’Organisation météorologique mondiale (OMM) confirme que 2020 est au coude-à-coude avec 2016 parmi les années les plus chaudes jamais mesuréesdans un bilan définitif publié jeudi. L’institution a été incapable de les départager parce que l’écart entre les jeux de données sur lesquels elle se base (Nasa, Copernicus, etc.) est trop faible. Numéro 1 ou pas, 2020 aura été ahurissante : marquée par un épisode La Niña, pourtant censé refroidir la planète, elle se sera hissée au même niveau que 2016, réchauffée « artificiellement » par le phénomène contraire : El Niño (les explications de Futura-Sciences). Le réchauffement a atteint +1,21°C par rapport à l’ère préindustrielle (milieu du 19è siècle). - Le Monde (abonnés)

• Les nations du globe consacrent bien trop peu d’argent pour s’adapter au dérèglement climatique, alerte l’ONU dans un rapport publié jeudi. Par exemple, seuls 24 milliards d’euros par an sont déboursés pour aider les pays les plus pauvres à gérer les conséquences de la crise climatique, moins de la moitié de ce qui leur serait nécessaire (58Mds€). Et jusqu’à dix fois moins que les coûts attendus pour 2030. - The Guardian (anglais)

Un Dakar vert !

Caisses, qu'on se marre ! Le patron de la célèbre course automobile à travers les cinq continents promet un Dakar « vert » dans les années à venir. 

Plus fort que l'avion vert, la compétition automobile verte ! C'est la promesse insensée faite au Parisien par David Castera, directeur de cette course qui émet quelque 40 000 tonnes de CO2, selon le calcul effectué par l'association Agir pour l'environnement. 

« Cela se fera d'abord progressivement, avec de l'hybride et de l'hydrogène », indique David Castera, qui annonce qu'une catégorie spécifique « énergies alternatives » devrait voir le jour dès la prochaine édition. Objectif : « un plateau 100 % électrique pour les autos et camions en 2030 »

D'une part, il paraît difficile de croire que les 3 000 personnes qui participent à l'organisation du Dakar seront acheminées à travers la planète en train. D'autre part, quand bien même toutes les voitures, motos et camions seraient électriques – ce qui paraît, pour l'heure, difficilement concevable, ce serait toujours un peu court pour en faire une course « verte ».

Un camion en compétition lors du Dakar 2009 © Claudio Castro

Lors du dernier Dakar, qui s'est déroulé dans le désert saoudien, les pistes et les dunes étaient « jonchées d’ordures », le bord des autoroutes « constellé de bouteilles et de bidons en plastique, de pneus de camions, d’engins de chantiers ensablés à proximité des puits de pétrole »ont noté les journalistes de France info. Plus comique : à la cantine, qui sert 80 000 repas au cours de l'épreuve, le tri sélectif a été abandonné en 2020 ! 

« Depuis toujours, le Dakar a cette image de pollueur… », déplore le journaliste du Parisien. « Comme toutes les courses mécaniques ! répond David Castera. Jusqu'à preuve du contraire, notre rallye n'est pas plus polluant qu'un Grand Prix de Formule 1 et bien d'autres. Souvent, les gens parlent sans connaître. » La course de voiture écolo à travers le désert, effectivement, on ne connaît pas. 

Le vendredi, chez Vert, c'est le jour du Do it yourself (faites-le vous-même) ! Cette semaine, voici une recette de baume à lèvres au miel, facile à faire et bon marché !

Vous pouvez cliquer sur l'image pour l'afficher en plein écran et l'enregistrer d'un coup de clic droit © Vert 

Un train d'avance

Ingénieur, artisan, ancien conducteur de train... dans le Lot, une bande de citoyen•ne•s caresse un rêve : ressusciter la ligne Bordeaux-Lyon, qui a permis à des générations de voyageur•se•s - pendant 143 ans - de traverser la France par le Massif central, avant que la SNCF ne l'abandonne en 2014. 

C'est le projet de Railcoop, une coopérative qui veut contribuer à retisser le réseau ferroviaire français délaissé au profit de la voiture. Pour y parvenir, l'entreprise se cherche des sociétaires afin d'obtenir les quelques millions d'euros qui lui manquent encore. Une réjouissante aventure racontée hier soir par Envoyé spécial

Un reportage de Perrine Bonnet, Vincent Piffeteau et Benoît Sauvage diffusé dans "Envoyé spécial" le 14 janvier 2021.

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