Chères toutes et chers tous,
📅 Alors que les scientifiques du Giec s’apprêtent à rendre public le deuxième volet de leur dernier rapport la semaine prochaine, on vous propose dès à présent de réserver votre mercredi soir pour débriefer cette sortie très attendue avec nos journalistes. Rendez-vous à la Base (31 rue Bichat, Paris 10e) mercredi 2 mars à 19h30.
En attendant notre édition spéciale à paraître ce lundi, vous pouvez potasser vos dossiers en vous replongeant dans notre décryptage du premier tome sorti l’été dernier.
Après s'être longtemps gavée de ses hydrocarbures, l'Europe veut se défaire de l'usine à gaz et à guerre russe.

L'Europe est-elle prête à tourner le dos au gaz russe ?
Ça sent l'Russie. Alors que la Russie pilonne l'Ukraine, l'Europe veut réduire sa dépendance au gaz russe, qui constitue son premier fournisseur.
« La Russie n’est plus un fournisseur fiable. Nous devons couper le cordon de la dépendance énergétique […] et développer une stratégie qui nous rende complètement indépendants du gaz russe » ; ce sont les mots, forts, prononcés par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen lors du sommet entre dirigeant·es européen·es, réuni·es en urgence ce jeudi.
La menace en forme de prière de la cheffe de l'exécutif européen est-elle tenable ? Pour l'heure, 40% du gaz (et 20% du pétrole) importé par les pays de l'Union européenne provient de Russie (Sénat). En outre, certaines compagnies fossiles européennes sont lourdement dépendantes de la Russie. TotalEnergies a bâti deux vastes projets d'extraction de gaz naturel liquéfié (GNL) dans l'Arctique avec le russe Novatek, dont elle détient 20% du capital (TotalEnergies).

Parmi les gestes forts à noter, le nouveau gouvernement allemand a bloqué, ce mardi, le processus d'homologation du gigantesque pipeline Nord Stream 2, qui doit permettre à terme d'acheminer quelque 55 millions de mètres cubes de gaz par an depuis la Russie.
Cette crise géopolitique s'ajoute à celle du gaz, qui renchérit l'électricité et grève les finances des contribuables européen·nes depuis de longs mois. Jeudi, face à la menace d'une baisse de l'approvisionnement, le mégawattheure de gaz bondissait de 30 à 50% sur différents marchés européens (La Tribune). Le ministre français de l'économie, Bruno Le Maire, a déjà promis « le gel du prix du gaz pour les particuliers en toutes circonstances ». Les dirigeant·es sont-elles et ils réellement capables de se passer rapidement de leur premier fournisseur ?

D'autant que l'Europe compte sur le gaz comme une « énergie de transition » ; deux fois moins émettrice de CO2, cette source fossile de production d'électricité doit permettre à l'Europe de tourner le dos au charbon. C'est ainsi qu'à l'issue de longues tractations, le gaz « naturel » a intégré la taxonomie « verte » européenne (Vert), permettant à des projets gaziers de recevoir des financements dédiés à la transition écologique. En réalité, cette énergie émet entre 10 et 40 fois plus de CO2 pour un kilowattheure d'électricité que les renouvelables ou le nucléaire.
Jeudi, la présidente de la Commission européenne a rappelé que l'Union misait sur le gaz naturel liquéfié, plus facile à transporter en l'absence de gazoducs et à stocker, pour réduire sa dépendance à la Russie. Ursula von der Leyen a aussi juré que les réserves de GNL pour cet hiver étaient suffisantes, même si Moscou venait à « couper complètement l’Europe du gaz russe » (Contexte). Un scénario jugé peu probable par les expert·es.
Retrouvez la version longue de cette analyse sur vert.eco

· Jeudi, l’armée russe a pris le contrôle de la centrale de Tchernobyl, en Ukraine, où a eu lieu le pire accident nucléaire de l’histoire en 1986. Des déchets radioactifs sont toujours stockés sur le site. L’Agence internationale de l’énergie a affiché une vive inquiétude : « il est d’une importance vitale que les opérations dans cette zone ne soient pas affectées ou perturbées d’aucune manière ». - France info
· Jeudi encore, le cours du blé a atteint un prix inédit de 344 euros la tonne, effet collatéral de l’invasion russe en Ukraine. Le pays, qui est le quatrième exportateur mondial de céréales, est souvent considéré comme le « grenier à blé » de l’Europe. De nombreux pays (l’Égypte, le Liban, le Maroc) en sont dépendants et craignent désormais des ruptures d’approvisionnement. - Reporterre
· L’environnement est la seconde préoccupation des jeunes, juste derrière le pouvoir d’achat, selon une étude révélée mercredi par le syndicat étudiant la Fage (Fédération des associations générales étudiantes) et Ipsos. Pour 83% des personnes interrogées, il faudra « revoir complètement notre système économique et social et pas seulement nos comportements individuels » pour résoudre la crise écologique. Même si six jeunes sur dix considèrent que le réchauffement climatique est avant tout la conséquence de mauvais choix individuels.


8%
C’est fou. Aux États-Unis, les admissions à l’hôpital pour des urgences psychiatriques augmentent en moyenne de 8% lors des jours de fortes chaleurs. C’est ce que révèle une étude publiée mercredi dans la revue médicale Jama Psychiatry, confirmant l’impact du changement climatique sur la santé mentale. Les jours les plus chauds (le top 5% des jours étudiés entre 2010 et 2019) coïncident avec un accroissement des visites aux urgences pour de nombreux motifs liés à la santé mentale (stress, anxiété, schizophrénie, automutilation, toxicomanie, etc). Les populations sont particulièrement vulnérables dans le nord-ouest des États-Unis, où les admissions pour urgence psychiatrique connaissent une hausse qui peut atteindre 12% lors des canicules. Cette vulnérabilité accrue pourrait s’expliquer par des capacités d’adaptation moins développées que dans le sud du pays, où les habitant·es sont plus régulièrement confronté·es à des températures extrêmes.

Opération « Bye bye béton »
Laisse béton. Dans l’album pour enfants Opération bye bye béton, l’agricultrice urbaine Ophélie Damblé et l’illustratrice Roca Balboa mettent en scène, de manière drôle et légère, la révolte de jeunes face au tout-macadam et leurs plans pour accorder plus de place à la nature en ville.
Camomille habite un terrain vague qui s’étale entre deux immeubles avec ses parents - un couple de mauvaises herbes. Un lieu fertile où s’épanouit la vie, qui tranche avec le béton mort qui recouvre son école. Avec ses petits camarades de classe, elle imagine « à quoi ressemblerait cette vieille cour d’école toute moisie, si seulement on les laissait faire ». Une fresque colorée, des arbres pour jouer à chat perché, une mare pour observer les grenouilles, des carrés à cultiver : les rêves sont légion pour faire tomber le béton. Mais comment s’y prendre ? Une panne de livraison à la cantine amène enfants et adultes à découvrir les plantes sauvages qui croissent sur la friche de Camomille et à défendre ce terrain, menacé d’être transformé en parking.

Superbement illustré par les fresques pop ultra-colorées de Roca Balboa, ce réjouissant album éduque les yeux citadins aux végétaux qui se fraient déjà un chemin à travers le bitume et invite les lecteur·ices à végétaliser les villes. Un combat que mène depuis plusieurs années l’autrice Ophélie Damblé (son portrait dans Vert), adepte de la « guérilla green » pour réensauvager les cités.
Ophélie Damblé, Roca Balboa, Opération bye bye béton, La ville brûle, mars 2022, 48p, 15€. À paraître le 4 mars.

Au nom du père et de la Terre
Dans son film Au nom de la Terre, Édouard Bergeon raconte les difficultés du monde agricole et la détresse des paysan·nes, souvent ignorée par les institutions. Le scénario est inspiré d’une histoire vraie, celle du réalisateur lui-même dont le père, exploitant agricole, a mis fin à ses jours. Le film suit Guillaume Canet dans le rôle d’un jeune premier qui reprend la ferme familiale avant de tomber dans l’engrenage de l’agriculture industrielle. Sorti au cinéma en 2019, le film est en accès libre sur France Télévisions jusqu’à mercredi prochain.

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+ Justine Prados et Juliette Quef ont contribué à ce numéro