🕶️ L’été, tout ralentit, Vert y compris ! En juillet et en août, les éditions quotidiennes et hebdomadaires laissent la place à une édition estivale unique. Vous aurez droit à un large tour d’horizon de l’actualité de l’écologie des sept derniers jours, chaque mercredi à midi dans votre boîte mail, jusqu'à la rentrée de septembre.
Il serait temps que les idées pleuvent pour faire remonter le niveau des fleuves.

Sur le Rhin, le casse-tête du transport fluvial en temps de sécheresse
Pas un long fleuve tranquille. Voies de navigation fermées, moins de bateaux et moins de chargement : en raison du faible niveau du Rhin, le transport fluvial y connaît de grandes difficultés et devient un casse-tête logistique depuis plusieurs semaines.
Cet été, la sécheresse n’affecte pas seulement les sols et les rendements agricoles, mais aussi le transport fluvial. C’est particulièrement le cas du Rhin, principale voie fluviale européenne sur laquelle sont transportées quelque 300 millions de tonnes de marchandises chaque année. Vendredi, son niveau est tombé sous la barre des 40 centimètres à Kaub (Allemagne), la référence utilisée pour jauger la navigabilité du fleuve. Un seuil inquiétant pour de nombreux acteurs de l’industrie en Allemagne : 4 % du fret y est transporté par voie maritime, dont une grande partie via le Rhin.
Avec le faible niveau de l’eau, les embarcations ne peuvent être chargées qu’au tiers de leur capacité habituelle pour éviter de racler les fonds. Une mesure qui entraîne le ralentissement global du transport fluvial et l’explosion des prix du fret.

En conséquence, certaines marchandises sont reportées sur les routes et les rails, mais rien qui ne puisse compenser la navigation sur le Rhin. « Il faut savoir qu'un bateau transporte en moyenne 2 000 tonnes alors qu'un camion ne transporte que 30 tonnes », a rapporté à France info Vincent Le Ber, responsable céréales pour la coopérative agricole Lorca. Le chargement d’un bateau représente ainsi 60 camions sur les routes.
Depuis plusieurs mois, l’importance stratégique du fleuve s'est accrue en raison de la guerre en Ukraine. Pour se détourner du gaz russe, l’Allemagne a décidé de se concentrer sur le charbon. Ce dernier est largement transporté par la voie rhénane, une solution aujourd’hui en suspens. À tel point que, si la situation venait à s’aggraver, le pays pourrait donner la priorité au transport de matériel nécessaire à la production d’énergie, et en particulier de charbon et de pétrole, souligne un brouillon de décret révélé par Reuters.
Cruelle ironie, puisque le charbon est l’énergie la plus émettrice de gaz à effet de serre et qu’il participe à l’accélération du dérèglement climatique, lui-même responsable de la multiplication des sécheresses.


La faim du monde. Les « pierres de la faim » de l’Elbe, des repères hydrologiques sculptés dans la roche qui apparaissent dans les cours d’eau en cas de sécheresse intense, sont de nouveau visibles cette année. Ces pierres ont été sculptées le long de l’Elbe, en Allemagne et en République Tchèque, à partir du XVème siècle et servaient à alerter les populations d’un risque de famine, une sécheresse importante entraînant généralement un effondrement de la production agricole. La photo ci-dessus a été prise durant l’été 2018 près de Děčín, en République Tchèque. Sur ce rocher, de nouveau découvert en cet été exceptionnellement sec, on peut lire la funeste inscription : « si tu me vois, pleure ». Partout en Europe, les niveaux des fleuves, lacs et rivières sont particulièrement bas et mettent en difficulté agriculteur·rices et habitant·es. - Miami Herald (en anglais)

· Vendredi, le gouvernement a lancé un processus de concertation sur le développement des énergies renouvelables en vue d’un projet de loi qui devrait être présenté à la rentrée. Cette loi devra répondre à la crise d’approvisionnement énergétique générée par la guerre en Ukraine et aider la France à rattraper son retard dans le déploiement de ce secteur par rapport aux autres pays européens. La France veut atteindre 40 % d’énergie renouvelable dans son mix électrique d’ici à 2030, contre environ 20 % actuellement. - Le Monde
· En fin de semaine dernière, 361 pompiers européens ont pris la route pour venir en renfort aux pompiers français en Gironde. Arrivé·es d’Allemagne, de Pologne, d’Autriche ou de Roumanie, les soldats du feu ont combattu le gigantesque incendie de Landiras, où 7 400 hectares ont brûlé la semaine dernière, après les quelque 14 000 partis en fumée en juillet. La préfecture a annoncé dimanche que le feu était fixé, même s’il n’est pas encore éteint. - Le Monde
· Lundi, les États membres des Nations Unies ont repris les négociations en vue d’un traité de protection de la haute mer. Cette dernière commence là où s’arrêtent les zones économiques exclusives - au maximum à 200 milles nautiques des côtes (370 kilomètres) - et est exclue de toute juridiction alors qu’elle représente plus de 60 % des océans. Ce traité devrait donner un cadre de gestion commune des eaux internationales pour améliorer la préservation de la biodiversité, notamment en facilitant la création d’aires marines protégées. - Novethic (AFP)
· Mardi, en fin d’après-midi, des pluies diluviennes se sont soudainement abattues sur Paris. Jusqu’à 37 millimètres de pluie ont été recensés en une heure à la station météorologique de Paris-Montsouris, précise Météo-France, soit les deux tiers de la moyenne mensuelle (58 mm) relevée entre 1991 et 2020. Plusieurs stations de métro ont été fermées en raison du déversement des eaux dans les escaliers et sur les quais, et le trafic a été perturbé pendant plusieurs heures sur certaines lignes de la RATP. - 20 minutes (AFP)
· Vingt-six personnes suspectées d’être des pyromanes ont été arrêtées depuis le début de l’été, a indiqué le ministère de l’Intérieur mardi au Monde. Parmi ces individus, quatre ont déjà été condamné·es et six sont en détention provisoire. En tout, plus de trois cents gendarmes ont été mobilisés au cours de l’été pour enquêter sur l’origine des feux et débusquer les incendiaires lorsqu’ils avaient une origine criminelle.


En bandes organisées. Inspiré des célèbres « bandes du réchauffement climatique » du scientifique Ed Hawkins, un chercheur britannique, Miles Richardson, vient de mettre au point une visualisation de l’effondrement de la biodiversité, afin de lutter contre l’invisibilisation de ce phénomène. Ces « bandes de la biodiversité » illustrent le déclin progressif du vivant depuis les années 1970. 68 % des populations de vertébrés ont disparu depuis, selon les données du Living planet index (l’indice planète vivante), un programme transnational utilisé par l’ONU qui a suivi les évolutions de près de 5 000 espèces et 28 000 populations de mammifères, oiseaux, poissons, amphibiens et reptiles entre 1971 et 2016. « Il existe une perception beaucoup plus claire du coût et du danger du changement climatique », abonde Miles Richardson auprès de Vert. « Quand on leur parle de biodiversité, les gens ont tendance à penser que ça n’a pas autant d’importance, que la réduction des populations d’oiseaux n’a pas vraiment d’impact sur eux par exemple ». Or, comme l’a redit le Giec dans son dernier rapport, le climat, le vivant et les sociétés humaines sont interdépendantes (Vert).
Un décryptage à lire en intégralité sur vert.eco

· What the phoque. Les températures s’élèvent quatre fois plus vite en Arctique que sur le reste de la planète, a conclu une étude publiée jeudi dans la revue Communications earth and environnement. À partir de données recueillies depuis 1979, les chercheur·ses ont mesuré que la région s’était réchauffée de 0,75 °C en moyenne par décennie depuis 40 ans. Le décalage avec le réchauffement observé à l’échelle mondiale s’appelle l’« amplification arctique ». Un phénomène dû à de nombreux facteurs, dont le réchauffement des océans ou la fonte de la banquise, qui assombrit les sols et emmagasine davantage de chaleur. - France info (AFP)
· Tout part à vau-l’eau. L’eau de pluie est impropre à la consommation partout dans le monde, en raison de la présence de produits chimiques toxiques, a conclu une récente étude menée par l’Université de Stockholm et publiée dans la revue Environmental science and technology. Les niveaux de perfluorés (PFAS, appelés « polluants éternels » en raison de leur persistance dans l’environnement) trouvés dans l’eau de pluie sont largement supérieurs aux recommandations sanitaires américaines - utilisées comme référence dans l’étude - et ce, même en Antarctique ou au Tibet. Ces seuils ont récemment été abaissés en raison d’une meilleure connaissance de la toxicité des PFAS. - Sud-Ouest (AFP)
· C’est chaud. Au moins un million de personnes ont été déplacées à cause de la sécheresse qui sévit en Somalie depuis début 2021, ont alerté le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies et l’ONG Conseil norvégien pour les réfugiés (CNR). Cette sécheresse historique atteint des niveaux inédits depuis plus de quarante ans en Somalie. Selon ces deux institutions, le nombre d’individus confronté·es à des niveaux de famine extrême dans le pays devrait grimper de cinq à sept millions dans les mois qui viennent. - Le Monde (AFP)


Les écolos voient rouge sur les greens. Cet été, les dérogations dont bénéficient certains golfs en pleine sécheresse, leur permettant d’arroser leurs greens en dépit des restrictions d’eau parfois lourdes qui s’appliquent à d’autres activités (agriculture, énergie, loisirs, etc), sont source de nombreuses tensions. Dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, des militant·es d’un collectif écologiste surnommé « Kirikou » ont bouché les trous des parcours de deux golfs toulousains avec du ciment et planté des pancartes portant des messages de sensibilisation (Libération). Quelques jours plus tard, c’est à Limoges que des militant·es d’Extinction Rebellion se sont introduit·es dans deux golfs ; elles et ils y ont planté des légumes dans les trous des parcours. Avec ce dessin paru sur nos réseaux sociaux la semaine dernière, Sanaga aurait-il lancé une nouvelle mode ?

· Orage, ô des espoirs. Depuis ce week-end, la pluie a enfin fait son retour en France métropolitaine après des semaines d’absence. Ce qui ne sera, hélas, pas suffisant pour recharger les nappes phréatiques, fortement affectées par la sécheresse qui touche le pays depuis plusieurs mois. Mais la pluie a apporté un peu de fraîcheur après les trois sévères vagues de chaleur qui se sont succédé tout l’été. En juillet, il est tombé moins d’un centimètre d’eau sur l’Hexagone. - France info
· Steak un au revoir. Pour la première fois en Europe, une ville britannique s’est engagée à encourager ses habitant·es sur la voie du véganisme. Haywards Heath, ville du sud de l’Angleterre aux 34 000 résident·es, a récemment signé le Traité végétalien (Plant-based treaty), une initiative qui liste 38 recommandations pour inciter au véganisme, parmi lesquelles une taxe sur la viande, la fin des constructions de fermes d’élevage ou d’abattoirs ou encore des subventions pour aider les agriculteur·rices à transitionner vers une production végétale. 17 villes ont déjà ratifié ce traité dans le monde, dont quatorze en Inde. - Ouest-France
· On ne choisit pas sa famille. Aux États-Unis, des héritier·es du pétrole financent des activistes du climat qui luttent pour la réduction des énergies fossiles. Deux organisations, le Climate emergency fund et l’Equation campaign, ont déjà reçu des millions de dollars de plusieurs enfants issu·es de familles qui ont fait fortune dans le pétrole aux siècles derniers afin d’organiser des actions de désobéissance civile. « Je ressens une obligation morale de faire ma part », a confié l’un d’entre eux au New York Times (en anglais) pour justifier ses motivations.

Dans les Vosges, coup de chaud sur le massif
Sur une mauvaise pente. Dans le massif des Vosges, région surnommée « Petit Canada » ou « Petite Finlande » grâce à son incroyable biodiversité, les arbres étouffent de plus en plus à cause des canicules et des sécheresses, raconte le dernier épisode de la série documentaire Sale temps pour la planète, diffusée sur France 5. Gestion des feux de forêts, plantation de nouvelles essences d’arbres, élargissement des activités touristiques à cause du manque de neige : le documentaire part à la rencontre des acteurs qui font vivre et préservent le massif au quotidien. En toile de fond, la nécessaire réflexion autour de l’adaptation du territoire à de nouvelles conditions climatiques.

+ Loup Espargilière, Juliette Quef et Sanaga ont contribué à ce numéro