Décryptage

Travail et changement climatique : comment s’adapter ?

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Métro, boulot, trop chaud. Dans un avis adop­té mar­di, le Con­seil économique, social et envi­ron­nemen­tal (Cese) a for­mulé 17 pré­con­i­sa­tions pour adapter le tra­vail aux impacts du change­ment cli­ma­tique.

Alors qu’une canicule pré­coce et excep­tion­nelle touche l’Espagne cette semaine, le gou­verne­ment de la région de Madrid a dû met­tre en place des mesures pour ajuster les horaires des écoles en fonc­tion des pics de chaleur et adapter les ser­vices publics afin de ren­dre cet épisode plus tolérable. Doit-on envis­ager des déci­sions sim­i­laires pour faire face au boule­verse­ment du cli­mat au quo­ti­di­en, et notam­ment dans le cadre pro­fes­sion­nel ?

70% des représentant·es du per­son­nel et des dirigeant·es d’entreprise ont estimé que le dérè­gle­ment cli­ma­tique pou­vait affecter la san­té des salarié·es, a révélé une vaste con­cer­ta­tion menée par le Cese. À par­tir des con­stats de cette enquête, il for­mule une série de pré­con­i­sa­tions pour repenser le sujet de la san­té au tra­vail à l’aune de la crise cli­ma­tique.

«Aujourd’hui, 3,6 mil­lions de per­son­nes soit 14% des salariés tra­vail­lent à l’extérieur et sont plus directe­ment exposés à de fortes chaleurs. Mais l’ensemble des tra­vailleuses et tra­vailleurs sont con­cernés», rap­porte le Cese, qui pro­pose de recon­naître le risque canicule comme une intem­périe. «Dans le bâti­ment, le tra­vail est arrêté en cas de grand gel ou de neige. La canicule doit aus­si être con­sid­érée comme un motif d’arrêt de tra­vail», jus­ti­fie Jean-François Naton, co-rap­por­teur de l’avis, auprès de l’Express.

Mieux con­naître les risques, c’est aus­si mieux les prévenir. L’instance appelle de ses vœux l’amélioration et la mul­ti­pli­ca­tion des for­ma­tions sur la san­té au tra­vail et sur les liens entre san­té et envi­ron­nement pour sen­si­bilis­er tous les acteurs. Dans cette per­spec­tive, le Cese évoque la créa­tion d’un fonds dédié à financer la recherche, la préven­tion et l’amélioration des con­di­tions de tra­vail. Il sug­gère aus­si la nom­i­na­tion d’un délégué inter­min­istériel auprès de la Pre­mière min­istre pour coor­don­ner les straté­gies sur la san­té au tra­vail.

Enfin, le Cese pré­conise d’élargir le dia­logue social afin d’associer davan­tage travailleur·ses et employeur·ses dans la réflex­ion autour des sujets envi­ron­nemen­taux. L’enquête pub­liée en jan­vi­er avait révélé un décalage entre le niveau de préoc­cu­pa­tion per­son­nelle des répondant·es et le sen­ti­ment d’engagement col­lec­tif sur ces enjeux dans le cer­cle pro­fes­sion­nel. Le Cese recom­mande de ren­forcer la réflex­ion sur les con­séquences envi­ron­nemen­tales dans les con­sul­ta­tions des Comités soci­aux et économiques (CSE) en entre­prise.

Ces derniers mois, l’actualité sociale liée à la réforme des retraites a mis le tra­vail au cen­tre des débats poli­tiques, tout en occul­tant les enjeux cli­ma­tiques (notre arti­cle). Un angle mort que regrette le co-rap­por­teur de ce plan, Jean-François Naton : «Avant de tra­vailler plus, par­lons du tra­vailler autrement. Il est déjà com­pliqué d’aller jusqu’à 62 ans dans cer­taines pro­fes­sions, alors plus tard… On est passé à côté du sujet.» Il espère que cet avis remet­tra les dis­cus­sions autour du tra­vail sur le bon rail.