Sous l’effet du réchauffement, les océans se mélangent de moins en moins

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Au fond, c’est chaud. Le réchauf­fe­ment cli­ma­tique sépare les dif­férentes couch­es des océans à un rythme effréné, détéri­o­rant leur capac­ité à répar­tir la chaleur sur le globe et à stock­er du CO2, d’après une étude pub­liée mer­cre­di dans Nature. 

Les eaux océaniques sont faites de deux couch­es : l’une, en sur­face (de 50 à 300 mètres sous le niveau de l’eau), l’autre, pro­fonde. Ces couch­es pos­sè­dent des den­sités dif­férentes en rai­son d’é­carts de tem­péra­ture et de salin­ité. Mais elles pra­tiquent de nom­breux échanges. En se déplaçant vers les pôles, l’eau chaude de sur­face refroid­it et finit par plonger. Puis, elle prend le chemin inverse en direc­tion de l’équa­teur où elle remonte.

Prob­lème : avec le réchauf­fe­ment et la fonte des glaces, qui apporte de l’eau douce (moins salée et donc moins lourde), cette eau de sur­face perd de sa den­sité et toute la mécanique se grippe. « On peut com­par­er ces deux couch­es de l’océan à une couche d’huile sur de l’eau, explique au Monde l’océanographe Jean-Bap­tiste Sal­lée, co-auteur de l’é­tude. La dif­férence de den­sité fait que les échanges se réduisent et l’océan se mélange de moins en moins ver­ti­cale­ment. » Or, l’é­cart de den­sité entre les deux couch­es s’ac­célère à un rythme six fois supérieur aux précé­dentes esti­ma­tions, indiquent les sci­en­tifiques. 

Par ailleurs, les océans sont de moins en moins capa­bles de jouer leur rôle d’im­menses pom­pes à CO2 : l’élé­va­tion des tem­péra­tures empêche le car­bone de se mélanger à l’eau et l’é­cart de den­sité crois­sant entre les deux couch­es dimin­ue l’at­trac­tion du gaz à effet de serre vers les fonds marins. 

Ce phénomène a égale­ment des impacts sur la bio­di­ver­sité, alors que la couche supérieure héberge l’essen­tiel de la vie marine. De très nom­breuses espèces se nour­ris­sent de nutri­ments qui remon­tent du fond. La bar­rière invis­i­ble entre les couch­es risque d’empêcher cette nour­ri­t­ure pré­cieuse d’ar­riv­er à bon port.