Compost de pomme ! Dans quelques jours à peine, les collectivités auront l’obligation de permettre à leurs administré·es de trier leurs déchets organiques, qui représentent la moitié du poids de leur poubelle. Pour l’heure, le compte n’y est pas.
Votée en 2020, la loi «antigaspillage» avait laissé aux collectivités jusqu’au 1er janvier 2024 pour mettre en place des solutions de compostage accessibles à toutes et tous. «Jusqu’à peu, il n’y avait pas de critères pour déterminer si les collectivités étaient dans les clous ou non», raconte Muriel Bruschet, référente biodéchets de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Ces critères n’ont été publiés au bulletin officiel que le 9 décembre, trois semaines avant l’échéance.
Selon le texte, les points d’apport volontaire doivent se situer à moins de 150 mètres de n’importe quel ménage dans les zones urbaines, 100 mètres dans les zones touristiques. Dans les zones rurales, ils doivent couvrir 250 habitant·es. Pour la collecte à domicile, celle-ci doit être au moins hebdomadaire, mais le nombre et le type de bacs sont choisis par les collectivités.
À quelques jours de l’échéance, l’Ademe estime que seul un tiers de la population est desservi par une solution de tri des déchets alimentaires, explique à Vert Muriel Bruschet.
Une mise en place floue et coûteuse
Il existe deux solutions de tri pour les biodéchets. La gestion de proximité repose sur le compost à domicile ou de quartier, géré et utilisé sur place dans les jardins et potagers. Comme pour le verre ou la poubelle jaune, la collecte séparée correspond au ramassage à domicile ou dans des bacs d’apport volontaire. Elle permet de valoriser les déchets en compostage industriel ou en biogaz grâce à la méthanisation. «Cette nouvelle gestion représente aussi un coût non négligeable et un besoin de sensibilisation», affirme Muriel Bruschet.
Le coût supplémentaire pour la collecte séparée est de 7 à 20 euros par personne et par an, qui s’ajouteront aux 100 euros annuels que coûte déjà la collecte des déchets, selon la référente de l’Ademe. Le coût sera du même ordre pour la gestion de proximité, qui nécessite des personnes chargées de l’animation et de la gestion des composteurs.
La sensibilisation est aussi à la charge des collectivités. Ce levier est essentiel pour que les citoyen·nes se saisissent des moyens mis à leur disposition. «Cette sensibilisation prend du temps, c’est un nouveau geste pour certaines personnes et il nécessite un accompagnement», assure Cécile Bussière, chargée de plaidoyer du Réseau Compost Citoyen.
Bien que le coût écologique de chaque solution soit en cours d’étude à l’Ademe, le Réseau Citoyen Compost prône pour la gestion de proximité. «Le compost partagé permet aussi la participation citoyenne et le lien social», défend Cécile Bussière.
La loi ne prévoit pas de sanctions pour les collectivités qui ne proposent pas de solutions de tri à ses habitant·es. Cependant, elles ont des incitations financières. «La taxe générale des activités polluantes (TGAP) va augmenter jusqu’en 2025, explique Muriel Bruschet. Elle concerne notamment les déchets de la poubelle noire. Les collectivités ont donc intérêt à diminuer la quantité de déchets ménagers et à les valoriser». Les collectivités vont-elles mieux se composter ?
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