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Remaniement : le ministère de l’Énergie disparaît et passe sous la coupe de Bercy

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Volt face. C’est l’une des prin­ci­pales sur­pris­es du remaniement annon­cé jeu­di soir : le min­istère de la Tran­si­tion énergé­tique pour­rait être rat­taché à celui de l’Économie pour la pre­mière fois depuis plus de quinze ans. Un choix révéla­teur des pri­or­ités de ce nou­veau gou­verne­ment.

Mais où est passée l’énergie ? C’est la grande ques­tion qui demeure après l’annonce des pre­miers min­istres qui com­poseront le gou­verne­ment de Gabriel Attal. En atten­dant que les noms des min­istres délégué·es et autres secré­taires d’Etat ne soient nommé·es, l’actuelle min­istre de la Tran­si­tion énergé­tique, Agnès Pan­nier-Runach­er, ne fig­ure pas dans la nou­velle liste resser­rée de 14 min­istres. Il se mur­mure que son maro­quin quit­terait le giron du min­istère de l’Écologie pour pass­er dans celui de l’Économie, dirigé par Bruno Le Maire.

Un sig­nal sur­prenant, qui met­trait fin à un statu quo datant de 2007, qui veut qu’écologie et énergie soient rassem­blées au sein d’un même min­istère. Par­mi les «risques» de la dis­pari­tion du min­istère de la Tran­si­tion énergé­tique, l’éclatement des déci­sions entre plusieurs min­istères.

«C’est le retour à une poli­tique en silos : la nature d’un côté, l’énergie de l’autre. Alors que la lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique nous impose de con­cevoir l’écologie comme un tout indi­vis­i­ble avec des enjeux qui sont tous liés les uns aux autres», analyse Arnaud Gosse­ment, doc­teur en droit spé­cial­isé dans le droit de l’environnement et de l’énergie.

«Si Bercy devient référent sur les ques­tions de pro­duc­tion énergé­tique et de l’atténuation des émis­sions de gaz à effet de serre, il n’a par exem­ple pas la main sur les secteurs les plus émet­teurs que sont les trans­ports ou le loge­ment, craint Anne Bringault, direc­trice des pro­grammes au Réseau action cli­mat, qui fédère 27 asso­ci­a­tions envi­ron­nemen­tales. Cela risque de com­pli­quer, et de ralen­tir, les pris­es de déci­sion et c’est regret­table».

Bruno Le Maire et Christophe Béchu en mai 2023. © Geof­froy Van Der Has­selt / AFP

Cette déci­sion ne sort pas de nulle part. «Avoir la respon­s­abil­ité de l’énergie, c’est se don­ner les meilleures chances d’accélérer la réin­dus­tri­al­i­sa­tion du pays et la réal­i­sa­tion du pro­gramme nucléaire français», s’est félic­ité Bruno Le Maire auprès du Figaro.

Pour Carine Sebi, enseignante-chercheuse en économie à la Greno­ble Ecole de Man­age­ment, «main­tenant que la France a réus­si à […] impos­er le nucléaire comme une énergie “verte” au sein de l’Union européenne, il s’agit pour Bercy de suiv­re de près la capac­ité d’EDF, entre­prise défici­taire dont l’État est l’actionnaire unique, à sat­is­faire les engage­ments du en matière de sou­veraineté énergé­tique», explique-t-elle à Vert.

Les éner­gies renou­ve­lables restent au sec­ond plan, alors qu’il est essen­tiel de con­tin­uer leur développe­ment pour attein­dre les objec­tifs énergé­tiques de la France.

De son côté, le min­istre de la Tran­si­tion écologique, Christophe Béchu, reste à son poste, mais il se retrou­ve relégué à l’avant-dernier rang pro­to­co­laire des min­istres. Une dégringo­lade sym­bol­ique qui ne laisse rien présager de bon quant à l’importance accordée aux sujets envi­ron­nemen­taux au sein de ce nou­veau gou­verne­ment.

Les décrets qui vien­dront pré­cis­er les attri­bu­tions et les périmètres d’action de chaque min­istre devraient être pub­liés dans quelques jours.