Work in progress. Série (3/3) : ces jeunes salarié·es de grandes entreprises veulent faire bouger les lignes de l’intérieur. Leur point commun ? À moins de trente ans, elles et ils ont engagé la révolution écologique de leur société. Rencontre avec Pierre Dodeler, 28 ans, consultant au sein du cabinet international en stratégie et management Bain & Company.
À 28 ans, Pierre Dodeler a ce que l’on appelle un parcours exemplaire. Prépa scientifique à Metz, dans sa Moselle natale, puis une formation d’ingénieur à l’école Centrale à Paris. Son diplôme en poche, il rejoint le cabinet international en stratégie et management Bain & Company. Le siège est situé à Boston, aux États-Unis. La société compte 19 000 salarié·es à travers le monde.
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«Je fais du conseil en stratégie auprès de tous les secteurs, des industries de l’énergie aux services financiers, en passant par les industries lourdes ou la grande distribution. On accompagne de grands projets où les ressources internes ne suffisent plus, pour les aider à se transformer, que ce soit pour être plus efficace, lancer un nouvel produit, débarquer dans un nouveau pays», résume Pierre Dodeler. Mais qu’est-ce que cette activité peut bien avoir d’écolo ?
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C’est le combat de La green team, le collectif interne que le jeune consultant a rejoint dès son arrivée : une vingtaine de salarié·es, dont une dizaine sont actifs, sur les 400 que compte l’entreprise à Paris. Si la dynamique et l’engagement sont parfois fluctuants, le collectif a permis de changer quelques usages dans la société. «L’action au plus fort impact a été de revoir et forcer une politique officielle sur les déplacement professionnels. Nous en avons discuté entre nous, avant la validation de la directrice pour rendre le train obligatoire s’il y a moins de trois heures de transport, et fortement encouragé s’il y a moins de quatre heures.»
Un premier pas «plutôt bien accepté et compris par tout le monde», selon Pierre Dodeler. «Il a fallu s’assurer d’avoir le soutien de la direction. Un associé de notre collectif a poussé ces sujets auprès des autres associés. Nous avons ensuite communiqué pour faire comprendre que c’était la nouvelle règle.»
Si cette mesure a permis de réduire le nombre de trajets en avion, les longs déplacements pour des projets internationaux, dont l’impact est le plus lourd, restent monnaie courante. «Une réflexion est en cours pour aller plus loin sur les vols internationaux : vérifier quand il y a besoin de se déplacer chez le client, s’assurer de la présence des interlocuteurs pour supprimer les vols inutiles… Nous fusionnons aussi des déplacements, on reste sur place télétravailler entre deux rendez-vous, plutôt que de faire deux allers-retours en deux semaines.»
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Par ailleurs, le collectif a prêché la bonne parole auprès de tous·tes les consultant·es de l’entreprise, avec des formations obligatoires pour les nouvelles recrues. «Ils sont formés aux grands ordres de grandeur, aux grands chiffres et à la réalité du changement climatique. Ainsi qu’à son impact et aux leviers pour le réduire dans chaque secteur d’industrie.» Une formation de cinq à six demi-journées, complétée par une autre sur l’économie circulaire.
Si ces cycles ne bouleversent pas les usages, «ça fait se poser des questions, ça enclenche des réflexions, et ça peut pousser à l’action ceux qui étaient déjà sensibles au sujet. Je n’ai pas l’impression que ça engendre de gros bouleversements dans les actions de chacun, mais ça permet de mettre des chiffres, des réalités».
Le collectif espère essaimer auprès des entreprises conseillées : «L’étape d’après, c’est de faire le lien avec nos clients. C’est de voir si l’on peut aller plus loin dans nos manières de travailler, et ce qu’on peut influencer chez nos clients». Pas le moindre des défis.
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