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Paris-Tarbes, Paris-Berlin, Marseille-Rome… où en est le train de nuit en France ?

Un bout en train. Entre le retour du Paris-Berlin, la fin prématurée du Paris-Vienne et le renouvellement des lignes nationales, difficile de s’y retrouver lorsque l’on souhaite voyager en train de nuit. Montez à bord, Vert fait le point sur les lignes qui existent.
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Ce ne sera qu’un au revoir, samedi 13 décembre, pour les habitué·es de la ligne de nuit Paris-Berlin (Allemagne). Le train effectue son dernier trajet opéré par une alliance d’entreprises ferroviaires européennes (dont la SNCF). Mais il sera de nouveau sur les rails à compter du 26 mars prochain.

Dans le détail, le groupe d’acteurs des transports a délaissé la liaison deux ans seulement après son lancement et malgré un taux d’occupation de 70%. En cause, l’arrêt des subventions de démarrage versées par l’État français, qui permettaient de maintenir son équilibre économique. Mais la compagnie belgo-néerlandaise European Sleeper a décidé de reprendre le flambeau. Ce nouvel opérateur devrait effectuer trois allers-retours hebdomadaires au départ de la gare du Nord, à Paris, et faire escale à Bruxelles (Belgique), puis à Liège (Belgique) et à Hambourg (Allemagne).

Un train de nuit «Nightjet» de la compagnie autrichienne ÖBB, à Hambourg (Allemagne).

«Cette annonce [d’European Sleeper] est très encourageante. Mais l’essor des trains de nuit ne peut pas reposer uniquement sur des acteurs privés. Nous attendons que le Parlement français subventionne et vote des crédits suffisants pour déployer un réseau ambitieux», plaide Alexis Chailloux, responsable ferroviaire au Réseau action climat (RAC). Dans l’attente d’éventuelles subventions gouvernementales, la compagnie European Sleeper a lancé une campagne de financement participatif pour lever 2,3 millions d’euros.

L’avenir incertain du Paris-Vienne

L’avenir de la liaison Paris-Vienne (Autriche), autre ligne de train de nuit jusqu’ici opérée par une alliance d’entreprises européennes (SNCF comprise), est en suspens. Le dernier trajet aura également lieu le 13 décembre et cette fois il n’y a pas de repreneur. Le Paris-Vienne avait accueilli plus de 36 000 voyageur·ses en 2024.

Avec sa pétition, qui a récolté plus de 94 000 signatures, le collectif Oui au train de nuit espère que la mobilisation citoyenne sauvera la seule ligne ferroviaire directe entre la France et l’Autriche. Son porte-parole, Nicolas Forien, s’inquiète qu’en l’absence de la liaison «les voyageurs se tournent vers l’avion pour leurs déplacements», une option plus rapide qu’un Paris-Vienne en train, qui dure au minimum douze heures. Écologiquement, il n’y a pas photo : le train est en moyenne 80 fois moins polluant que l’avion.

Vêtus de leur pyjama, les membres du collectif se réunissent ce vendredi à la gare de Strasbourg et à la gare de l’Est (Paris) pour lui adresser un au revoir. En 2017, leur mobilisation avait permis de sauver le Paris-Nice, un temps supprimé avant de revenir en 2021. À noter que, si la ligne Paris-Vienne disparait bel et bien, il sera toujours possible de se rendre à Vienne en train de nuit au départ de Bruxelles (Belgique).

Mais tout n’est pas encore perdu. Dans le cadre des discussions parlementaires sur le projet de loi de finances 2026, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et celle des finances ont voté un amendement pour le maintien d’une subvention de la ligne à hauteur de 5,5 millions d’euros. Si le budget 2026 est validé, le train de nuit Paris-Vienne pourrait donc revenir sur les rails.

Des lignes saisonnières

L’un des paradoxes des trains de nuit, c’est qu’ils sont remplis en moyenne à 75%… mais ne sont pas rentables. «L’équilibre économique des lignes de nuit est plus difficile à trouver que celui des lignes de jour : les trains sont un petit peu plus lents et il faut payer du personnel plus longtemps», explique Alexis Chailloux, du RAC. Pour éviter un trop grand déficit, certaines compagnies proposent des trajets nocturnes uniquement lors des périodes les plus touristiques.

À partir du 19 décembre, la société de voyage Travelski, filiale de la Compagnie des Alpes (CDA), relancera ainsi la ligne Paris-Bourg-Saint-Maurice (Savoie) pour amener les voyageur·ses en huit heures au plus près des pistes de ski. Au total, 14 allers-retours à bord du Travelski Night Express sont prévus jusqu’au 20 mars. Les prix commenceront à 110 euros pour un billet aller. Des tickets combinant le voyage, l’hébergement et le forfait de ski seront aussi proposés à partir de 800 euros.

À bord du train de nuit Paris-Toulouse. © Francois Laurens/Hans Lucas via AFP

Cet été, c’est la liaison Marseille-Rome (Italie) qui reprendra du service. Après avoir affiché complet en 2025, la société italienne Treni Turistici Italiani a annoncé que le vintage Espresso Riviera fera son retour en 2026, avec davantage de trains hebdomadaires et une période d’exploitation prolongée, de juin à septembre. Les billets ne sont pas encore disponibles à la vente mais, à titre indicatif, les prix commençaient autour de 95 euros cet été 2025.

Paris-Ravello pour 10 000 euros

Comme l’offre publique pour voyager en train de nuit en Europe depuis la France se fait rare, des entreprises ont su en tirer parti. C’est le cas de Belmond, succursale du groupe de luxe LVMH, qui propose de rejoindre Ravello, sur la côte amalfitaine (Italie), depuis Paris. Et ce, à bord du Venice Simplon-Orient-Express, un train historique du 20ème siècle aux inspirations Art déco. Au programme : diner-concert, cocktails et réveil avec vue sur les criques et les villages de la côte méditerranéenne. Le tout pour la modique somme de… 10 000 euros par personne.

«Ces lignes ne sont en rien des alternatives à l’avion. Ce n’est pas du transport, mais une croisière ferroviaire», explique Nicolas Forien. Les plus fortuné·es montent à bord pour vivre une expérience – pas par souci écologique. Une fois à destination, le voyage se poursuit dans la même démesure avec une croisière privée dans la mer Tyrrhénienne, suivie d’un gala autour d’une piscine à débordement et de deux nuits dans un hôtel cinq étoiles.

Une ligne de nuit Paris-Venise, accessible au plus grand nombre, était en place jusqu’en 2020, opérée par la compagnie privée Thallo. Supprimée après la pandémie de Covid-19, elle transportait environ 300 000 voyageur·ses par an. «Il serait plus que nécessaire de la remettre en route pour réellement remplir une fonction de transport», ajoute le porte-parole du collectif Oui au train de nuit.

Des lignes internes bientôt renforcées ?

Pour se déplacer à l’intérieur de la France, huit lignes de train de nuit circulent plusieurs fois par semaine, toutes au départ de Paris et à destination de Nice (Alpes-Maritimes), Briançon (Hautes-Alpes), Cerbère (Pyrénées-Orientales), Toulouse (Haute-Garonne), Latour-de-Carol (Pyrénées-Orientales), Tarbes (Hautes-Pyrénées), Rodez (Aveyron)/Albi (Tarn) et Aurillac (Cantal). Ces trains Intercités sont subventionnés par l’État et les collectivités territoriales pour aider au désenclavement des territoires. D’après un rapport du RAC, plus d’un million de personnes ont emprunté ces lignes en 2024. Mais le réseau est vieillissant et pas «suffisamment dense pour faire concurrence à l’avion ou à la voiture», pointe Alexis Chailloux.

Pour moderniser les trains de nuit existants, l’État a lancé en février 2025 un appel d’offres portant sur la commande de 180 nouvelles voitures-couchettes. Dans le cadre du projet de loi de finances 2026, un amendement a été adopté et propose de porter cette commande à 340 rames. Cela permettrait de renouveler le matériel actuel et d’ouvrir de nouvelles lignes, notamment transversales – qui ne passent pas par Paris. On peut citer Nice-Bordeaux ou Metz-Strasbourg-Nice. Si le budget 2026 est voté en l’état, les premières nouvelles voitures-couchettes arriveront en 2030 et leur déploiement s’étalera sur quinze ans.

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