L'étude

L’UFC-Que choisir identifie de nombreux pesticides dangereux pour la santé sur les fleurs de la Saint-Valentin

C’est le bouquet ! Roses, gerbéras, chrysanthèmes… Les fleurs coupées contiennent de nombreux pesticides toxiques pour celles et ceux qui les vendent, révèle une analyse de l’UFC-Que Choisir, ce vendredi. Les bouquets français sont-ils aussi nocifs que ceux importés ? Vert fait le point.
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Les fleurs sont dix fois plus contaminées par les pesticides que nos fruits et légumes. «Dans l’alimentaire, il y a une limite maximum quant à la quantité de pesticides autorisée, mais dans l’ornemental, il ne peut pas y avoir de risques de non-conformité, puisqu’il n’y a pas de normes», explique à Vert François Veillerette, porte-parole de l’association Générations futures.

En ce vendredi de Saint-Valentin, l’UFC-Que choisir révèle les résultats de son analyse de 15 bouquets de fleurs aux origines variées. Achetés sur internet, en boutique ou dans la grande distribution, tous sont contaminés en moyenne par 22 résidus de pesticides, dont douze substances avérées dangereuses pour la santé, ou suspectées de l’être.

Les fleuristes sont plus exposé·es aux pesticides que les agriculteur·ices. © Ellicia/Unsplash

En 2023 le fonds d’indemnisation des victimes des pesticides avait reconnu le lien entre la leucémie d’Emmy, morte à l’âge de 11 ans, et l’exposition professionnelle de sa mère, Laure Marivain, représentante en fleurs chez un grossiste (notre article). Deux ans plus tard, l’État a missionné l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) pour réaliser une expertise sur les risques de l’exposition des fleuristes aux pesticides.

Parmi ces substances, on trouve par exemple le thiacloprid, suspecté d’être cancérogène et présumé toxique pour le système reproducteur par les agences réglementaires européennes. L’UFC note également la présence de nombreux perturbateurs endocriniens (qui modifient le système hormonal) comme le cyprodinil ou le buprofezin.

Certains résidus trouvés dans les fleurs proviennent de molécules interdites dans l’Union européenne. L’UFC-Que choisir en a identifié dans deux tiers de ses bouquets. Et pour cause : 80% des fleurs du marché français sont importées de pays aux normes bien moins strictes, comme le Kenya ou la Colombie.

Les fleuristes en première ligne

Une étude scientifique belge, publiée en 2019, montre le risque que représentent les pesticides pour les fleuristes. Selon cette analyse, ces travailleur·euses sont plus vulnérables que les agriculteur·ices en raison du cocktail de fleurs différentes auquel elles et ils sont exposé·es. Ces salarié·es n’ont aucun équipement de prévu pour s’en protéger et sont très peu informé·es sur la menace que constitue leur environnement de travail.

Selon les chercheur·euses belges, les urines des fleuristes contiennent en moyenne, aux périodes d’activité les plus intenses (comme à la Saint-Valentin, qui peut représenter jusqu’à 20% de leur chiffre d’affaires annuel), deux fois plus de résidus de pesticides que le reste de la population.

«La prise de conscience sur l’exposition aux pesticides est très récente, pour les fleuristes eux-mêmes, le grand public, mais également pour les pouvoirs publics», indique à Vert l’association Phyto-victimes.

Les fleurs françaises, elles aussi toxiques

Parmi les bouquets analysés par l’UFC-Que choisir, celui d’origine française n’est pas épargné par la contamination. Quatorze résidus de pesticides y ont été retrouvés, dont sept présentent un danger pour la santé, avéré ou suspecté (perturbateur endocrinien, cancérigène ou encore délétère pour la fertilité ou le fœtus).

Et si vous souhaitez acheter des bouquets garantis sans pesticides, la solution n’est pas si simple. La filière florale précise à l’UFC-Que choisir que certaines fleurs sont moins traitées que les autres, par exemple les callas, giroflées, célosies, mufliers et œillets. Mais entre les espèces les plus achetées (roses, chrysanthèmes et gerbéras), l’UFC n’a pas relevé de différences notables.

Des labels plus ou moins protecteurs

Certains labels existent, mais ne revendiquent pas l’absence d’utilisation de ces produits phytosanitaires. Vous pouvez retrouver, sur cette carte, les fleuristes dits écoresponsables ou labellisés. Attention toutefois, ces professionnel·les ne vendent pas pour autant des fleurs zéro chimie.

🌻Fleur de France. C’est le label qui garantit l’origine nationale des fleurs, et donc l’absence de pesticides interdits au sein de l’Union européenne. Sans cette norme, il faut faire confiance à son fleuriste pour la provenance de vos bouquets, car contrairement aux fruits et légumes, son indication n’est pas obligatoire.

🌷Fairtrade. Ce label n’est pas gage de fleurs dénuées de produits toxiques et le bouquet fairtrade analysé par l’UFC était tout aussi contaminé que les autres. Il interdit toutefois certaines des substances les plus dangereuses et engage au respect d’un certain nombre de règles de protection de la santé des travailleur·euses (port d’équipements, examens médicaux réguliers…).

🌹Les fleuristes écoresponsables. «Ce n’est pas un label», relève Émeline Declerck, présidente de l’association les Fermes florales bios. «Les fleuristes se désignent comme tels lorsqu’ils achètent un pourcentage de fleurs françaises, ou arrivent à faire du 100% fleurs hexagonales – ou quand ils font moins de déchets plastique ou de mousse florale.» Des pratiques moins impactantes sur l’environnement, mais pas forcément sans pesticide.

Des fleurs bio difficiles à trouver

L’agriculture bio, comme pour les fruits et légumes, garantit l’absence d’utilisation de pesticides et insecticides chimiques. Mais en horticulture «la filière bio est très peu structurée», explique Émeline Declerck. Elle note toutefois que «l’opinion publique commence à s’y intéresser». Un petite révolution, alors que «jusqu’à très récemment, dans les mentalités, local voulait dire bio. Certes, il est vrai que les petites fermes florales traitent peu ou pas du tout. Mais le fait qu’un fleuriste vende de la tulipe française, produite à tel endroit, ne garantit pas une absence de traitement.»

En hiver, les fleurs bio sont encore plus difficile à trouver chez les petit·es horticulteur·ices qui n’ont pas de serre chauffante. Seules les anémones plantées tôt, des renoncules ou des fleurs en provenance d’Italie plutôt que de France sont disponibles.

Bonne nouvelle malgré tout, vous pouvez vérifier s’il y a des horticulteur·ices bio près de chez vous sur ce site et leurs fleurs ne sont pas plus chères que les autres.

La meilleure manière d’éviter les pesticides dans les fleurs est encore de faire évoluer la législation qui encadre leur production et leur vente. L’ONG de lutte contre les pesticides PAN-Europe milite pour des normes juridiques qui fixent une limite maximum de résidus acceptés dans les bouquets. L’UFC-Que choisir, elle, réclame également que leur provenance soit obligatoirement précisée sur les étiquettes.

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