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Les emballages jetables dans le viseur de l’Union européenne

Emballer, c'est jeter ! Colis, gobelets à café, boîtes de camembert… le Parlement européen doit voter ce mercredi de nouvelles règles pour réduire les emballages en Europe. Les discussions ont été menées sous haute pression.
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Emballer, c’est jeter ! Col­is, gob­elets à café, boîtes de camem­bert… le Par­lement européen doit vot­er ce mer­cre­di de nou­velles règles pour réduire les embal­lages en Europe. Les dis­cus­sions ont été menées sous haute pres­sion.

Le phénomène explose : en 2021, les embal­lages ont représen­té 84 mil­lions de tonnes de déchets en Europe — con­tre 66 mil­lions en 2009 — dont 40% de papi­er et car­ton et 19% de plas­tique. Chaque Européen·ne a ain­si généré en moyenne près de 189 kilo­grammes de déchets d’emballages. Sans mesures sup­plé­men­taires, l’U­nion européenne (UE) estime qu’on pour­rait attein­dre 209 kg par per­son­ne en 2030.

Quelles pratiques l’UE veut-elle changer  ?

Les eurodéputé·es votent sur un règle­ment pro­posé en novem­bre 2022 par la Com­mis­sion européenne. Après ce vote, des négo­ci­a­tions avec le Con­seil européen (les chefs d’É­tats ou de gou­verne­ments) vont s’engager, et le règle­ment pour­rait être adop­té défini­tive­ment — et donc être applic­a­ble dans tous les États — avant les élec­tions européennes de juin 2024.

La nou­velle lég­is­la­tion européenne vise à inter­dire la vente de sacs en plas­tique très légers — sauf pour des ali­ments en vrac ou pour des raisons d’hy­giène — mais aus­si éjecter des embal­lages ali­men­taires les pol­lu­ants «éter­nels» (Vert), ces sub­stances qui ne se dégradent que très lente­ment dans l’environnement, ou le bis­phénol A, un per­tur­ba­teur endocrinien.

Autre point impor­tant du texte : la pos­si­bil­ité doit être lais­sée à toutes et tous d’amen­er ses pro­pres con­tenants pour emporter un plat dans un restau­rant. Dans les fast-foods, les récip­i­ents devront devenir réu­til­is­ables pour le ser­vice à table. C’est déjà théorique­ment le cas en France pour les repas sur place dans les restau­rants de plus de 20 cou­verts.

Enfin, ce règle­ment devrait fix­er des objec­tifs de réem­ploi ou de recy­clage**, ce qui implique que les matéri­aux con­tenus dans les embal­lages devront être col­lec­tés dans des fil­ières de déchets séparées. Une con­signe sera créée pour les bouteilles plas­tiques et autres canettes métalliques.

Qui s’y oppose ?

Rap­por­teuse du texte, la cen­triste Frédérique Ries promet rien de moins qu’une «refonte com­plète du marché». Mais les asso­ci­a­tions No Plas­tic in My Sea, Surfrid­er Foun­da­tion Europe et Zero Waste France, par­lent plutôt d’«une occa­sion man­quée pour sor­tir véri­ta­ble­ment du tout-jetable», car le texte «manque cru­elle­ment d’ambition sur la réduc­tion des déchets et les objec­tifs de mise sur le marché d’emballages réem­ploy­ables». Elles craig­nent notam­ment que le texte soit moins fort que la loi française, au risque de remet­tre en ques­tion ses avancées.

Car le texte a fait l’ob­jet d’un lob­by­ing impor­tant par un secteur de l’emballage qui pèse 355 mil­liards d’euros de chiffre d’af­faires dans l’Union européenne en 2018. Pour les représentant·es de la restau­ra­tion rapi­de, la fin des embal­lages à usage unique serait un cal­vaire. «Les lob­bies des fast foods, McDon­ald’s en tête, ne sont pas d’ac­cord» avec le règle­ment dis­cuté, selon l’eu­rodéputée écol­o­giste Marie Tou­s­saint.

Selon le média spé­cial­isé Eurac­tiv, «les lob­by­istes ont arrêté les eurodéputés dans les couloirs, les bars, ils ont même accroché des pub­lic­ités et des tracts» sur les portes des bureaux, en dépit de nou­velles règles sur la trans­parence au Par­lement. Pas­cal Can­fin, prési­dent (Renew) de la com­mis­sion Envi­ron­nement du Par­lement européen, a même dénon­cé publique­ment une «cam­pagne de lob­by­ing qui ne recule devant rien», esti­mant que les entre­pris­es n’hési­taient pas à «propager des infor­ma­tions erronées». Leur but : dis­créditer le réem­ploi en s’ap­puyant sur des études con­testées, avec l’idée que les embal­lages réu­til­is­ables seraient pires que les embal­lages jeta­bles en papi­er ou en car­ton. Les asso­ci­a­tions rétorquent que c’est faux, et que les embal­lages réem­ploy­ables per­me­t­traient de créer 600 000 emplois en Europe.

Pho­to d’illustration : Julia M Cameron / Pex­els