Le vert du faux

Acheter en vrac permet-il vraiment de réduire les emballages ?

Entre le «février zéro plastique» et «le mois du vrac» en mars, les consommateur·ices sont appelé·es à acheter des produits sans emballage. Et à raison. Celui-ci permet de réduire drastiquement les déchets, à condition de réutiliser ses contenants.
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Si le vrac a envahi les rayons de 80% des hyper­marchés et de 400 enseignes spé­cial­isées, la fin de la crise san­i­taire a porté un coup à son développe­ment. «Le vrac a bien prof­ité du con­fine­ment, où l’on avait le temps de cuisin­er et faire soi-même, on ne revient que main­tenant à une nou­velle crois­sance», explique Célia Ren­nes­son, direc­trice du réseau Vrac qui fédère les professionnel·les du secteur. La vente sans embal­lage tente d’inciter les consommateur·ices à mod­i­fi­er leurs habi­tudes de con­som­ma­tion. Con­traire­ment aux pro­duits stan­dard­is­és, le vrac demande de choisir les quan­tités achetées et néces­site de penser aux con­tenants util­isés. L’analyse du cycle de vie des pro­duits démon­tre que les bien­faits écologiques du vrac dépen­dent aus­si de ces petits gestes.

Deux tiers des emballages évités en amont

Déjà avant la mise en ray­on, le vrac per­met de réduire de deux tiers en moyenne la masse des embal­lages pro­duits, selon une étude de l’Agence de la tran­si­tion écologique (Ademe) menée sur 10 pro­duits. En mesurant les impacts à chaque étape de la chaîne de valeur, l’établissement pub­lic mon­tre que le vrac est bien plus effi­cace pour les liq­uides dont le con­di­tion­nement en verre est plus lourd. L’huile d’olive bat le record en divisant par 16 la quan­tité d’emballages néces­saire.

À l’inverse, l’écart se resserre pour les pro­duits secs qui utilisent des embal­lages légers. Le con­di­tion­nement du riz en vrac ou en por­tions indi­vidu­elles néces­site les mêmes mass­es d’emballages. Or, des con­tenants d’achat et de stock­age s’ajoutent après pour le pro­pos­er en vrac dans les rayons, ren­dant sa com­mer­cial­i­sa­tion plus gour­mande en déchets. Pour y remédi­er, le réseau Vrac tente de généralis­er l’utilisation de bacs réu­til­is­ables pour les commerçant·es à tra­vers un «Hub Vrac».

Un bénéfice à condition de réutiliser les contenants

Si cer­tains pro­duits ne per­me­t­tent pas de réduire les embal­lages lors de la com­mer­cial­i­sa­tion, ce retard peut être rat­trapé lors du cycle de con­som­ma­tion par l’utilisation de con­tenants réem­ployés. «La vente en vrac per­met de réduire de 100% les déchets plas­tiques à con­di­tion de réu­tilis­er au moins 10 fois chaque con­tenant», a ain­si cal­culé l’association WWF en 2020. L’avantage est mince lorsque le papi­er kraft dis­tribué en super­marché est jeté après util­i­sa­tion. «Cela per­met quand même aux gens qui n’ont pas l’habitude de s’y met­tre», rel­a­tivise Célia Ren­nes­son. «Le vrac ne doit pas être syn­onyme d’achats mais de réu­til­i­sa­tion des embal­lages que l’on jetait avant. C’est ce que l’on fait déjà avec les fruits ou légumes», pour­suit la respon­s­able du réseau Vrac.

Depuis 2017, son asso­ci­a­tion tente ain­si d’accompagner les vendeurs pour enrichir leurs offres, dévelop­per l’accompagnement des clients, et pro­fes­sion­nalis­er la mise en vente pour répon­dre aux impérat­ifs san­i­taires. La loi Cli­mat et résilience oblige les super­marchés à con­sacr­er au moins 20% de leurs pro­duits en vrac d’ici 2030. «Avant c’était inimag­in­able pour des grandes mar­ques de s’y met­tre, elles avaient peur de per­dre le goût de leurs pro­duits. Main­tenant tout le monde com­mence à opér­er le tour­nant», se réjouit Célia Ren­nes­son. Porté par l’engouement du pub­lic, le vrac s’étend désor­mais au non-ali­men­taire, notam­ment pour les pro­duits cos­mé­tiques ou ménagers.