Décryptage

La tension monte autour des PFAS, les «polluants éternels»

  • Par

Les choses en PFAS. Propo­si­tion de loi pour les ban­nir, man­i­fes­ta­tions de salarié·es, tri­bune de sci­en­tifiques : les PFAS, ces sub­stances per­flu­o­roalkylées et poly­flu­o­roalkylées forte­ment pol­lu­antes que l’on trou­ve partout autour de nous, sont sous le feu des pro­jecteurs comme jamais cette semaine.

👉 Ce jeu­di matin, l’Hémicycle de l’Assemblée nationale étudie une propo­si­tion de loi déposée par le député écol­o­giste Nico­las Thier­ry. Amendé lors de son pas­sage en com­mis­sion du Développe­ment durable le 27 mars, le texte prévoit d’interdire de fab­ri­quer, d’importer et de met­tre sur le marché une série de pro­duits con­tenant des PFAS (usten­siles de cui­sine, cos­mé­tiques, tex­tiles d’habillement, fart pour le ski) à par­tir de 2026, et pour le reste des usages à hori­zon 2030. «Les inter­dic­tions visées dès 2026 ont spé­ciale­ment été choisies car il existe déjà des alter­na­tives», dit à Vert Pauline Cer­van, chargée de mis­sions sci­en­tifiques et régle­men­taires pour l’association Généra­tions futures. La propo­si­tion vise aus­si à inté­gr­er cer­tains PFAS dans le con­trôle san­i­taire des eaux pota­bles avant 2026 — date à laque­lle il devien­dra oblig­a­toire partout en Europe. Enfin, le texte veut instau­r­er le principe de pol­lueur-payeur pour inciter les indus­triels à réduire leurs rejets et à financer le traite­ment et la sur­veil­lance des pol­lu­tions.

👉 Cette propo­si­tion de loi a fait bouil­lir l’entreprise Tefal, fil­iale du groupe Seb. Le PTFE (polymère du tétra­flu­o­roéthylène, alias le Téflon) qu’elle utilise dans ses poêles anti-adhé­sives, pour­rait faire par­tie des sub­stances inter­dites d’i­ci à 2026. Mer­cre­di après-midi, la direc­tion, des élu·es, syn­di­cal­istes et salarié·es du groupe se sont rassemblé·es à côté de l’Assemblée nationale pour réclamer le retrait de la propo­si­tion de loi écol­o­giste.

Le slo­gan de la man­i­fes­ta­tion : Touche pas à ma poêle ! © Juli­ette Mullineaux/Vert

Toutes et tous marte­laient les argu­ments de la direc­tion : 3 000 emplois français seraient men­acés dans le groupe Seb, alors que les sci­en­tifiques auraient démon­tré que le PTFE est sans risque. Stéphane Pan­nek­oucke, coor­di­na­teur syn­di­cal, ajoute : «Ça ne laisse pas assez de temps pour met­tre en place les alter­na­tives». Pour Math­ieu Ben Bra­ham, chimiste chargé de mis­sion sci­en­tifique et règle­men­taire pour Généra­tions futures, «ce ne sont pas les régle­men­ta­tions qui met­tent en dan­ger l’emploi, mais le refus des indus­triels de s’y con­former».

👉 Mer­cre­di encore, dans une tri­bune au Monde, des sci­en­tifiques ont bal­ayé les argu­ments de Seb sur l’innocuité du Téflon, rap­pelant que tous les types de PFAS font peser de nom­breux risques sur la san­té humaine : «À tra­vers une cam­pagne de mails internes, le groupe SEB et Tefal cer­ti­fient que les flu­o­ropolymères “ne présen­tent pas de risque pour l’environnement et la san­té humaine” et appel­lent les employés à venir man­i­fester sous la men­ace d’une perte d’emploi. […] nous aler­tons sur cette manip­u­la­tion fraud­uleuse et dan­gereuse des résul­tats sci­en­tifiques». Puisqu’il en existe des mil­liers de vari­antes, et que la sci­ence n’arrive pas à éval­uer assez vite les risques liés à chaque sub­stance, les auteur·rices de la tri­bune appel­lent à con­sid­ér­er tous les PFAS comme une seule classe de pro­duits chim­iques et à les inter­dire.