Pas cap’. Les 100 milliards d’euros consacrés par la politique agricole commune (PAC) à la lutte contre la crise climatique n’ont eu aucun impact sur les émissions de ce secteur depuis 2010.
Alors que les négociations sont en cours pour écrire la future PAC pour la période 2023–2027, la cour des comptes européenne (ECA) vient de publier un bilan très critique de la période qui s’achève. Son principal enseignement : au cours de l’édition 2014–2020, plus du quart du budget de la PAC – soit plus de 100 milliards d’euros – a été alloué à la lutte contre le changement climatique. Pourtant, les « émissions de gaz à effet de serre d’origine agricole n’ont pas baissé depuis 2010 », note le rapport.
Première raison : les émanations de CO2 liées à l’élevage sont restées stables. La PAC, note le rapport, n’incite pas à réduire les cheptels. Pis, elle fait la promotion des produits animaux, dont la consommation n’a pas baissé depuis 2014. L’élevage représente la moitié des émissions de l’agriculture européenne. Par ailleurs, les émissions dues aux engrais chimiques, aux lisiers et fumiers (un tiers du total) ont crû entre 2010 et 2018.
Autre problème majeur, soulevé par l’ECA : la PAC encourage les exploitant·e·s à s’établir sur des tourbières. Ces vastes zones humides, qui stockent des quantités faramineuses de méthane – puissant gaz à effet de serre – sont asséchées, puis converties en terres agricoles. Libérant ainsi le méthane dans l’atmosphère. Le changement d’affectation des sols représente 14% des émissions de l’agriculture. Enfin, comme l’avait déjà relevé l’ECA en 2016, la Commission européenne surestime largement les financements considérés comme « verts » pour atteindre ce total de 100 milliards d’euros.
La PAC constitue pourtant un levier majeur pour réduire l’empreinte carbone de l’Union européenne, qui vient de se fixer comme objectif la baisse de 55% de ses émissions d’ici 2030, pour atteindre la neutralité carbone en 2050.