Analyse

Futurs énergétiques de RTE : la France à l’heure des choix

Réseau pas réseau. Le gestionnaire du réseau électrique français RTE a examiné six façons de se passer des énergies fossiles, dont la France dépend encore à 60%. Avec ou sans nucléaire, les énergies renouvelables y sont indispensables.
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Com­mandés il y a deux ans par le gou­verne­ment, les « Futurs énergé­tiques 2050 » présen­tés lun­di par RTE étaient aus­si très atten­dus par l’ensem­ble de la classe poli­tique en pleine cam­pagne prési­den­tielle. « Ces scé­nar­ios ren­voient à des choix de société, c’est au poli­tique de choisir », a en effet expliqué à la presse Xavier Piechaczyk, le prési­dent du Direc­toire. Le ou la future locataire de l’Élysée devra se décider rapi­de­ment car « quel que soit le scé­nario choisi, il y a urgence à se mobilis­er ». Le secteur de l’én­ergie représente à lui seul 70% des émis­sions de gaz à effet de serre du pays.

La tra­jec­toire prévue dans la Stratégie nationale bas-car­bone, la feuille de route du gou­verne­ment pour attein­dre la neu­tral­ité car­bone d’i­ci 2050. © RTE

La décar­bon­a­tion du sys­tème devra pass­er par une baisse sen­si­ble de la con­som­ma­tion et une élec­tri­fi­ca­tion des usages qui reposent aujour­d’hui sur les éner­gies fos­siles : pas­sage à la voiture élec­trique et rem­place­ment des chauffages au gaz et fioul par des pom­pes à chaleur, par exem­ple. La con­som­ma­tion glob­ale d’én­ergie devrait chuter de 40% et la fac­ture d’im­por­ta­tion d’én­ergie fos­sile – qui varie entre 30 et 70 mil­liards d’eu­ros chaque année – tombera à zéro. En revanche, la con­som­ma­tion d’élec­tric­ité aug­mentera, de 16 à 60%, selon les hypothès­es. RTE a exam­iné plus pré­cisé­ment la piste médi­ane qui prévoit une hausse de 35%. A par­tir de là, le ges­tion­naire a élaboré six scé­nar­ios qui vont du 100% renou­ve­lable à une répar­ti­tion 50/50 avec le nucléaire.

Les six scé­nar­ios présen­tés par RTE, du plus renou­ve­lable au plus nucléaire. Cliquez sur l’im­age pour l’af­fich­er en grand. © RTE

C’est là que les choses se cors­ent, car il s’ag­it de décider du mix élec­trique des prochaines généra­tions. « La majorité des sources de pro­duc­tion qui ali­menteront la France en 2050 n’existent pas aujourd’hui », a rap­pelé Xavier Piechaczyk. La plu­part des cen­trales nucléaires actuelles fer­meront au cours de la décen­nie 2040. RTE a déjà prou­vé, dans une étude décryp­tée par Vert, qu’un mix 100% renou­ve­lable est pos­si­ble. Toute­fois, ce ne serait pas le choix le plus économique, com­paré à la relance d’un pro­gramme nucléaire qui pour­rait représen­ter entre 25 et 50% du mix, mais qui néces­sit­erait de con­stru­ire entre 8 et 14 nou­veaux réac­teurs EPR. D’un scé­nario à l’autre, les coûts ne seront pas les mêmes : en 2060, ceux-ci iraient de 59 mil­liards d’eu­ros par an pour le scé­nario le plus nucléarisé, à 80 mil­liards pour le scé­nario tout-renou­ve­lable le plus axé sur le développe­ment du solaire.

Les coûts annuels en fonc­tion de cha­cun des scé­nar­ios d’i­ci 2060 © RTE

« Se pass­er de nou­veaux réac­teurs implique des rythmes de développe­ment des éner­gies renou­ve­lables plus rapi­des que ceux des pays européens les plus dynamiques », con­state aus­si l’é­tude. En clair, la France est par­tie trop tard et la marche est désor­mais trop élevée. Dans tous les cas, les renou­ve­lables devront représen­ter au min­i­mum 50% du mix élec­trique, ce qui implique de tripler le parc éolien ter­restre ou de mul­ti­pli­er par six le parc pho­to­voltaïque. 

Les écol­o­gistes regret­tent que le scé­nario le plus économe en énergie n’ait pas été présen­té — il ne sera exam­iné qu’en 2022 — car les con­clu­sions seraient sans doute dif­férentes. La semaine dernière, négaWatt avait démon­tré que le 100% renou­ve­lable était atteignable à con­di­tion de miser beau­coup plus sur la sobriété.