En marche carrière. Soutenus par les Soulèvements de la terre, cinq collectifs lancent un appel à un rassemblement commun ce week-end pour lutter contre le développement des carrières de sable et la bétonisation de la métropole nantaise.
En Loire-Atlantique, quatre mobilisations contre des projets d’extraction se sont réunies sous la bannière «Fin de carrière 44». À Saint-Colomban, au sud de Nantes, le collectif La Tête dans le sable lutte contre l’extension de deux carrières de sable. Idem à Soudan, plus au nord, où 44 hectares de terres agricoles sont menacés par l’ouverture d’une autre carrière de sable, dénonce l’association Le cri du bocage. A l’ouest, les membres de Carrière du Tahun militent contre sa ré-exploitation. Enfin, à une dizaine de kilomètres, le collectif Camil refuse l’installation d’une usine à bitume, initialement prévue pour le projet avorté d’aéroport à Notre-Dame des Landes.
Depuis deux ans, ces collectifs coopèrent pour faire entendre leurs voix. Tous militent contre l’artificialisation de la métropole nantaise, alimentée par les carrières de granulat (sable, gravier, cailloux…). «Nos territoires de campagnes sont des réservoirs pour alimenter la bétonisation de la ville», résume Sylvain Jallot, membre de l’association La tête dans le sable.
Protéger les nappes phréatiques
L’extraction de sable a un lourd impact sur l’environnement. Elle est le premier maillon de l’industrie du béton, l’une des plus polluantes au monde. D’après Valérie Masson-Delmotte, coprésidente du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), si l’industrie du béton était un pays, elle serait le troisième plus émetteur de gaz à effet de serre derrière la Chine et les Etats-Unis. Pour respecter l’Accord de Paris, l’industrie doit se décarboner.
Dans ce contexte, «étendre de nouvelles carrières, c’est comme ouvrir un puits de pétrole, ça n’a plus de sens», s’exaspère Sylvain Jaillot, de la Tête dans le sable. Son association se mobilise aussi contre le maraîchage intensif en expansion à Saint-Colomban, qui utilise une partie du sable des carrières pour mécaniser sa production.
L’extraction est aussi critiquée pour ses dégâts sur les nappes phréatiques. À Saint-Colomban, celle qui alimente le lac de Grand-Lieu se trouve aux abords immédiats des carrières. À force de creuser, l’eau de la nappe finit par affleurer à la surface. L’association a chiffré l’évaporation de l’eau à un million de mètres cubes par an – l’équivalent de la consommation annuelle de 30 000 habitant·es.
De même, l’ancienne carrière du Tahun, désormais remplie d’eau, est devenue un lieu de promenade. Mais si le préfet accepte la demande de réouverture de la carrière, «le lac sera vidé pour y mettre des déchets de bâtiments. C’est un projet d’une autre époque», argumente Jean-Luc Vrignon, membre de l’association Carrière du Tahun, qui rappelle l’importance de la réserve d’eau en cas d’incendie dans les forêts avoisinantes.
Lutter contre l’artificialisation des sols
A vélo, en tracteur ou en voiture, deux convois de manifestation se dirigeront vers Nantes dimanche. Le premier partira de Héric, au nord de la métropole et le second de Saint-Colomban, au sud. «On reproduit le trajet d’un grain de sable de nos campagnes vers la ville», explique Sylvain Jaillot, de La tête dans le sable.
La veille, une table ronde sur les projets industriels se tiendra dans la Zone à défendre (Zad) de Notre-Dame-des-Landes, pour sensibiliser à la question de l’extraction de granulats et la bétonisation de la métropole. «La focale de cette mobilisation, c’est l’artificialisation des sols», souligne Jean-Luc Vrignon. On veut montrer à la Ville que leurs grands projets ont des conséquences sur les terres». L’appel de «Fin de carrière 44», signé par une quarantaine d’associations, de syndicats et de partis politiques réclame un moratoire sur les carrières de sable, granulat, et usines à bitume.
À Nantes, une cinquième mobilisation rejoindra le cortège final. Celle du personnel hospitalier opposé au projet d’un nouveau CHU sur l’île de Nantes, décrié pour la baisse du nombre de lits, la suppression de 400 emplois et le coût environnemental d’une construction complète. Une convergence des luttes sociales et environnementales qui s’est faite par hasard, mais qui relève du bon sens, estime Sylvain Jaillot : «Là aussi, l’utilisation du béton est absurde».
Les opposant·es à l’industrie du ciment payent parfois cher leur engagement. Lundi, 15 personnes avaient été placées en garde à vue, suspecté·es d’avoir participé à une action contre une cimenterie Lafarge au nord de Marseille en novembre dernier. Elles et ils ont été finalement remis·es en liberté jeudi, après de lourdes investigations, sans qu’aucune charge n’ait, pour l’heure, été retenue.
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