En déroute. Présentée par Elisabeth Borne, mercredi 26 avril, la feuille de route du gouvernement pour les prochains mois revient sur l’objectif de Zéro artificialisation nette en 2050. En quoi consiste-t-il et pourquoi fait-il débat ?
Lors de son allocution à la presse, mercredi 26 avril, la Première ministre Elisabeth Borne a évoqué l’importance de «trouver d’ici à l’été un meilleur dispositif de territorialisation» et «d’adaptation du zéro artificialisation nette». Issu de la Convention citoyenne pour le climat et inscrit dans la loi Climat et résilience de 2021, le principe de «zéro artificialisation nette» (ZAN) est censé mettre fin au grignotage des espaces naturels ou agricoles par l’activité humaine. Première menace sur la biodiversité, l’étalement urbain devra être réduit de moitié d’ici 2030 et atteindre zéro d’ici 2050. A cette date, les surfaces artificialisées devront être «compensées» par des espaces rendus à la nature.
Un objectif clair pour une définition qui fait débat
À l’origine, l’objectif de zéro artificialisation nette a réussi l’exploit de mettre d’accord les associations de défense de l’environnement, les agriculteur·ices et les pouvoirs publics. Pourtant, à mesure que les décrets tombent et précisent ce que l’on entend vraiment par «artificialisation», les positions se tendent. D’après la nomenclature, une carrière est comptabilisée comme un espace «naturel», alors que la pelouse d’un parc ne l’est pas. Dès lors, à quoi bon détruire un parking pour y installer un jardin urbain si celui-ci ne compte pas comme une désartificialisation?, s’interrogent les collectivités. Certain·es élu·es déplorent également les limitations aux nouvelles constructions alors que leur commune manque de logements. En juin 2022, l’association des maires de France a ainsi déposé deux recours au Conseil d’Etat à l’encontre de ces décrêts qui, selon elle, viennent «mettre un coup de frein aux dynamiques locales engagées en faveur de la protection des sols».
De son côté, le Sénat a adopté en première lecture, le 16 mars dernier, une nouvelle proposition de loi pour garantir notamment à chaque commune un «plancher de droits» à artificialiser d’un hectare minimum et enjoint l’Assemblée nationale à faire de même. Le discours d’Elisabeth Borne du 26 avril laisse entendre que le gouvernement serait prêt à retenir certaines de leurs revendications.
Dans tous les cas, le ZAN n’empêche pas la réalisation de nouveaux projets. Le contournement de Rouen par autoroute ‑objet d’un rassemblement du 6 au 8 mai prochains- prévoit par exemple de «reboiser, restructurer ou améliorer» quelques centaines d’hectares de bois, milieux naturels et terrains agricoles en contrepartie des milieux affectés. De ZAN, certaines associations écologistes appellent ainsi à passer au ZAB, pour «zéro artificialisation brute», soit ne plus autoriser aucun projet d’étalement urbain en rendant leur compensation impossible.
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