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Coupe du monde « neutre en carbone » : les mauvais calculs du Qatar et de la Fifa

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Car­ton rouge. Incroy­able mais vrai, les organ­isa­teurs de la Coupe du monde de foot­ball ten­tent tou­jours de faire croire que la com­péti­tion n’aura aucun impact sur le cli­mat. Manque de chance, ils ne sont pas les seuls à avoir sor­ti la cal­culette.

La coupe du monde la plus extrav­a­gante de l’histoire du foot­ball a débuté dimanche au Qatar, où 32 équipes et plus d’un mil­lion de sup­port­ers sont atten­dus pour deux mois de com­péti­tion grandil­o­quente. Pour s’assurer un ray­on­nement inter­na­tion­al, le pays a déboursé pas moins de 200 mil­liards de dol­lars (et autant d’euros) dans des chantiers démen­tiels tels que ses fameux huit stades cli­ma­tisés, la ville-nou­velle de Lusail (qui accueillera la finale), des lignes de métro reliant les arènes entre elles, un nou­v­el aéro­port ou encore 130 000 places d’hôtel sup­plé­men­taires. En com­para­i­son, les dis­pendieuses Coupe du monde de 2018 et 2014 ont respec­tive­ment coûté dix mil­liards d’eu­ros à la Russie et quinze mil­liards au Brésil.

Prêts à tout pour nous faire rêver, la Fédéra­tion inter­na­tionale de foot­ball (Fifa) et le Qatar ont promis d’en faire « la pre­mière coupe du Monde neu­tre en car­bone », ce qui sig­ni­fie qu’ils « com­penseront inté­grale­ment les émis­sions asso­ciées à la com­péti­tion […] via le finance­ment d’autres pro­jets sus­cep­ti­bles de réduire les émis­sions ». Selon les cal­culs de la Fifa, l’évènement génèr­era 3,6 mil­lions de tonnes de CO2 (soit presque deux fois les émis­sions annuelles de Mar­seille).

Des militant·es protes­tent con­tre la Coupe du monde au Qatar à l’oc­ca­sion du match d’ou­ver­ture, dimanche 20 novem­bre, sur la place de la République à Paris. © Julien de Rosa / AFP

Des cal­culs vive­ment con­testés par plusieurs organ­i­sa­tions dont Car­bon mar­ket watch ou l’application française Green­ly, qui arrivent respec­tive­ment à 5 et 6 mil­lions de tonnes émis­es. Car­bon mar­ket watch con­teste en par­ti­c­uli­er le très faible poids car­bone attribué aux nou­veaux stades. Le cal­cul n’intègre que les émis­sions liées à 58 jours de com­péti­tion pour un stade cen­sé dur­er 60 ans. Or, même si le Qatar promet leur util­i­sa­tion future, ces huit stades cumu­lant 380 000 places sont claire­ment dis­pro­por­tion­nés par rap­port aux besoins d’un pays d’à peine trois mil­lions d’habitants et risquent fort de tomber en désué­tude une fois la com­péti­tion ter­minée.

L’autre prob­lème con­cerne le finance­ment même des pro­jets des­tinés à com­penser ces émis­sions. La Fifa a annon­cé en 2020 son inten­tion d’acheter 1,8 mil­lion de crédits car­bone (sur les 3,6 mil­lions néces­saires) via la créa­tion d’un organe dédié, le Glob­al car­bon coun­cil. Ces crédits sont générés par des pro­jets de réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre (1 crédit = 1 tonne de CO2 évitée). Or, à ce jour, seuls six pro­jets d’énergie renou­ve­lable sont recen­sés, représen­tant moins de 200 000 crédits.