Décryptage

Climat : les folles prévisions des pays producteurs de pétrole

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Tout fioul camp. L’organisation des pays expor­ta­teurs de pét­role (Opep) table tou­jours sur une crois­sance inin­ter­rompue de la demande en or noir au cours des prochaines décen­nies. Ses nou­velles prévi­sions, totale­ment incom­pat­i­bles avec les impérat­ifs cli­ma­tiques, sont offi­cial­isées à quelques semaines de la COP28 sur le cli­mat.

A la 28è con­férence sur le cli­mat de l’ONU, qui débute le 30 novem­bre prochain à Dubaï (Emi­rats Arabes Unis), la France espère tou­jours négoci­er une date de sor­tie du pét­role «parce que c’est là-dessus qu’il faut con­cen­tr­er l’ef­fort», a insisté Emmanuel Macron cet été. Mais Paris devra com­pos­er avec un cer­tain nom­bre de pays pro­duc­teurs dont les pri­or­ités sont rad­i­cale­ment dif­férentes. En témoigne, le dernier rap­port de l’Opep sur les per­spec­tives de la demande pétrolière, paru le 9 octo­bre. L’organisation – qui rassem­ble 13 pays et 35% de la pro­duc­tion mon­di­ale d’or noir – n’entrevoit tou­jours pas de pic de la demande et table même une hausse de 16,5% d’ici 2045. Seuls les pays de l’OCDE ver­ront leur demande déclin­er à par­tir de 2025, selon elle.

Bien que l’Opep vante «des prévi­sions réal­istes, basées sur une approche sci­en­tifique et des don­nées chiffrées», leur mise en œuvre met­trait tout sim­ple­ment le feu à la planète. Selon l’Agence inter­na­tionale de l’Énergie, les pré­con­i­sa­tions des sci­en­tifiques pour main­tenir un cli­mat viv­able impliquent au con­traire une baisse de la demande en pét­role de 75% d’ici à 2050 (par rap­port à 2020) et l’arrêt immé­di­at de tout nou­veau pro­jet d’énergies fos­siles (notre arti­cle). Pour le secré­taire général de l’Opep, Haitham Al Ghais, «ces appels à arrêter les investisse­ments dans de nou­veaux pro­jets sont malav­isés et pour­raient con­duire au chaos énergé­tique et économique».

Pour Stéphane His, con­sul­tant en énergie, «l’Opep pro­pose un scé­nario busi­ness as usu­al qui n’est pas si crédi­ble que ça car les choses sont déjà en train d’évoluer forte­ment, même si cela reste insuff­isant». L’Agence inter­na­tionale de l’énergie entrevoit par exem­ple un pic de la demande en pét­role en 2028. Mais «avec ses prévi­sions, l’Opep envoie avant tout un mes­sage, non seule­ment aux par­tic­i­pants de la COP28 mais aus­si aux marchés financiers et à sa pop­u­la­tion qu’elle essaie de ras­sur­er», analyse-t-il auprès de Vert. Il rap­pelle que «le pét­role apporte des niveaux de recettes très impor­tants voire majori­taires pour cer­tains États, qui en sont donc absol­u­ment trib­u­taires pour leur sta­bil­ité économique et sociale».

Pho­to Zbynek Buri­val / Unsplash