Décryptage

Avancée de l’extrême droite, recul des écologistes, maintien de la droite et des socialistes : les cinq leçons des élections européennes

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Mal­gré une per­cée de l’extrême droite dans plusieurs pays, les équili­bres poli­tiques sont plus ou moins main­tenus au sein du Par­lement européen à l’issue de l’élection des 720 eurodéputé·es.

La droite et les socialistes se maintiennent

Les mem­bres du Par­ti pop­u­laire européen (PPE), à droite sur l’échiquier poli­tique, con­ser­vent leur place de pre­mier groupe au Par­lement européen avec 185 sièges pour le moment (les résul­tats sont encore sujets à évo­lu­tion). Au niveau français, les Répub­li­cains ont rem­porté six sièges (un de moins qu’en 2019). Les social­istes gag­nent 137 sièges et demeurent la deux­ième force du Par­lement européen. Menée par Raphaël Glucks­mann, la liste du Par­ti social­iste et de Place publique enver­ra 13 élu·es au Par­lement européen — une belle pro­gres­sion par rap­port aux sept de la précé­dente man­da­ture.

L’extrême droite perce dans plusieurs pays

Le Rassem­ble­ment nation­al est arrivé en tête du vote en France, envoy­ant une délé­ga­tion his­torique d’une trentaine d’élu·es au Par­lement. Le par­ti d’extrême droite Fratel­li d’Italia, porté par la prési­dente du con­seil ital­ien Gior­gia Mel­oni, a égale­ment rem­porté les élec­tions dans son pays et enver­ra 24 par­lemen­taires à Stras­bourg. L’extrême droite est arrivée en deux­ième place du scrutin en Alle­magne, en Pologne ou encore aux Pays-Bas. Au total, les mou­ve­ments nation­al­istes occu­per­ont plus du quart de l’hémicycle. Reste à voir si le jeu des alliances per­me­t­tra à l’extrême droite de peser dans les débats : «Ce vote n’a pas été un glisse­ment tec­tonique vers l’ex­trême droite. Elle a claire­ment pro­gressé, mais cela ne se traduit pas néces­saire­ment par plus de pou­voir pour les cinq prochaines années, car la plu­part des élus ne seront pas des parte­naires accept­a­bles pour le PPE de cen­tre-droit», analyse Lin­da Kalch­er, direc­trice du think tank européen Strate­gic per­spec­tives.

Les écologistes essuient un revers important

Les écol­o­gistes avaient réal­isé une per­cée his­torique en 2019 en sécurisant 78 sièges au Par­lement, s’inscrivant par­mi les prin­ci­pales forces poli­tiques. Leur groupe devrait désor­mais compter 52 eurodéputé·es, soit une dis­pari­tion de près de 30% de leurs effec­tifs.

Les Français·es, mené·es par Marie Tou­s­saint, ont échap­pé au pire en récoltant 5,5% des voix (en dessous de 5%, le par­ti n’aurait pas pu envoy­er d’élu·es au Par­lement), ce qui leur donne droit à cinq sièges (con­tre 12 en 2019).

Les libéraux en net recul

Autre revers con­séquent : le groupe cen­triste Renew, dont fait par­tie Renais­sance, récolte 79 député·es — soit une ving­taine de moins que sur la précé­dente man­da­ture. Cela est notam­ment lié au vaste recul de la délé­ga­tion française, qui passe de 23 à 13 eurodéputé·es et qui a entraîné la dis­so­lu­tion sur­prise de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron ce dimanche.

Le paysage politique européen se fragmente de plus en plus

Le Par­lement européen a longtemps été dom­iné par deux groupes prin­ci­paux : le PPE à droite et les Soci­aux-démoc­rates à gauche. Ces élec­tions révè­lent une dis­per­sion gran­dis­sante des forces poli­tiques dans l’hémicycle. Le fonc­tion­nement du Par­lement européen, où aucun groupe ne détient la majorité, dépend de coali­tions for­mées entre les dif­férents mou­ve­ments afin d’aboutir à des con­sen­sus sur les textes votés. «Ce proces­sus est plus déli­cat dans un Par­lement frag­men­té, car les majorités néces­si­tent le sou­tien d’un plus grand nom­bre de groupes poli­tiques, et chaque groupe peut se retrou­ver en posi­tion de piv­ot, influ­ençant l’issue d’un vote», décryptent les poli­tistes Nathalie Brack et Awenig Mar­ié dans The Con­ver­sa­tion. Le poids ren­for­cé de cer­tains groupes (dont l’extrême droite) pour­rait donc avoir un impact impor­tant sur les lég­is­la­tions européennes dans les cinq prochaines années.

Pho­to d’il­lus­tra­tion : Jor­dan Bardel­la lors de son dis­cours après les résul­tats des élec­tions européennes le 9 juin 2024, Daniel Dorko / Hans Lucas / AFP