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À l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, l’urgence de lutter contre le trafic d’animaux et de viande sauvage

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Un traf­ic saig­nant et au point. En vis­ite à l’aéroport de Rois­sy-Charles-de-Gaulle (CDG), la secré­taire d’État à l’écologie, Bérangère Couil­lard, a annon­cé la créa­tion d’un groupe de tra­vail pour accroître la lutte con­tre le com­merce illé­gal de viande et d’animaux sauvages à des­ti­na­tion de la France.

En 2021, les ser­vices douaniers du ter­mi­nal 2 de l’aéroport CDG ont saisi pas moins de «36 tonnes de pro­duits illé­gaux issus d’espèces sauvages, dont 17 tonnes d’espèces ani­males et de viande de brousse (pan­golins, pri­mates, agoutis, chauve-souris…)», relève le comité français de l’Union inter­na­tionale pour la con­ser­va­tion de la nature (UICN). Soit à peine 10% du com­merce illé­gal, selon ses esti­ma­tions.

Invitée par le comité français de l’UICN à vis­iter les infra­struc­tures douanières et la sta­tion d’accueil pour les ani­maux sai­sis à l’aéroport CDG ce mer­cre­di, la secré­taire d’État a recon­nu la grav­ité de la sit­u­a­tion. «Les trafics de viande dite de brousse et d’animaux vivants sont une men­ace pour la bio­di­ver­sité et représen­tent un risque san­i­taire», a souligné Bérangère Couil­lard. «Les ONG et experts de la bio­di­ver­sité aler­tent sur le sujet depuis plus de dix ans. Le fait que la secré­taire d’État vienne pour la pre­mière fois est une chose pos­i­tive car on n’arrivera pas à avancer sans une dynamique glob­ale impul­sée par le gou­verne­ment», juge Maud Lelièvre, prési­dente du comité français de l’UICN, auprès de Vert.

Ce traf­ic fait par­tie des activ­ités crim­inelles inter­na­tionales les plus lucra­tives. Il porte atteinte à la bio­di­ver­sité en frag­ilisant des espèces déjà men­acées ou pro­tégées. Il génère aus­si des risques san­i­taires dans les pays de des­ti­na­tion du traf­ic, avec la pos­si­ble impor­ta­tion de zoonoses, des mal­adies infec­tieuses trans­mis­es aux humains via les ani­maux (comme Ebo­la).

Les douaniers sai­sis­sent de la viande de brousse dans une valise qui vient d’ar­riv­er à l’aéro­port Rois­sy-Charles-de-Gaulle, mer­cre­di 15 févri­er. © Comité français de l’UICN

Le comité français de l’UICN a émis 25 recom­man­da­tions pour lut­ter con­tre le traf­ic d’espèces sauvages. Tout d’abord, ren­forcer les effec­tifs des ser­vices douaniers chargés des con­trôles à l’aéroport. «Hier, plus de 60 kilos de viande de brousse ont été sai­sis en vingt min­utes passées au point de con­trôle», témoigne Maud Lelièvre, qui appelle à aug­menter la qual­ité et la quan­tité des con­trôles. Elle plaide égale­ment pour une amélio­ra­tion de la for­ma­tion des douaniers. «Il faut savoir dis­tinguer les espèces pour mieux pren­dre en charge les ani­maux, notam­ment s’ils sont ven­imeux ou dan­gereux. Il faut aus­si pou­voir recon­naître la viande, qui arrive par­fois en mau­vais état, pour iden­ti­fi­er les zones de départ et met­tre en place des mesures dans les pays d’origine.»

Enfin, la solu­tion la plus rapi­de à met­tre en place pour enray­er le traf­ic serait de lim­iter le nom­bre de bagages gra­tu­its par passager·e. Aujourd’hui, la com­pag­nie Air France autorise sou­vent deux bagages gra­tu­its de 23 kilos, ce qui per­met aux passager·es d’avoir une valise d’affaires per­son­nelles et une avec de la viande ou des ani­maux vivants. «Si on sup­prime une valise, on enlève qua­si­ment une valise de traf­ic par pas­sager, c’est énorme», appuie Maud Lelièvre. C’est aus­si une manière de réduire le vol­ume de bagages à con­trôler.

Le groupe de tra­vail annon­cé par la secré­taire d’État rassem­blera des représentant·es de plusieurs min­istères (dont la jus­tice, les trans­ports et l’é­colo­gie), ain­si que des ser­vices douaniers, des opéra­teurs de trans­ports et d’associations. Il sera chargé d’établir des solu­tions pour ren­forcer la lutte con­tre ce traf­ic.