La quotidienne

Sur les chardons ardents

Chères toutes et chers tous,

Embarqué·es dans la frénésie de la couverture de la COP27 en Égypte, nous avons oublié de vous faire voter pour le Vert du faux de la semaine prochaine ! Nous vous laissons donc la possibilité de choisir entre ces deux sujets, et nous traiterons la question gagnante dans l'édition de jeudi prochain :

 
👉 |SURVEY: La planète peut-elle supporter 8 milliards d'êtres humains ?|

👉 |SURVEY: Les pistes cyclables sont-elles des places de parking ?|

 
Les votes sont ouverts tout le week-end et les résultats seront donnés dans l’édition de lundi. Envoyez-nous toutes vos questions les plus brûlantes en répondant à ce mail, tout simplement. À vos claviers !


Pendant que les négociations climatiques patinent, la biodiversité se ratatine.


À trois semaines de la Conférence des nations unies sur la biodiversité, le sujet peine à s’établir dans les négociations climatiques

Finir le bec dans l’eau. De nombreux·ses observateur·rices espéraient que la 27ème Conférence des parties (COP27) sur le climat lance un élan autour de la préservation des écosystèmes, en amont de la COP15 sur la biodiversité qui s’ouvre à Montréal le 7 décembre prochain. Un espoir douché par l’absence d’attention portée au sujet.

Alors que vient de tomber le brouillon de décision finale (en anglais) de la COP27 - le résumé des points abordés et des engagements pris lors des négociations, le texte ne fait pas référence à l’importance d’un futur accord sur la biodiversité à l’occasion de la COP15 sur la diversité biologique, qui débute dans moins de trois semaines à Montréal.

Cette COP15 biodiversité revêt un intérêt capital, puisqu’elle est censée aboutir à un cadre ambitieux visant à protéger au moins 30% des terres et des mers d’ici à 2030. Ce dernier est même attendu comme un texte « jumeau » de l’Accord de Paris, qui a consacré en 2015 l’objectif de maintenir le réchauffement du climat bien en dessous de 2°C à la fin du siècle (par rapport à l’ère préindustrielle), et si possible à 1,5°C. L’absence des chef·fes d’État à Montréal, seul·es les ministres ayant été convié·es à l’événement, laisse pourtant craindre un rendez-vous manqué pour la biodiversité.

À la COP27, des panneaux informent les participant·es des bienfaits des mangroves, qui sont de précieux puits de carbone et permettent de ralentir l'érosion des sols © UNFCCC

« Les dirigeants doivent aboutir à un accord [...] qui soit aussi ambitieux, basé sur la science et complet que celui de Paris sur le changement climatique », ont notamment plaidé certain·es des architectes de l’Accord de Paris, dont le président de la COP21, Laurent Fabius, et la négociatrice en chef de l’accord, Laurence Tubiana, dans un appel (en anglais) lancé mercredi à la COP27. « Il n’y a aucun chemin pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C sans action pour protéger et restaurer la nature », souligne l’appel, rappelant l’interconnexion des enjeux de climat et de biodiversité.

Dans un rapport de l’ONG WWF publié mercredi, l’association détaille le rôle essentiel de la biodiversité, qui a absorbé 54% des émissions de gaz à effet de serre au cours des dix dernières années. Les écosystèmes terrestres et marins captent le CO2 et jouent le rôle de puits de carbone, ce qui ralentit le réchauffement climatique. Inversement, le changement climatique bouleverse des écosystèmes et aggrave l’effondrement de la biodiversité (notre article).

· Les pluies intenses qui ont tué plus de 600 personnes au Nigeria depuis juin, déplacé 1,4 million d’habitant·es et induit de lourds dégâts sur les cultures ont été rendues 80 fois plus probables par le dérèglement du climat et 20% plus intenses dans la région du lac Chad, a conclu mercredi une étude du World weather attribution (WWA), un réseau de scientifiques spécialisé·es dans l’attribution d’évènements extrêmes au changement climatique. - Le Monde (AFP)
 

· Jeudi, le mouvement des gilets jaunes, né le 17 novembre 2018 en protestation contre la hausse des prix du carburant, a fêté ses quatre ans. Hasard de calendrier, l’anniversaire coïncide, cette année, avec la fin de la remise à la pompe du gouvernement, intervenue ce mercredi. Un colloque est prévu à Bordeaux ce weekend pour « faire se rencontrer les gilets jaunes et les chercheurs » et d’autres rassemblements auront lieu partout en France. - Sud Ouest (🔒)
 

· Jeudi encore, lors du procès qui se tenait à Cahors (Lot) pour homicide involontaire ayant provoqué la mort de Morgan Keane par un chasseur en décembre 2020, le procureur a requis six mois de prison ferme à l’encontre de l’auteur du tir et du directeur de la battue. Le chasseur a reconnu son erreur. - L’Obs (🔒)

L'Office de la biodiversité (OFB) a saisi des dizaines de cages et de filets. © OFB

Comme un chardonneret en cage. Mardi, une quarantaine de chardonnerets élégants, 83 cages de contention et des filets servant à la capture ont été saisis par les agents de l’Office français de la biodiversité (OFB) à Savenès (Tarn-et-Garonne). Un homme de 55 ans est accusé de captures illégales sur la faune sauvage. Le chardonneret élégant est un petit oiseau coloré au chant mélodieux, victime d’un trafic redoutable en raison de ses superbes cordes vocales. « Cette espèce protégée a subi une diminution de près de 31 % de sa population depuis 2001 en raison des pesticides et de ce trafic », a indiqué un agent de l’OFB à la Dépêche.

À fonds la caisse. Dans la nuit de jeudi à vendredi, l’Union européenne a fini par accepter le principe de la mise en place du fonds sur les pertes et dommages si ardemment réclamé par les pays les plus vulnérables au changement climatique. En échange, l’Union européenne demande un engagement vers un abandon progressif des énergies fossiles. Jusqu’alors, la plupart des pays riches plébiscitaient l’idée d’arrangements financiers plus que d’un fonds spécifique, expliquant que ce dernier serait trop long à mettre en place. - The Guardian (en anglais)

0 pointé. Jeudi, la présidence égyptienne a publié un premier brouillon de 20 pages (un record de longueur) de la décision finale de la COP27 qui a été vivement critiqué par de nombreux·ses pays et expert·es pour son imprécision et ses lacunes. « C’est seulement une longue liste de courses pour l’instant », a fustigé Carlos Fuller, ambassadeur du Bélize et de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), tandis que le réseau climat international a appelé l’Égypte à un texte plus sérieux pour conclure la COP27.
 

Encore un peu brouillon. Une nouvelle ébauche est finalement sortie vendredi, très tôt. Un peu plus clair et concis (10 pages), il évoque la question des pertes et dommages, mais sans modalités précises de mise en œuvre de financement. Le texte aborde, comme à Glasgow l’année dernière, la sortie progressive du charbon, mais pas de toutes les énergies fossiles (gaz et pétrole) comme réclamé par l’Inde par exemple. Enfin, ce brouillon réaffirme aussi l’objectif de 1,5°C, dont plusieurs pays souhaitaient se débarrasser pour ne garder que 2°C.

« L’Université de la Terre veut réunir tous les publics, des activistes aux dirigeants d’entreprises »

Jacques Huybrechts est le fondateur de l’Université de la Terre, une vaste rencontre autour de l’écologie qui se tient à l’Unesco à Paris les 25 et 26 novembre. À Vert, il raconte sa démarche pour en faire une Université ouverte et portée sur l’action.

L’Université de la Terre existe depuis 2005. Est-il encore nécessaire aujourd’hui d’organiser de grands sommets de discussions ?

Oui, c'est utile à condition de concilier plusieurs dimensions. L’Université aide d’abord à la prise de conscience. Ensuite, nous avons un objectif de passer de la conscience à la connaissance des enjeux. Nous sommes bien loin de comprendre parfaitement les mécanismes de réchauffement et des pertes de biodiversité. Or, c’est cette compréhension qui nous permet d’aller au-delà du fait de subir les crises et qui nous amène à la troisième dimension : le passage à l’action.

Une autre ambition de l’Université est de réunir tous les publics, des activistes aux dirigeants d’entreprises. Avec cette édition, nous élargissons le public historique et convaincu. Nous avons intégré de nouveaux formats pour s’adresser aux juniors et nous mettons en place un « Green comedy show » avec un stand up sur les enjeux verts. 

Quelles sont vos trois « pépites » de l’édition de la semaine prochaine ?

La première est incontestablement la venue de chefs autochtones le 25 novembre. C’est une session « Rencontre sous la Canopée » que nous avons coconstruite avec la boîte de production qui réalise des films sur cinq gardiens de la forêt du monde entier, films qui sortiront sur Arte et Ushuaïa. Twyla Edgi Masuzumi, une jeune femme Déné du Canada ; Mundiya Kepanga qui vient de Papouasie et Benki Piyako, un chef de la communauté Ashaninka du Brésil, viendront alerter sur la violation de leur territoire et les menaces qui pèsent sur leur communauté.

Le deuxième temps fort, pour moi, c’est un programme de trois heures pour les 8-12 ans avec les parents, sur « ma planète bleue et verte : comment la protéger ? ». C’est une édition très tournée vers la jeunesse.

La suite de cet entretien est à retrouver sur vert.eco

Parler transition écologique avec des expert·es et des humoristes

Un café décroissant. Dans une nouvelle émission de la web-télé TV4Planet, Matthieu Brillard accueille autour d’un café un·e expert·e du climat et un·e humoriste pour parler de transition écologique sur un ton frais et léger. Au menu du dernier épisode : un échange entre Chloé Ridel, haut fonctionnaire et directrice adjointe du think tank l’Institut Rousseau, et Pierre Thevenoux, pour parler de l’Europe, des réseaux sociaux et de couteaux électriques.

© TV4Planet

+ Juliette Quef a contribué à ce numéro