La quotidienne

Sponsors noirs

Abreuvés des billets verts de la finance, les fossiles maquillent leurs noirs desseins. 


Les banques françaises accélèrent le chaos climatique

Les fossiles carburent aux billets verts. Depuis la signature de l'Accord de Paris, en 2015, les plus grandes banques françaises ont quasiment doublé les financements accordés à l'industrie fossile.

Loin d'avoir tiré les leçons de cet accord mondial, qui lie les nations du globe dans la lutte contre le bouleversement du climat, les grandes banques mondiales ont encore accru leur soutien aux compagnies productrices de charbon, de gaz et de pétrole. C'est l'un des nombreux enseignements de la dernière édition du rapport Banking on climate chaos, rédigé par six ONG, dont Reclaim Finance. Celui-ci s'est penché sur le soutien des 60 plus grandes banques à quelque 2 300 entreprises fossiles. 

Les financements (sous la forme de prêts, ou d'émissions d'actions et d'obligations) ont augmenté de 6% entre 2016 et 2020 pour atteindre un total de 3,8 milliards de dollars (3,22 Mds€). En tête du classement : les Américaines JPMorgan Chase, Citi, Wells Fargo et Bank of America. 

Les banques qui ont le plus financé l'industrie fossile entre 2016 et 2020. Les valeurs sont exprimées en dollars. Cliquez sur l'image pour l'afficher en grand. © Banking on climate change

Mais les banques françaises sont parmi les principaux moteurs de cette croissance. En cinq ans, elles ont accru de 19% par an – en moyenne - leurs financements des compagnies fossiles. Au sommet, BNP Paribas qui a plus que doublé les sommes investies et qui atteint désormais la quatrième place du classement mondial en 2020. La France est le 4ème plus gros financeur mondial des fossiles, et le numéro 1 en Europe. 

Si l'investissement dans le charbon (énergie la plus sale) connaît un déclin mondial, « les banques françaises ont augmenté leurs financements aux pétrole et gaz les plus risqués, y compris ceux dits ‘non-conventionnels’ comme les gaz et pétrole de schiste »déplorent Reclaim Finance et les Amis de la Terre. Alors que l'Accord de Paris rappelait l'urgence de laisser une part importante des hydrocarbures dans le sol, la finance mondiale permet à un nombre croissant de projets d'extraction de voir le jour. 

• Mardi, la Cour de Cassation a confirmé le non-lieu rendu, en 2018, en faveur du gendarme qui a tué Rémi Fraisse. Ce jeune botaniste et militant écologiste de 21 ans avait succombé à l'explosion d'une grenade offensive, tirée lors d'une vaste opération de police sur le chantier de la retenue d'eau controversée de Sivens (Tarn), le 26 octobre 2014. Ces armes avaient été interdites quelques mois plus tard. La famille de Rémi Fraisse pourrait saisir la Cour européenne des droits de l'Homme. - Le Monde (AFP)

• Mardi, au petit matin, plusieurs centaines de gendarmes ont évacué la zone à défendre (ZAD) du Carnet (Loire-Atlantique). Depuis neuf mois, ces militant•e•s écologistes se battaient contre un vaste projet d'éco-parc technlogique dans ce lieu qui « représente un réservoir de biodiversité et une zone préservée dans l’estuaire de la Loire », des mots du Mouvement national de lutte pour l'environnement (MNLE) et de Notre affaire à tous. Ces deux associations ont déposé, le 18 février, un recours en justice contre le projet. - Mediapart (abonnés)

Contre la santé et le climat, le « sportwashing » des plus gros pollueurs 

C'est pas du jeu. Pour laver leur image, les entreprises les plus polluantes sponsorisent les compétitions et équipes sportives à tour de bras

Variante du « greenwashing », pratique qui consiste à tout repeindre en vert pour se donner une bonne conscience écolo, voici le « sportwashing ». Ou quand « les industries lourdement polluantes sponsorisent le sport pour faire croire qu'elles sont bonnes pour la santé, alors qu'elles envoient une pollution mortelle dans l'air que respirent les athlètes et ruinent le climat sur lequel le sport repose »explique au Guardian Andrew Simms, co-directeur du think tank britannique du New Weather Institute. En collaboration avec d'autres organisations, il vient de publier un rapport sur cette pratique encore peu documentée. 

L'étude s'est penchée sur plus de 250 contrats de sponsoring passés entre des entreprises et des équipes ou organisations dans 13 sports majeurs. L'industrie automobile est, de loin, la plus active, avec 199 contrats, pour un total de 1 086 milliards d'euros. Partenaire de l'Olympique de Marseille, Toyota est l'entreprise qui sponsorise le plus grand nombre d'équipes, avec 31 contrats. Elle est suivie par la compagnie aérienne Emirates (29). Le troisième secteur le plus représenté est celui des hydrocarbures. A sa tête, Gazprom (sponsor de la fédération européenne de football – l'UEFA) ou Ineos, qui s'est payé une équipe sur le tour de France. 

Une version géante du maillot du club allemand de football Schalke 04 et son sponsor: l'énergéticien russe Gazprom © Schalke 04

« On devrait mettre un terme [à ces pratiques] pour la même raison que le sponsoring du sport par le tabac a cessé : pour la santé des gens, pour le sport et pour la planète », dit encore Andrew Simms, qui ajoute : « Le sport a changé la donne en permettant une prise de conscience et un changement rapide de l'opinion sur des questions vitales comme la pauvreté infantile ou le racisme. Maintenant, il faudrait en faire de même pour le changement climatique »

Une marche pour une « vraie » loi climat 

Climat de défiance. A l'avant-veille de son examen dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, 428 organisations ont lancé un appel national à manifester, samedi 28 mars, pour une « vraie » loi climat.

S'appuyant sur les 150 propositions faites par la Convention citoyenne, le projet de loi « climat et résilience » devait permettre de réduire drastiquement les émissions de CO2 nationales d'ici 2030. Or, le texte récemment présenté par le gouvernement, comme celui qui vient de sortir de deux semaines d'examen en commission spéciale à l'Assemblée nationale, ne satisfont personne. Associations, élu•e•s, institutions publiques, membres de la Convention... de très nombreuses voix se sont élevées ces dernières semaines pour clamer que le compte n'y était pas (Vert). Y compris dans la majorité : « On ne doit pas hésiter à aller plus loin » a récemment plaidé la députée LREM et agricultrice Sandrine Le Feur.

Samedi, à quelques heures du passage du projet de loi dans l'hémicycle du palais Bourbon, la société civile appelle à prendre la rue partout en France. L'objectif : faire pression sur les parlementaires pour qu'elles et ils redonnent de l'ambition au texte - étudié au cours des deux prochaines semaines - par leurs amendements. Du Nord-Ouest à la Corse, 143 événements sont déjà recensés en métropole. Alternatiba, FNE, Extinction Rebellion ou L214 : la longue liste des signataires de l'appel reflète le dynamisme du mouvement climatique en France. 

Les signataires de l'appel exhortent les élu•e•s à plus d'audace sur la rénovation énergétique, la réglementation de la publicité ou la limitation des vols intérieurs. Une proposition de loi alternative, huit fois plus ambitieuse en termes de réduction des gaz à effet de serre, a été déposée hier par les député•e•s Matthieu Orphelin et Delphine Batho.

Emmanuel Macron, lui aussi, veut une vraie loi climat 

Les 150 de la Convention citoyenne ne sont pas les seul•e•s déçu•e•s par le projet de loi climat. Ecologiste en secret, Emmanuel Macron aurait lui-même aimé ne pas avoir à céder aux lobbies industriels. C'est ce qu'il raconte (presque) dans cette vidéo parodique d'On est prêt. 

© On est prêt

+ Tristan Saramon a contribué à ce numéro.