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La Bourse ou la vie

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🗳️ Les urnes ont parlé. À 78%, vous avez choisi que nous répondions à la question « Peut-on décemment vivre à 2 tonnes de CO2 par an ? » dans le Vert du faux de la semaine prochaine. Rendez-vous dans l'édition de jeudi pour la réponse. 


Pendant que la finance tente de verdir ses investissements, le vivant disparaît dans un joli bruissement.


La BNP Paribas sous le feu des critiques pour ses promesses vertes

Plus fossile à dire qu’à faire. Vivement blâmée pour son financement de l’industrie fossile, la banque BNP Paribas multiplie ses engagements « verts »… qui ne convainquent toujours pas.

L’émission Cash investigation de France 2 a consacré sa dernière enquête, diffusée jeudi, aux superprofits réalisés par les multinationales. Les journalistes ont notamment investigué sur les fonds verts de la première banque française, la BNP Paribas, qui vante ses investissements responsables. Or, l’enquête a relevé la présence d’entreprises aux pratiques discutables dans ces financements « verts », comme le champion de la pollution plastique Coca-Cola, une compagnie belge à l’origine de pollutions aux métaux lourds, Umicore, ou encore le pétrolier TotalEnergies.

C’est en partie en raison de ses liens avec la compagnie française que la BNP Paribas est dans le viseur du mouvement climat depuis plusieurs mois. Fin octobre 2022, les ONG Oxfam, les Amis de la Terre et Notre affaire à tous avaient mis en demeure la BNP Paribas de se mettre en conformité avec la loi sur le devoir de vigilance. Votée en 2017, cette dernière engage les grandes entreprises à prévenir les atteintes aux droits humains et aux libertés fondamentales, à la santé et à la sécurité des personnes, et à l’environnement, qui seraient liées à leurs activités. Les ONG reprochent à la banque sa « responsabilité historique » dans la crise climatique en tant que premier financeur européen - et cinquième mondial - des énergies fossiles (notre article).

Le 20 janvier, une quarantaine d'activistes ont ciblé un établissement parisien de BNP Paribas pour dénoncer son partenariat historique avec TotalEnergies © Capture d'écran Twitter Extinction rebellion France

La BNP avait jusqu’à jeudi pour répondre à cette mise en demeure. Mardi, la banque a annoncé de nouveaux engagements climatiques, dont le fait de réduire de 80% ses financements pour l’extraction et la production de pétrole d’ici à 2030 en abaissant ses encours de crédits (les montants des crédits émis) à moins d’un milliard d’euros. La BNP promet également de réduire ses financements du secteur gazier à horizon 2030. 

Une réponse « insuffisante » qui n’a pas convaincu les ONG. « Un prêt accordé aujourd’hui et permettant le développement d’un nouveau projet d’énergies fossiles ne figurera pas obligatoirement dans les encours de la banque en 2030, même si cette infrastructure continuera à polluer bien au-delà de 2030 », avance Alexandre Poidatz, responsable de plaidoyer à Oxfam France. 

Les ONG à l’origine de la mise en demeure de BNP Paribas doivent désormais décider si elles souhaitent assigner la banque en justice.

· Les catastrophes naturelles en France ont coûté 10 milliards d’euros en 2022, un record depuis 1999, a dévoilé la présidente de France assureurs, Florence Lustman, jeudi. Avec les cyberattaques et la dégradation de l’environnement économique, le changement climatique est l’un des risques principaux identifiés par les compagnies d’assurance. - L’Obs (AFP)

· Le pétrolier TotalEnergies est visé par une enquête préliminaire du parquet de Nanterre pour pratiques commerciales trompeuses, a révélé Mediapart, jeudi. En octobre 2020, trois associations avaient déposé plainte et dénoncé « le fossé qui sépare les discours du groupe Total en matière climatique de ses pratiques qui consistent à investir massivement dans des énergies fossiles ». - Mediapart (abonné·es)

· Dans une tribune publiée dans Le Monde jeudi, quelque 1500 chercheur·ses spécialisé·es sur le climat ont dénoncé la mise à l’écart par la communauté scientifique de deux de leurs collègues qui avaient appelé à la désobéissance civile. « Nous sommes consternés par les récentes représailles contre des collègues n’ayant fait qu’exercer leurs droits civils et humains », plaident les signataires.

· Une barge rousse vient d’entrer au Guinness book des records pour un vol record de 13 560 kilomètres sans escale entre l'Alaska (États-Unis) et la Tasmanie (Australie) à une vitesse moyenne de 50 km/h. Cet oiseau né en 2022 a passé 11 nuits et 11 jours sans s’alimenter. - France info

Conseil de planification écologique

Des conseils par centaines. Dans une vidéo postée le 17 janvier, le président de la République annonçait la création d’un énième organe décisionnel censé accoucher de mesures fortes pour (enfin) protéger la biodiversité et sortir des énergies fossiles. Après le « Conseil national de la refondation (CNR) Climat et biodiversité » lancé en grande pompe en octobre 2022 (Vert) - créé en parallèle du « Conseil national de la transition écologique » et de feu la « Convention citoyenne pour climat » - voici donc le « Conseil de planification écologique » qui prend la suite des « Conseils de défense écologique » qui ne s’étaient pas réunis depuis 2020. Cette nouvelle instance s’est tenue pour la première fois jeudi 26 septembre autour du chef de l’État et de la Première ministre avec 10 autres membres du gouvernement. L’objectif ? « Évaluer les avancées secteur par secteur, avant qu’Emmanuel Macron ne dévoile ses ambitions pour l’accélération de la planification écologique dans les mois à venir », ont révélé nos confrères de Contexte (abonné·es). Un programme chargé donc. Mais attention, Élisabeth Borne a prévenu : aucune mesure « punitive » ne sera retenue.

Petite conférence pour apprendre à écouter le vivant

Piège à sons. Avec À l’écoute du vivant, l’audio-naturaliste Marc Namblard initie son auditoire aux mystérieux bruits de la forêt avec un format de petite conférence écrite qui se laisse dévorer.

Le tonnerre claque, la glace gémit et soupire, les oiseaux chantent : prenez-vous garde au murmure du monde ? À la croisée des chemins entre scientifique et artiste, l’audio-naturaliste Marc Namblard traque les sons du vivant pour en faire de « beaux enregistrements » et les donner à entendre. À l’aide de ses outils - enregistreurs, micros paraboliques, grandes perches -, il confectionne des « pièges à sons » avant d’en percer les secrets.

Le naturaliste capture une diversité insoupçonnée d’ondes sonores : les larves des capricornes font un raffut de tous les diables en grignotant le bois ; les sauterelles et les grillons stridulent - frottent leurs élytres, des ailes durcies, l’un contre l’autre ; les grenouilles rieuses gonflent leur sac vocal pour produire un chant puissant, et le sonneur à ventre de feu - un petit crapaud - fait vibrer tout son corps à la surface de l’eau.

Mais les champions incontestables de la musique de la nature, raconte Marc Namblard, sont les oiseaux qui produisent des sons grâce à leur syrinx. Le chant du troglodyte mignon « rassemble plus de 60 motifs en une succession de trilles et de glissandos amples, parfaitement réguliers », pendant que d’autres espèces, comme le pic, tambourinent. Et les plantes alors ? Elles émettent « d’étranges chuintements ou crépitements qui proviennent de la photosynthèse » et seraient même capables d’entendre les insectes approcher. Une délicieuse plongée dans l’univers fascinant du son qui nous incite à tendre l’oreille et écouter le vivant palpiter.

À l’écoute du vivant, Marc Namblard, Bayard, janvier 2023, 80p, 12,9€.

Superprofits : les multinationales s’habillent en vert

Greenwashing, what else ? Dans le dernier Cash Investigation, diffusé jeudi, les journalistes ont enquêté sur les promesses vertes de deux fleurons français, TotalEnergies et BNP Paribas, et du groupe Nespresso. Des multinationales qui se vantent d’être responsables, tout en multipliant les projets climaticides et les opérations de greenwashing.

© Cash investigation

+ Pénélope Dickinson, Lou-Eve Popper et Juliette Quef ont contribué à ce numéro.