La quotidienne

Contre vents et manifs

Chères toutes et chers tous,

Il nous a semblé que ce concept vous avait plu ; nous avons déniché une version plus récente et de meilleure qualité de l'infographie sur les limites planétaires (présentée dans l'édition d'hier), que nous avons traduite de l'anglais. Vous pourrez la retrouver en cliquant ici, et la partager autour de vous.


Un numéro ou l'on verra que l'énergie est continue dans les courants alternatifs.


L'inquiétante aversion des sénateurs pour les lanceurs d'alerte

Censeurs d'alerte. La proposition de loi qui vise à « améliorer la protection des lanceurs d’alerte » devrait ressortir fortement altérée de son passage au Sénat.

Le 17 novembre dernier, l'Assemblée nationale a voté comme un seul homme la proposition de loi du député Sylvain Waserman (Modem). Celle-ci transposait, avec quelques bonus, une directive européenne d’octobre 2019 sur « la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union ». Si le choix de proposer un texte plus ambitieux que la norme européenne n’avait alors pas fait débat, il en va autrement du Sénat (dominé par la droite), qui examine le texte en séance depuis hier.

Plusieurs mesures-phares ont été biffées par la commission des lois du palais du Luxembourg (voir le comparatif sur le site du Sénat). Par exemple, celle-ci propose de restreindre le périmètre des alertes aux seules violations du droit, alors que la version soumise par l'Assemblée nationale prévoyait de pouvoir dénoncer une « menace ou un préjudice pour l'intérêt général ». En clair, les lanceur·ses d'alerte ne pourraient plus dénoncer de pratiques inacceptables si elles sont légales, comme l'optimisation fiscale, le broyage des poussins ou encore les effets nocifs de certains produits ou médicaments autorisés. D'autres amendements prévoient aussi de restreindre le statut de lanceur·se d’alerte aux personnes impliquées dans le cadre de leur activité professionnelle. Ce qui exclurait les victimes (patient·es, client·es) et les associations qui décideraient d’accompagner ces lanceur·ses d'alertes.

Si les amendements de la commission des lois sont votés tels quels par le Sénat aujourd'hui, une tentative de conciliation avec l'Assemblée nationale aura lieu dans le cadre d'une commission mixte paritaire. Les député·es auront le dernier mot en cas de désaccord. Si le risque de voir la protection des lanceur·ses d'alerte reculer est donc réduit, la méfiance du Sénat à leur égard pose question. Elles et ils « sont là pour renforcer les systèmes démocratiques, et non les affaiblir », a rappelé la lanceuse d'alerte Emma Reilly lors d'une manifestation organisée hier à Paris (Reporterre). Mais les sénateur·rices semblent avoir été davantage sensibles aux arguments de l'agro-industrie, contenus dans des mails et des propositions révélés par Mediapart en décembre dernier.

· Pour contenir la hausse des factures d'électricité, le gouvernement a demandé à EDF de vendre à ses concurrents, les fournisseurs alternatifs, jusqu'à 40% de sa production nucléaire à bas prix en 2022. Celui-ci est fixé à 42 euros par mégawattheure. Or, la vente sur les marchés de l'électricité aurait pu lui rapporter jusqu'à 8 milliards d'euros en plus, selon EDF. Les marchés de l'énergie sont en surchauffe depuis la rentrée (Vert), ce qui avantage les vendeurs d'énergie mais risque, in fine, de peser fortement sur la facture des ménages. - AFP

Mercredi matin, devant le Parlement européen à Strasbourg. © Basile Mesré-Barjon

Le climat se tend. Le discours prononcé mercredi à Strasbourg par Emmanuel Macron, à l'occasion de la présidence française du Conseil, a marqué son entrée dans la campagne tout comme celle de certain·es de ses adversaires. Avant son arrivée au Parlement européen d'où il s'est exprimé, des activistes d'ANV-COP 21 ont brandi certains des portraits chipés dans plusieurs mairies françaises en 2019. Elles et ils les ont trempé dans des barils de faux pétrole pour tancer l'inaction du président en matière de climat : « En ce jour symbolique, nous montrons à l’Europe entière le vrai visage d’Emmanuel Macron, a expliqué Zoé Mary, porte-parole d'ANV-COP 21. Ses cinq années de présidence ont été un grand gâchis pour la lutte contre le dérèglement climatique. Le gouvernement a méprisé les alertes des scientifiques, de la jeunesse, de la justice et a accumulé les sabotages ».

Puis, une poignée d'activistes a perturbé l'arrivée du président dans l'édifice. Pendant que ce dernier prenait la pose en compagnie de la nouvelle présidente du Parlement, Roberta Metsola, des militant·es ont scandé « Climat, Macron coupable ! ». La scène - et l'agacement du président n'ont pas échappé aux caméras de télévision.

L’Écosse fait un pari fou dans l'éolien en mer

Enchères et en noces. Le gouvernement écossais vient d'autoriser le développement de 17 giga-projets d'éoliennes au large de ses côtes. D'ici 2030, ils produiront de quoi alimenter 18 millions de foyers britanniques en électricité renouvelable.

Au Royaume-Uni, la transition énergétique passe par l'éolien en mer. Le pays en est déjà le n°1 mondial avec plus de 10 gigawatts (GW) installés (soit l'équivalent de sept millions de foyers alimentés) et il prévoit de quadrupler son parc d'ici à 2030. Pour ce faire, l'Ecosse a mis lundi aux enchères des concessions portant sur une surface de plus de 7 000 kilomètres carrés ; de quoi installer plus d’un millier d’éoliennes marines pour une puissance potentielle de 25 GW (le parc nucléaire français représente 61,4 GW). 

Le parc éolien en mer de Wikinger (Allemagne) © Anne-Claire Poirier

Pour décrocher la timbale, les lauréat·es ont déjà déboursé pas moins de 840 millions d’euros (700 m£). La construction des parcs représentera un investissement supplémentaire d'environ 60 milliards d'euros. Le Monde rappelle que cette somme correspond à peu près à la construction du réacteur de Flamanville et des six autres réacteurs EPR du même type qu’EDF espère pouvoir construire en France, soit 11,5 GW de nouveau nucléaire.

Les gagnant·es de ces enchères sont majoritairement des majors pétrolières telles que BP, Shell ou TotalEnergies. Les technologies utilisées sont proches de celles employées dans l'offshore pétrolier. Par exemple, dix projets sur 17 utiliseront des éoliennes flottantes, c'est-à-dire non posées sur le sol, à l’image des plateformes pétrolières.

Nucléaire et transition climatique : les clés du débat

Parler du nucléaire est une pratique à risque en France. Loin des guerres de tranchées entre pro et anti-nucléaire, l’émission A l’air libre diffusée ce lundi par Mediapart a été le lieu d'un débat constructif sur l’avenir de cette énergie en France et en Europe, alors que l’Union européenne prévoit de la classer (en même temps que le gaz) comme « énergie de transition ».

© Mediapart

+ Loup Espargilière et Juliette Quef ont contribué à ce numéro